6
quasiment deshonorees ? II est caracteristique que la vieille fouille de la Bastille reprend quelque actualite publique par les panneaux qu'expose la RATP dans une des stations du m£me nom. Et surtout il me semble que se font de plus en plus nombreuses les fouilles portant principalement sur des vestiges <Pepoque moderne et contemporaine. Du cóte de la fouille subaquatique, on a explore plusieurs epaves recentes et, il y a quelques mois, l'exposition "Archeologie sous-marine" de Nantes a fait a ce secteur une place non negligeable, avec, ici encore, un coup de chapeau special a la pipę en terre dont je voudrais faire sentir a tous 1’irresistible ascension. Et diverses fouilles terrestres assorties de publications plus ou moins developpees s forges de Buffon (cf. L'Archeol. industrieile en France, 9, mai 198*0 ; etat XVIIIe siecle de St-Etienne de Lille et rebuts d*un atelier de confection de statuettes religieuses du XVIIe siecle dans la mfcme ville (Revue du Nord, 67, 1985, pp.l21-147) ; depotoir de ceramique moderne a Frejus (Provence historique, 35, 1985, pp.299-308) ; et, naturellement, les fouilles du Grand Louvre qui ont notablement donnę lleu a la parution de deux bonnes series de diapositives pedagogiąues faisant un sort a des restes de maisons du XVIIe siecle, a de la poterie moderne - dont une pipę ! - et a la tombe d'un chien louis-quatorzien, ce qui, on s*en doute, nous est alle droit au coeur ; enfin, pour terminer sur un cas qui nous est proche, Bruno Bentz, qui etait alors chez nous etudiant de licence, fouillait, ce dernier printemps, les bassins du parć de Marły.
Et, parallelement, se developpe la prospection aerienne des vestiges recents, comme en temoigne, entre autres, Particie de Roger Agache qui ouvre ce quatrieme numero de RAMAGE.
La question qui vient aussitót a Tesprit est de savoir, de tout cela, quel est l'inter£t documentaire : nłest-ce pas la beaucoup de peine et d*argent depenses pour apprendre bien peu ? Le probleme, en tout cas, ne se pose pas dans les m£mes termes que pour ^archeologie classique, non plus seulement par rapport a un savoir textuel qui, pour n'£tre pas de soi superieur, n'en est pas moins historiquement anterieur, mais aussi par rapport au non enfoui : a defaut de fouille on ignore tout de la maison delienne, mais doit-on fouiller une maison du X!Xe siecle dont des centaines de soeurs jumelles sont intactes ? II faut faire la part des choses. D*abord, on empSchera difficllement que certaines fouilles, mime scientifiquement regulieres, traquent moins le document que la relique : c’est par lfexploration des epaves qu'on apprend un naufrage antique, tandis qu'on connatt le naufrage moderne avant d*avoir decouvert le naufrage ; comment alors, a force d*en avoir dO admirer Pillustre Radeau, ne pas Stre tente de retrouver la Meduse elle-mftme, quitte a nłen pas apprendre grand chose, ou le Saint-Geran par souvenir emu de Paul et Virginie ? Ensuite, je doute que la fouille du recent soit jamais cette brutale apparition du soleil dans le dechirement des nues que fut la decouverte du Palais de Cnossos dont on ne savait rien. Mais, ceci admis, il est peu des fouilles que j*ai citees qui n'ait apporte quelque information nouvelle. II importe seulement de prendre le bon point de vue : ainsi, il est vrai qu'une maison arasee du XIXe siecle n*instruit guere les curieux d'architecture, mais il est vrai aussi que nous la trouvons figee dans son etat d^lors, ce qui n’est pas le cas de sa soeur conservee et occupee jusqu*a nous.