La Chroniąue de Charles VI est, on l'a vu, un rerit documente. Lexamen attendf de U maniere dont le Religjeux a rendu compte des documents quril a eus entre les mains peui s'averer fort instructif: en plus d’eclairer les methodes de travail du chroniqueur, une anałyse comparative perm et parfois de reperer des additions ou des alterations qui en disent Iong sui ses idees et ses preoccupations58. Bień entendu, une telle demarche n’est possible que dans les cas ou l'on peut avoir acces au texte original des documents evoques par Michel Pintoin ou, i tout le moins, a une version qui tui est suffisamment conforme pour etre utile Ainsi, nous aurons plus loin 1'occasion de comparer un rapport d'ambassade de 139S et une serie de trois discours politiąues prononces entre 1408 et 1413 aux adaptations qu'en donnę le Religieux.
Ces analyses textuelles seront completees par une approche contextuelle. Le premiei chapitre nous permettra ainsi de mettre en perspective les vues de Michel Pintoin sur le role dc l'eloquence dans la vie publique, en situant notamment son temoignage par rapport aux grandę; tendances de la litterature ethico-politiąue medievale; un tel rapprochement se justifie dans la mesure ou le Religieux n'est pas seulement un memorialiste, mais egalement un moralistę, qui ecrit autant pour instruire que pour informer. Nous verrons comment la valorisadon appuyec du talent oratoire, chez un lettre benedictin ecrivant sous Charles VI, peut etre interpretee comme le signe d'une transformation en profondeur de la conscience politique des intellectuels franęais au cours des XIV' et XV* siecies; une transformation qui doit etre misę en rapport avec l’evolution parallele des institutions et des conditions d'exercice du pouvoir. Lanalysc approfondie des discours contenus dans la Chromąue du Religiewc de Saint-Denis sera 1'objei de notre second chapitre. Ces demiers peuvent etre ranges, comme nous le verrons, en deux categories distinctes: si certains apparaissent avant tout comme des constructions Irtteraires du chroniqueur, dont ils refletent la cuhure et les convictions, d'autres sont representatifs des deux principaux genres oratoires pratiąues en France au toumant du XV* siecle, soit Yarenga et le sermon "thematique".
5S
Voir id., "Documents inseres ei documents abrćgćs". en particulier pp. 392-400.