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Les prób limes
de l'historiographie contemporaine del'Afriąue:
biais et perspectives
1’Occident. La crise que traversent aujourd’hui les Ćtats capitalistes industria-lisćs, et dont les mouvements de jeunes sont l’expression, est soigneusement dissimulće derriere un plaidoyer en faveur du modę de dćveloppement Occidental*. »
De telles remarąues peuvent paraitre fort gćnćrales et peu aptes k fournir des indications prćcises pour la rćdaction d’une histoire de l’Afrique contemporaine. Cependant, prendre ses distances k 1’ćgard de toute approche « ćvolu-tionniste » ou « modemisatrice » revient k regarder d’un autre ccii le dyna-misme des socićtćs africaines, k ne pas s’intćresser seulement aux institutions, róles et processus qui sont censćs faire Thistoire de toute socićtć moderne ou en voie de modemisation. Nous ne voulons pas dire par lk que 1’histoire de l’Afrique est par essence particulifcre, mais plus simplement que 1’approche et le langage de la dćmarche ćvolutionniste ou modemisatrice ne mettent gćnć-ralement en valeur que les ćlćments d’une vision unilinćaire et ćlitiste du progres humain. Une telle vision correspond parfaitement k 1’idćologie dominantę de nos socićtćs « modemes », selon laquelle toute ćvolution, tout progrós doit etre impulsć et organisć par un « centre », une « avant-garde », une « bureaucratie rationnelle », Iaissant peu de place k ceux qui n’ont pas la chance d’appartenir au « front du progres ». En somme, et k partir de ces remarques de base fondamentales, nous pensons qu’une histoire contemporaine de TAfrique doit ćviter deux ćcueils, qui d’ailleurs vont gćnćralement ensemble : Le premier serait d’organiser 1’histoire de l’Afrique autour de ces « construc-teurs » d’histoire que seraient les ćlites, les fitats, les partis, etc., c’est-i-dire autour des structures politiques du centre. A cela, nous opposons une conception plus large et plus profonde, qui tient compte en particulier de Vaction populaire et de la vie ąuotidienne.
Le deuxieme ćcueil, qui est le corollaire du premier, consiste k prendre le langage de l'Źtat et des classes dominantes pour argent comptant, alors qu’il faut, selon nous, y voir un discours de pouvoir lić k la situation dominantę de ceux qui le structurent et le diffusent. Nous insisterons donc sur les ćlćments idćologiques de ce langage ćtatique dont la dimension mythologique nous parait tout aussi importante que la dimension prćtendument objective. Tout discours, au sens sociologique du terme, qu’il vienne d’un leader ou qu’on le peręoive k travers une institution, est produit, et donc situć socialement et historiąuement; aussi doit-il etre analysć comme tel.
Je me propose ici de dćvelopper quelque peu ces deux points, car ils sont, me parait-il, au coeur de la mćthodologie et de la problćmatique qui devraient
2. O. Onoge, « Revolutionary imperatives in African sociology », dans P. C. W. Gutkind et P. Waterman, African social studies, a radical reader, Londres, Heinemann, 1977, p. 39.