76
premiere chose a laąuelle nous devons veiller, c’est a la stabilite des mariages de nos Chrestiens, qui nous donnent des enfans qui de bonne heure soient eslevez a la crainte de Dieu et de leurs parents. Voila le seul moyen de fournir les Seminaires de jeunes plantes36.
Ainsi, les resultats de 1‘enseignement dispense au seminaire n’est pas tres probant. Le cas d’Andehoua est exceptionnel; d'autres seminaristes deęoivent au contraire leurs maitres. Słils temoignent certaines dispositions sous la pression des jesuites, Ieur adhesion a la nouvelle foi est de courte duree. Des qu’ils quittent le miiieu franęais, ils oublient tres rapidement ce qułils ont appris37. Menie le bon eleve Teouatirhon abandonne ses principes chretiens lorsqu’il rejoint sa communaute d’origine. Corapagnon d’Andehoua, Teouatirhon (de son nom de bapteme Joseph), louange par ses maitres38, reprend son ancienne faęon de vivre des son retour, malgre la desapprobation des missionnaires39.
Un troisieme facteur, lie a la naturę menie de 1'entreprise, joue, selon nous, un role tout aussi important dans V abandon du seminaire. Outre ses visees evangelisatrices, le seminaire repond en efFet a un objectif politique: les Amerindiens y sejoumant servent en quelque sorte d'otages « pour Tasseurance des Franęois qui sont parmy eux, et pour raffermissement du commerce »40. Dans ce contexte, certains sfinquietent: « Pour les enfans, on ne voit [dit un chef montagnais] autre chose que petits sauvages aux maisons des Franęois ; on y voit des garęons, on y voit des filles ; que voulez vous davangages ? Je croy que l’un de ces jours on nous demandera nos femmes »41.
En outre, les jesuites croient que leur enseignement apporte des connaissances nouvelles aux enfants, mais ces connaissances peuvent apparaitre inutiles aux yeux des Amerindiens. Qui plus est, rexperience leur apprend que 1’apprentissage aupres des Franęais leur nuit. Ainsi, un jeune Montagnais, Pierre Pastedechouan, conduit autrefois par les Recollets en France, ou il etait demeure plusieurs annees (de 1620 a 1625) et avait appris le
36 Re lations des jesuites. 1972, vol. 2, 1639, p. 55 (Relation de Jeróme LALEMANT).
37 Ibid. vol. 3, 1642, p. 15-16 (Relation de VIMONT).
38 Ibid, vol. 2., 1638, p. 23 (Relation de LE JEUNE).
39 DIONNE, Le Seminaire [...], 1890, p. 37.
40 Relations des jesuites. 1972, voI. L, 1636, p. 72 {Relation de LE JEUNE).
41 Ibid. p. 61.