entre les grandes fonctions du ma-nagement devient un vecteur d'intć-gration des structures. En favorisant l'ouverture vers l'extśrieur il est śga-lement un vecteur d'óvolution des comportements. Enfin en associant gestion et technologie, et en don-nant ś cette derniśre ses lettres de noblesse, il est un vecteur de chan-gement de la culture de 1'entreprise.
Mais Ton ne peut rśsumer l'ou-vrage de Jacques Morm car a cha-que page, surgissent des rśflexions, des idees ou des recettes. On se trouve confrontś ś un vśritable ou-vrage de base marquant une nou-velle śtape dans 1'histoire de la conduite des affaires. Aussi faut-il souhaiter, comme 1'ancien ministre de la Recherche Pierre Aigrain, dans sa prśface, qu'il devienne « le livre de chevet de tous les dirigeants d'entreprises ś vocatlon technolog i-que, les seules qui subsisteront dans quelques dścennies ».
J.P Bouyssonnie (39)
Une incertaine realite Bernard d'Espagnat (42)
Paris - Gauthier Villars - 1985
De cette nouvelle etape de Bernard d'Espagnat dans sa quśte du sens de la rśalitś, on retiendra avant tout le tśmoignage d'un profession-nel de la physique doublś d'un homme de culture. De fait. meme s il qualifie son livre d'ouvrage de recherche et non de vulgarisation, son souci pedagogique (langage simple, idśes detaillśes. guide de lecture etc), permettra ś un large public de profiter de cette rśflexion indispen-sable ou philosophie et physique moderne s'enchevśtrent et se fecon-dent mutuellement.
Une anecdote et une image per-mettent de situer le dśbat ou Bernard dEspagnat enonce sa thśse des « deux róels », ou de « l'exis-tence de plusieurs niveaux de rśalitś ». L anecdote de l’intervention du Cardinal Bellarmin qui, pour prś-server Galilee des foudres du siśge apostolique, l'avait mcitś ś prśsenter • la theorie Copernicienne non pas comme une thśse portant sur la rśalitś du monde. mais comme une rś-gle de calcul commode (p. 27). L'image du « Disque et du concert » (p. 269) : la structure spatiale de l'objet disque. creux et bosses le long des sillons, provient directe-ment de la structure du phśnomśne róel concert, mais ne lui est pas pu-rement et simplement identifiable.
Un extra-terrestre, decouvrant le dis-que, pourra reconstituer un ensemble de structures et se construira une reprśsentation du concert. Ce-pendant, quelque douś qu'il soit, il ne reconstruira pas le concert lui-mśme (quelle que soit la naturę de ses sens). L'examen du disque lui donnera non seulement une idśe, mais une connaissance quantitative du concert, donc du « róel ». Cepen-dant, la part inhśrente d arbitraire dans toute tentative de reconstruc-tion complśte et fidśle de ce reel rendra la connaissance de ce dernier « voilee », quelle que soit lauthenti-citś avec laquelle l extra-terrestre pourra « ś la fois (en) saisir et gou-ter... l essentiel ».
Deux póles sous-tendent la notion de rśalitś dans ses diverses accep-tions. Le reel en soi. ou rśalitś indś-pendante de l‘homme-observateur scientifique dont le but est d en dś-couvrir les lois. Le reel empirique, ou ensemble des phśnomśnes entre les-quels le physicien etablit des rela-tions, des « recettes qui marchent », transformant le « pourquoi » en « comment ». Bernard d'Espagnat va nous montrer comment la physique moderne nous empóche de faire l'« óconomie » d'une de ces deux notions. Son interrogation sur ces deux póles, rśalisme (cher ś Einstein) et instrumentalisme (dogme de 1'ócole de Copenhague), dans le ca-dre de la science contemporaine, nous force, affirme-t-il, a accepter « la dualitó (philosophique) de l'ótre et du phónomóne ».
Bień entendu. aucun doute ne piane sur le caractere fondamental. universel et fecond de la móthode scientifique elle-meme. La methode expórimentale, et 1'aller et retour entre 1'esprit et les phónomónes, me-nent ó des theories. « recettes qui marchent ». Apprendre ces thóories, qui rendent compte des phónomónes expórimentaux et de leurs relations, est indispensable. Cet instrumentalisme est une móthode surę, móme si elle est insuffisante. Le veritable debat surgit une fois admis cet instrumentalisme de base :• peut-on comprendre ce qu'une theorie-instrument sigmfie ? peut-on 1'inter-próter dans un sens realistę (classi-que ou autre) ? Autrement dit, la móthode peut devenir une doctrine - 1'instrumentalisme — ou les thóo-ries ne sont que des instruments de prediction, face ó laquelle se dresse une autre doctrine — le róalisme — pour qui la thóorie reprśsente ce qui est, et a une interpretation ontologi-que.
II est difficile, voire impossible, de resumer le cheminement et l'argu-mentation de Bernard d'Espagnat sans risquer de dóformer sa pensee. Relevons simplement quelques ele-ments parmi un ensemble extraordi-nairement fourni, dótailló, et une analyse aussi subtile que claire. Tout d'abord, la notion de reel « voiló » introduite dans « A la recherche du Reel » est ici reprise et affinee. Ce premier livre ótait principalement consacró ó la physique quantique et ś la non-sóparabilite (ó laquelle l'es-prit de 1'homme doit s'habituer). lei, le champ d'investigation s'ouvre considerablement gróce, en particu-lier, ó 1'analyse des rósultats de 1'ścole de Bruxelles (I. Prigogine et collaborateurs) sur les processus complexes hors d'óquilibre. Ceci donnę une dimension nouvelle et ótonnante aux idees de Bernard dEspagnat.
L'argumentation se subdivise en trois grandes parties.
La premióre consiste en une analyse critique du positivisme (directe-ment lie ó 1'instrumentalisme), et met en relief la richesse (et la mode-ration) du « positivisme des physi-ciens ».
La seconde partie est consacróe au róalisme. Une quantitś d aspects et de dócouvertes de la physique contemporaine sont 6voquós (entre autres : la cosmołogie, le Big Bang, et le fait que la physique soit ame-nee a enoncer des propnótós qui sortent de la sphóre d accessibilite expórimentale; les difficultes aux-quelles se heurte le róalisme pur — non-separabilitó, « paradoxes » de la mecanique quantique etc.). Bernard d Espagnat nous montrera que, meme si 1'instrumentalisme doit ótre associe a quelque rśalisme, le rśalisme physique est un « idśal » dont nous sommes fort loin.
La passionnante troisieme partie, « La cause, le Reel et le Temps », s'ouvre. nous l'avons dit, ś des concepts et phśnomśnes physiques ■dont Bernard d'Espagnat n'avait pas traitś dans ses prścedents ouvrages, en particulier les phśnomśnes complexes (liśs aux grands nombres, macroscopiques) śvolutifs. Des concepts et prmcipes propres ś ces phśnomśnes, non rśductibles au mi-croscope, sont nścessaires. De nou-veaux arguments pointent pour 1’abandon de 1'idśe d'un rśel en soi. La discussion se poursuit jusqu'ś l‘śvocation, nścessaire, des notions de conscience et de libertś. Lś, aussi, se place cette śtonnante confrontation de deux thśses, dii-