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pour les retraites nnnuelles qui rappelaient les Fr£res dispcrsćs au centre dc Icur vie cł dc lcur luiniere. Ccst i lui que, onze ans plus tard, la Congrćgation devenue orpheline, confla la mission dc prononcer 1'oraison funóbre dc son saint fondateur, Ic Vćnerable Jean-Marie de La Mennais, a lui qui. disait-il. « ne ful qu’un ami respectueus et trop tardif de son in-comparable vieillessc. > (1)
De retour i Kcrmeur enrichi des lumióres ct des conscils recueillis des levres et du cceur dc Jean-Marie de La Mennais, M. de Lćsćlcuc se donna tout entier k son apostolat. La petitc chapellc du manoir etait un centre de rayonneincnt. II avait obtcnu pour certains jours des indulgcnces plenićres en faveur des fid^lcs qui la visitaient. II allait faire le catechisme aux enfants du bourg de Guipnvas, dans la chapelle de N.-D. du Run. A Brest, 1'nppelait 1‘amitić dc M. le chanoine Mercier, archiprótre de Saint-Louis. Mais ii aimait surtout d’óvangt1liscr les populations rura-les dans cette langue bretonne qui prenait un charme captivant sur ses 16vres, pour burincr dans les Ames les vćritćs de la foi ct les vcrtus chrćtiennes. Son zćle s’excręait dans les colleges et les monastćres de la Retraite a Lannion, que goiivernait la M&re de Ker-tanguy, sa cousine, celle qu’il appelait la « refonda-trice des fllles de la Sainte-Vierge > et l&, il trouvait comme aumónier un disciple du V. de La Mennais, 1’abhć Kermoalquin, qui sc devoua Iongtemps k 1'ceu-,vre dc 1’education des jeunes filles, entreprise par la Retraite. M. dc Lćsćleuc ćcrivait rarement ses instruc-tions, mais, prćparćc par de longues inćditutions, sa parole jaillissait dc son coeur comme une luiniere vive et en traits de flamme. La voix ćtait moellcuse et puissantc k la fois. EUc accentuait chacun des mots qui pćnćtraient avec tout lcur poids dc vćritć jus-
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qu’au fond de 1’ame. La dignitć de son maintien, la noblesse de sonbeau front et dc ses traits encadrćs d’une longue et abondante chevclure, lui donnaient une niajestć qui semblait grandir sa taille, si bien que la finesse trćgorroisc, donnant un double sens au mot, 1’appelait « le grand Recteur, ar Pcrsoun bras >. Mais 1'amabilitć gracieuse dc son visage, son regard profond et doux attiraient les enfants ct les humbles, et quand il se livrait & sa vcrve dc conteur et aux saillies petillantes de son esprit, c’ćtait un charme incomparable.
Ses longs et intimes entretiens de PloSrmel avaient portć avcc insistance sur 1’ecole dc haute science ecclćsiastique tentće 6 Malestroit. 11 semblait que M. de La Mennais avait senti 16 s’ćcrouler dans une catastrophe, une de ses aspirations les plus ch6res pour le service de 1’Eglise ct du clcrgć dc France. Cćtait dćsormais un vide Want dans les plans de restauration du clergć ćlabores ct róalisćs par le genie de Jean-Marie de La Mennais, et ses confidences a ce sujet, sa tristesse, devaient avoir un long retentisse-ment dans rśme de M. de Lćsćleuc.
II en tracę un large et ćmouvant tableau, dans cette page empruntće 6 1’Oraison funebre du saint vieil-lard ; et il senible que de son coeur debordc 1’ambi-tion alors caressec dc rcssuciter et de continuer sur de nouvelles bases ł’ceuvre dc Malestroit.
« Jc dois dire quelque chose de sa Maison de Malestroit II me scmble. cn efTet, que la pensće qui donna naissance 6 ccttc (ruvrc, conęue peut-^tre au milieu de ses travaux de professeur, de inissionnaire, et d’ad-ministrateur, dut atteindre son entióre raaturitć au milieu des graves prćoccupations de^ Grandę Auinó-nerie. L& surtout, entoure des vćnćrables d^bris de nos splendeurs thćologiqucs, il put inesurer de plus pr6s la pertc quc 1’Eglisc avait subie, cn voyant dispa-
Oraison funcbre, pagc 6.