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Dans La bete lumineuse, Tlndien est cet homme qui vaque en arriere-plan, on le voit se promener, il coupe du bois, on sait aussi que c’est lui qui organise les repas pour les chasseurs, il est rhomme qui s’occupe du campement, comme je disais tantót, il est le fixer, mais contrairement a Flaherty, il n’est pas la vedette, il n’est pas le sujet. II existe, chez Perrault, une certaine gene a faire de cet homme un personnage complet et complexe ; il existe comme une fausse pudeur, mais je crois en fait qu’il s’agit d’un regard purement colonial de 1’auteur. L’Indien, c’est le domestique et filmer le domestique, a quoi bon. Pourtant, malgre cela, cet homme et sa presence fantomatique est essentiel au deroulement de 1’histoire qui nous est racontee, et contrairement a d’autres oeuvres de Perrault, ou le personnage autochtone se deploie au centre de la narration, cette silhouette, en restant dans 1’ombre, nous en dit beaucoup sur les protagonistes. II s’agit d’une des rares utilisations en demi-teinte sur laquelle je m’interroge encore : jusqu’a quel point cet etat des choses participe-t-il d’une volonte flagrante du realisateur?
Quelque quinze annees aprćs Attiuk, Perrault nous donnę Le gout de la farine. Je reviens k la description du film faite par un technocrate de PO.N.F. sur internet: « Documentaire sur les Montagnais (c’est moi qui souligne) de Saint-Augustin et de La Romaine, dans la rćgion de la Cóte-Nord, au Quebec. Vous y decouvrirez que malgre la pensee traditionnelle de notrc culture qui s'est toujours crue superieure a la leur, nous avons encore beaucoup a apprendre des Amćrindiens ».
Perrault nous regarde par le biais de 1’autre, et refonde la question identitaire: de « qui sommes nous? » nous passons a la double question identitaire « ou sommes nous? » et« ou allons nous? » A la suitę de Pierre Ouellet, il nous faut« analyser les formes d’ónonciations verbales et visuclles de la mómoire, de la perception et de 1’imagination qui sous-tendent l’experience intersubjective ou la dynamique