sensibles si on considerait ceux-ci en fonction de (ensemble quils forment avec Saint Jean et dont I unitć primitiye reposait ćyidemment sur I eąuilibre de grandes masses sculpturales et de couleurs francbes, egales dintensite.
Mais cet eąuilibre pressenti avait ete profondement fausse. Alors que Saint Jean s imposait par 1’eclat encore puissant de son manteau vert et la neryosite de son drape, Ie yetement rouge de Dieu, etouffe par un surpeint presque generał, ne pouyait plus atteindrc ni a cet eclat ni a cette yigueur des plis, alourdi qu*il etait par un dessin mou et un modele applique, en quelque sorte academique. Enfin, Ies tons bleus de la Vicrge accusaient une decbeance plus saisissante encore (PI. VIII). Un surpeint complet et des vernis alteres Ieur avaient enleve tout ćclat, toute transparence. Le yernis, yoilant d’un gris jaunatrc Ies lumieres et blancbissant Ies ombres, niyelait yeritablement Ies yaleurs autour d un ton moyen incertain et trouble. De la, une saillie insuffisante et besitante des reliefs clairs, un manque de prolondeur dans Ies creux d ombre. Le galon d or intact, conęu en łonction du yolume et destine a le soutenir par la Iigne, se trouyait en conlradiction inattendue avcc Ic clair obscur łausse, et suggerait a vide une masse disparue. Lceuyre avait perdu simultanement ses qualites cbromatiques et plastiques, et Ies trois figures se separaient desormais par 1’alteration des qualites mcmes qui devaient originairement Ies unir.
LAdoration etait un cas plus compIexe encore, a considerer dans lensemble du registre inferieur dont Ies yolets, qui en prolongent la composition, etaient beaucoup mieux conserves. Outre le brunissement generał du aux yernis, une Iarge partie des verts etait tr&s assombrie (PI. XXVIII, XXIX, XXX et XLII a XLV1I) : tout le paysage derriere TAgneau, les arriere-plans de collincs boisćes a droite et le coin de prć cntre Ies Anges et Ies Vierges-Martyrcs. La composition spaliale en etait completernent troublee. En effet, le paysage avait de toute eyidence ete construit par une succession de plans yerts disposes symetriquement par rapport a TAutel qu ils deyaient mettre en valeur, et se superposant par des obIiques, tandis qu’un degrade du sombrc au clair, repondant a la suitę des collincs, conduisait I’oeiI de I ayant-plan a I ecbappee bleue des lointains.
Or, yoici que, des le second plan a droite, et un peu plus Ioin & gaucbe, le paysage s’assombrissait au Iieu de s eclaircir. Les arriere-plans, derriere TAgneau et a droite des Anges, s’avanęaient au Iieu de reculer, et ecrasaient I avant-plan. En mcme temps, le desequilibre entre Ies pres a gaucbe et a droite des Anges faussait la symetrie initiale qui soulignait, du point de vue spatial et cbromatique, la position centrale de 1’AuteI.
Dans l ensemble des parties surpeintes, Ies feuillagcs s agglomeraient en masse opaque et boucbee, sans mobilitć et sans air. II suffisait, pour s en conyaincre, de Ies comparer a ceux des zoncs originales intactes, ou cbaque feuille, neryeuse, frissonne dans I espace
(PI. XLVIII).
La robę yiolacee du second propbete & gaucbe de la Fontaine etait obscurcie par un surpeint qui rompait la symetrie du groupe avec celui des Apótres, et affaiblissait le mouyement en arc de cercie dessine par ces personnages clairs, de part et d’autrc de la vasque.
Ajoutons a cela I assombrissement du ciel, son manque de transparence dans le bleu — compare aux yolets — et ł on saisira I ampleur de la transformation.
II fallait donc s efforcer de retrouyer la profondeur dc la composition spatiale, la symetrie et I unite d eclairage, qui rendraient a nouyeau sensibles, dans 1’accord des yerts et des bleus de tout le registre, la disposition en cercles concentriques des anges et des quatre groupes d’adoratcurs, et Ieur mouyement conyergeant, etendu aux corteges des yolets, vers 1’Agneau divin.
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