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Eberhardt prepare ici la fin tragique du lieutenant de Lavaux, precisant pourtant qu'il meritera bien son sort. L'opposition fondamentale dans cette nouvelle ne passe pas par le couple d'amants : femme indigene/ homme Occidental, mais elle traverse deux mondes incompatibles: l'uni-vers des colonises et celui des colonisateurs. Le statut du personnage du spahi, Abdelkader, s'avere particulier, car a cause de son engagement niili-taire dans 1'armee franęaise il veut rester loyal a ses superieurs, mais d'un autre cóte il veut garder sa dignite d'homme en reglant son compte avec le lieutenant de Lavaux qui lui a enleve Tessaadith pendant son absence sous pretexte qu’elle se livrait a la prostitution clandestine. Abdelkader, homme dechire a 1'instar des heros corneliens, apres quatre ans de service ne se rengage pas, pour pouvoir se venger du lieutenant car, etant spahi,
il etait doublement impuissant : indigene et soldat, courbe sous un double joug, devenu ecrasant. Et il dut se soumettre [...]. Abdelkader, raidi dans sa ragę, sous le joug qu'il avait appris a hair depuis qu'il l'avait blesse dans sa chair, gardait le silence. Devant le lieutenant, il baissait les yeux, refoulant sa revolte et meditant sa vengeance. Des paroles du deira (la patrouille) qui avaient trouble son coeur, il avait fait justice par une enquete minutieuse : Tessaadith lui avait ete fidele tant qu'elle etait restee chez Fatma. Et il ne pouvait fróler le lieutenant sans des pensees homicides torturantes.342
II n'est pas question ici d'une vengeance aveugle; ce qui apparait le plus important, c'est de venger une offense commise sur un inferieur; le personnage d'Abdelkader a dans cette nouvelle une dimension symbolique car le jeune homme ira jusqu'au bout, n'ayant peur de rien, meme de la mort; il tuera de Lavaux, il sera condamne a mort, sa peine sera commuee par la grace presidentielle. Abdelkader
s'en alla tres loin, de Pautre cóte de la terre, pour vivre cette perpetuite ter-
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restre de souffrances dans la servitude que, dans leur orgueil, les hommes se sont arroge le droit d'infliger a d'autres hommes si semblables.
... Tessaadith, tombee a la maison de Ben Dif Allah, boit Pabsinthe avec les tirailleurs et les spahis. Vieillie et flćtrie, elle conserve quand meme de la tendresse pour les mercenaires au burnous rouge, parce qu'ils lui rappellent celui qu'elle pleure encore parfois [...J.343
Sauver son honneur est un acte important, mais la relation entre Abdelkader et le lieutenant de Lavaux est inscrite dans le paradigme de rapports colonisateur/colonise, ce qui indubilablcment mene au conllit des
Ibid., pp. 186-187. 343 Ibid., p. 189.