Le bicentenaire de 1’Ścole normale supćrieure 83
Reprenant les conclusions des travaux rćcents, Jacques Verger montre dans son introduction qu’en rćalitć, 1’Ćcole normale supć-rieure demeure jusqu’& la fin du sićcle demier fiddle k sa mission principale, qui est de former des agregćs pour les lycćes. Mission qui n’est certes pas contradictoire avec la volontć affichće d’en faire aussi un ćtablissement superieur ouvert k la recherche, mais sur laquelle les responsables du Centenaire ont dćlibćrement choisi ne pas insister. En pretendant incamer k elle seule rexcellence universi-taire et en preferant ignorer ainsi le dćveloppement rapide de l’ensei-gnement superieur, l’ENS se prćparait mai, sans doute, aux change-ments inevitables qui s’annonęaient.
C’est prćcisement sur ces changements qu’aurait dfl s’ouvrir le livre du bicentenaire, consacre exclusivement au deuxićme siacie de 1’ENS. Mais les maitres d’ceuvre se sont crus obligćs d’ćvoquer au prćalable la premierę naissance, celle de l’an III, comme s’il fallait confirmer le mythe fondateur et justifier ainsi la datę mćme du bicentenaire. L’article d’Hughes Moussy prćsente donc une synthćse claire mais assez convenue sur 1’ćcole de Tan III, sans d’ailleurs s’interro-ger sur la filiation entre la premićre Ecole normale et celle crćće par Napoleon. Aprćs ce preambule oblige, le livre commence vćritable-ment avec la deuxieme naissance de 1’Ecole, au debut du XXe siacie, c’est-a-dire moins de dix ans apres la cćlebration du Centenaire. Pierre Albertini analyse la rćforme de 1903 qui rattache 1’ćtablissement a l’Universitć de Paris, en la replaęant dans son contexte poli-tique, social et intellectuel. De cet article trćs dense, je relćverai seu-lement ici comment 1’auteur explique « le sauvetage de 1’essentiel », alors que 1’ecole ćtait menacee de disparaitre : c’est en fait grace k son recrutement, c’est-^-dire au concours et aux classes preparatoires, qu’elle a pu survivre. Les effets sur 1’Ecole s’en feront sentir jusqu’& aujourd’hui.
L’Ecole normale supćrieure de la rue d’Ulm ayant fiusionnć en 1985 avec 1’Ecole normale supćrieure de Sevres, le livre du bicentenaire se devait d’evoquer 1’histoire de 1’ćcole-sceur crćće en 1881 pour les jeunes filles. Mais Sćvres, comme le montre Franęoise Mayeur, est k tous ćgards un ćtablissement trćs diffćrent d’Ulm, meme s’il s’en est progressivement rapprochć aprćs 1945. C’est donc une fois encore un devoir de mćmoire plus qu’une nćcessitć historio-graphique qui justifie cette prćsence dans le livre du bicentenaire. Ni Sevres, ni les sćvriennes ne sont d’ailleurs ćvoqućs dans la suitę de l’ouvrage.
Faute de pouvoir citer tous les articles, je retiendrai deux autres thćmes traitćs dans le livre du bicentenaire : le portrait social de 1’ćcole et de ses ćlćves d’une part, le róle du « póle scientifique » de 1’autre.