Comptes rendus
L'invention du jeune en fant au X/Xe siecle. De la solle d’osile a I*ecole matcrnelle
ou des Filles de la Sagesse. Lensemble de ce personnel est de plus en plus compe-tent, pouvant suiyre une “formation conti-nue”, actualiser ses connaissances grace a une revue specialisee, L'Ami de 1’Enfance qui parait de 1835 i 1896. Les sali es d’asile offrent a la femme “apres le metier de sage-femme, la seconde profession qui lui soit offlciellement reservee au nom de sa specificite” (p. 337).Avec le corps des ins-pectrices, les femmes accedent a de hautes fonctions.
Mais, malgrś ce vif succes, dans les der-nieres annees du siacie, les salles d’asile declinent tres rapidement et sont sup-plantees par les ecoles maternelles. Mutation qui s’explique en partie par l’ap-port de nouyelles pedagogies (jardins d’enfants de Froebel par exemple) mais surtout par la misę en place de 1’ćcole republicaine qui tente egalement de contróler la pre-scolarisation. Apres le 30 janvier 1879, datę k laquelle les Republicains, diriges par Jules Grśvy, ont la totale mainmise sur FEtat, la collaboration avec les dames patronnesses et les congregations s’avere impossible. II convient desormais que Tenseignement prćscolaire des 2-6 ans soit etroitement lie a 1’ecole de la Rśpublique et confie k de veritables institutrices. On assiste alors a de virulentes dćnonciations des salles d’asile. Ainsi, en 1889, Marie Matrat, ins-pectrice generale des ecoles maternelles, dans son Histoire de 1’education enfantine publique, se livre a un violent requisitoire a Fencontre de ces “ecoles de charitć”. Elle dśplore que “la salle d'asile annihile Tindi-vidualite“ et fasse de 1'enfant “un etre pas-sif“. Selon elle, 1’ćducation doit retourner a la famille:“La France (.-.)• ecrit-elle,doit, d’une maniere gśnerale, organiser 1'ćduca-tion de Tenfant du peuple par la familie, et elle le peut Elle le doit dans 1’interet de 1’Etat, de 1’enfant et de la familie meme”. La circulaire du 25 janvier 1882 proclame que 1'ecole maternelle ne ressemble plus a la salle d’asile d,autrefois“ mais “est une vćritable maison d’śducation“.
Jean-Noel Luc remet en cause cette idee reęue issue des violents conflits entre Republicains et Catholiques qui voudrait que Fćcole maternelle ait reprć-sentś une reyolution en matiere d’óduca-tion au regard de salles d’asile conęues comme un instrument d’expioitation des classes laborieuses et dangereuses, un moyen de defense sociale mis en place par les classes dirigeantes. L’auteur dćmontre que la salle d’asile a etó pendant plus d’un demi-siecle un lieu d’inno-vation pedagogique, la “premiśre entre-prise d’education collective des jeunes enfants“:acquisition des “notions elemen-taires“, lecture, calcul, ecriture, apprentis-sage des fables, poćsies,“leęon de choses” mais aussi hygiene corporelle, exercices physiques, education morale et religieuse. Jean-Noel Luc pense meme que la pedagogie developpee dans les salles d*asile etait parfois mieux adaptee que celle dis-pensee dans les ecoles maternelles, reya-lorisee sur le modele et en fonction de la grandę ścole et donc souyent mai adaptee aux besoins de la seconde enfance. Sans nier que 1’assistance ait ete une prio-rite dans Tesprit des createurs des salles d’asile et que Tenfant du peuple soit la cible priyilegiee de 1’institution, Tauteur souligne que celle-ci sadresse egalement aux classes aisees, propose une solution digne aux mśres mondaines defaillantes. Pour alimenter son argumentation, Jean-Noel Luc indique que le mouyement n’a pas seulement óte dśfendu par TEglise, mais aussi par I’Etat et meme par les milieux socialistes (bucheziens, fourie-ristes...) approuvant un projet qui fait de 1’enfant un etre appartenant moins a sa familie qu’a la societ^. On regrettera cependant que 1’auteur s’attarde si peu sur la raison dominantę (certes la mieux connue a ce jour) qui preside a la nais-sance des salles d’asi!e: 1’assistance. Rappelons, par exemple, que, sous la plume de Salvandy, trempee dans 1’encre du catholicisme social, les salles d’asile sont peręues comme ‘Toeuyre de saint Vincent de Paul continuee jusqu’^ l’ćpoque de 1'entree aux ecoles”.
Comme le demontre bien Jean-Noel Luc, la grandę nouveaute de ia premi&re
Śducation et Sociśtśs
na 3/1999/1