174 Comptes rendus 8
enregistrć sur le terrain, diiectement des informateurs,un tres riche corpus de rites et,de surcroit, il nous a donnć tous les details sur les conditions qui lui ont donnę acces a la formę complete des operations, des propos, des clameurs et des chants. Ce qui est absolument remarquable c’est Peffort de traduire en franęais tous les textes, notamraent les vers populaires. Ainsi ont ete accompli les deux conditions methodologiques operantes que Pauteur s’etait fixees - prendre en compte la pluralitć des variantes et operer sur des textes complets, recuillis dans leur formę originale - et qui ont conduit k une analyse d’anvergure, tres complexe et nuancee.
L’auteur nous expose la stucture de son ouvrage dans une introduction qui detaille
les etapes de Pinvestigation et le contenu des chapitres.
Rituel de fondation «le feu vivant» a ete surpris encore dans sa raanifestation repetee
tous les ans (Ier Partie, chap. 1-5: Le Monde et ses liens ). La IIe Partie comprend Panalyse de Punivers de parents dans lequel prend place le nouveau-ne, parents categorises et lies les uns les autres selon les modalites complexes qu’indique le systeme des appellations moins transparents qu’il ne se donnę a un premier examen (chap.6-7). Dans la IIP Partie {Le choix du conjoint et le ceremoniał des noces) Pauteur surprend le moment d’une deconstruction et, simultanement, d'un commencement qui reclame une construction sur le modele preexistant des liens ancestreux: «Les grands rituels des noces viennent sanctionner alors, par la solennite de la celebration, la fete de Palliance et les engagements pris de part et d’autre pour recomposer les unites domestiques et recombiner les biens patrimoniaux» (chap.8-12). Enfin, dans la IVe Partie 1‘auteur expose comment on procede, en Roumanie, pour la transmission des biens a travers les generations et pour Pinstitution des heritiers. Non moins que les noces, les funćrailles se donnent comme une celebration de la parente (chap.13-15).
La force des observations de Jean Cuisenier est due, indubitablement, aux subtilites de son esprit, a la darte de ses jugements et,non pas en demier rang,a son experience d’investigation sur le terrain qui Pont aide d’aboutir, avec pertinence, a des conclusions d‘une grandę valeur epistemologique. II est alle, par exemple, plus loin que les linguistes dans leurs efforts de dćcodage du patrimoine lexical latin du champs de la parente. L’auteur a releve «un systeme des categories qui caracterise avec plus de force et de precision les relations d^lliance que les relations de collateralitć.et les relations de collateralite, a leur tour, que les relations de filiatious, systeme tres different, en realite, de celui clairement patrilineaire, qui prevalait a Romę au temps de Trajan et des guerres daciques. Comme s’il importait de qualifier plus exactement les rapports entre allies par mariage que les rapports entre cousins. Comme s’il fallait marquer plus fortement les rapports entre Poncie et le neveu que les rapports entre le grand-pere et le petit-fils. Comme si dans la ligne d’ascendence il suffisait de se rattacher aux ai‘eux, sans avoir besoin de decider si Pon se rattache a ceux-la par le pere ou par la mere»(p.204). Les linguistes roumains, interpretes de VAtlas Linguistiąue considerent seulement qu’un pareil systeme conserve «un etat de la societe depasse»; a ceux-la Jean Cuisenier associe les theses de Jack Goody qui le comprend comme «Pun de ces systemes originaux qui dans toute PEurope Centrale et nordique aurait toujours resiste a Pimposition, par Romę et par PEglise, de la patrilinearite jointe a une trop coustrignante exogamie». Nous ajoutons que Peglise onhodoxe consigne que la relation etabhe entre les parents par election (parrain h de mariage - marraine/- de mariage (et les filleuls-filleules est une vrai liaison de parente, p.ex. des mariages entre les deux categories sont interdits. Aussi les personnes de sexe difTerents baptisees dans la meme eau des fonts baptismaux devenaient des freres (soeurs) de bapteme et ne pouvait plus de marier.
Jean Cuisenier a remarque que dans la periode communiste Peglise orthodoxe n’a pas cesse de participer a la vie des villageois, sa benediction etant presente dans tous les rituels: «Quant on commence une nouvelle costruction,on appelle le pretre et le chantre pour faire un office religieux» (p.159), «le service religieux et Poffice du pretre au ceremoniał des noces» (p.240-247), «les funerailles» (p.357-360). Malheurresement, tres peu de reinseignements ont ćtć foumis sut le cćrćmonial du bapteme (p.183).