Souvenirs chapitre 4


Les Souvenirs  chapitre 4 : Vertus surnaturelles
CHAPITRE IV
Vertus surnaturelles
Esprit de priÅre - Grâces d'oraison - Influence d'Elisabeth - O crux, ave, spes unica - Rapports avec le Carmel - DerniÅre retraite dans
le monde.
omment s'étonner qu'une âme aussi généreuse ait été divinement comblée. « Ta mesure sera ma
C
mesure , disait Notre-Seigneur ą sainte Catherine de Sienne. Celle d'Elisabeth devait ętre
abondamment remplie.
Elle reçut d'abord un esprit de priÅre qui l'aurait retenue des heures Ä… l'église. Une amie de sa mÅre lui
demandait un jour ce qu'elle pouvait dire au bon Dieu tout ce temps-lÄ…. « O Madame, nous nous aimons .
Réponse digne d'une enfant de sainte ThérÅse : la séraphique MÅre n'enseigne-t-elle pas que l'oraison
consiste moins Ä… penser qu'Ä… beaucoup aimer.
Bien jeune encore, nous nous en souvenons, elle allait d'instinct Ä… la priÅre ; « Ä… treize ans, la
contemplation de la CÅne était déjÄ… son habituel sujet d'oraison . Comment se passaient ces heures si
délicieuses Ä… cette âme privilégiée ? Volontiers nous nous la représentons prenant sur le cSur du divin Maître
la place de l'Apôtre vierge, et, dans cette attitude abandonnée qu'elle conservera jusqu'au dernier jour,
reposer suavement. Alors commencent Ä… lui Ä™tre dévoilés les secrets de la Charité divine, dont le mystÅre doit
absorber sa vie.
Le Jardin des Oliviers l'attire aussi. Nous avons parlé d'une phase douloureuse qui suivit sa premiÅre
communion. Ses propres angoisses la font-elles songer Ä… celles du divin agonisant de Gethsémani ? Sont-
elles le principe des stations qu'elle prolonge dans la compagnie du Sauveur triste jusqu'Ä… la mort ? Quoi qu'il
en soit, toujours oublieuse d'elle-mÄ™me, la généreuse enfant cherche Ä… le consoler par une compassion
d'autant plus sincÅre qu'elle s'offre Ä… partager l'amer calice.
Tandis qu'elle remplissait ce rôle d'ange consolateur, l'âme d'Elisabeth se fortifiait. Le désir de pâtir Ä…
son tour, fruit de son amoureuse contemplation, lui devenait un secours aux heures difficiles, car chez elle les
mouvements de grâce eurent toujours un effet pratique.
C'est Ä… cet âge environ que, se sentant conviée aux noces mystiques, elle y prélude par les divines
fiançailles de son vSu de virginité. Il fut suivi de vraies grâces de recueillement : rien ne la détournait de
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Dieu. Pénétrée de sa sainte présence et tout émue des effets qu'elle en ressentait : « Quand je verrai mon
confesseur, se disait-elle, je lui demanderai ce qui se passe en moi . Le confesseur, prudent et sage,
cherchait moins Ä… l'éclairer sur son état contemplatif, qu'Ä… encourager des efforts encore nécessaires pour
achever d'ordonner sa vie au gré de Celui qui déjÄ… prenait en elle de si grandes complaisances.
En réalité, Dieu lui découvrait son habitation au dedans d'elle-mÄ™me ; c'est lÄ… qu'elle se recueillera, Ä…
l'exemple de sainte ThérÅse, Ä… l'instar de la vierge de Sienne :
Puisque je ne puis rompre avec le monde et vivre solitaire, ah ! du moins, donnez-moi la solitude du
cSur ; que je vive avec vous dans une intime union ; que rien ne puisse me distraire de vous ; que ma
vie soit une oraison continuelle.
Vous le savez bien, mon divin Maître, quand j'assiste Ä… ces fÄ™tes mondaines, ma consolation est de
me recueillir et de jouir de votre présence, je vous sens si bien en moi ! Dans ces réunions, on ne pense
guÅre Ä… vous, et il me semble que vous Ä™tes heureux qu'un cSur, mÄ™me aussi pauvre que le mien, ne
vous oublie pas.
De plus en plus la priÅre fait ses délices ; elle en est insatiable et devance l'aube, par les plus grands
froids, pour se procurer une heure d'oraison supplémentaire. La crainte de manquer le divin rendez-vous la
tient en éveil : « Que d'allumettes j'avais Ä… faire disparaître, disait-elle, pour échapper Ä… un fâcheux
interrogatoire .
Pour Elisabeth comme pour toutes les âmes sincÅres, l'oraison fut une école de sainteté.
O mon crucifix, c'est en te contemplant que je comprends toute la malice du péché. Mon Bien-Aimé,
tandis que les bourreaux perçaient vos pieds et vos mains, tandis que vous enduriez mille tortures sur
la croix, vous voyiez mes fautes sans nombre et toutes mes infidélités. Ah ! qu'elles vous faisaient
souffrir ! Mais vous saviez aussi combien je devais vous aimer ; vous saviez que, pour répondre Ä… votre
amour, pour vous consoler, vous gagner des âmes, je serais prÄ™te Ä… vous donner mille fois ma vie. O
mon Jésus ! pardon pour toute la peine que j'ai causée Ä… votre divin CSur ; pardon, ne regardez que
mon amour !...
Qui pourrait dire la douceur de ces cSur Ä… cSur pendant lesquels on ne se croit plus sur la terre, on
ne voit plus, on n'entend plus que Dieu ! Dieu qui parle Ä… l'âme, Dieu qui lui dit des choses si douces,
Dieu qui lui demande de souffrir ; Jésus enfin qui désire un peu d'amour pour le consoler... Pendant ces
entretiens divins, comme je demande Ä… Jésus sa croix ; cette croix mon soutien, mon espérance ; cette
croix que je veux partager avec le Maître qui daigne me choisir pour confidente et consolatrice de son
CSur. Par mon amour, mon attention, mes sacrifices, mes priÅres, je veux Lui faire oublier ses
douleurs ; je veux l'aimer pour tous ceux qui ne l'aiment pas.
Elle semble avoir une certaine connaissance expérimentale d'un état plus élevé décrit par sainte
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ThérÅse.
Comme j'aime la façon dont la Sainte traite ce sujet lorsqu'elle parle de la contemplation, ce degré
d'oraison dans lequel Dieu agit plus que nous, unissant notre âme si intimement Ä… Lui, que ce n'est plus
nous qui vivons, mais Lui qui vit en nous... J'ai reconnu lÄ… ces heures délicieuses que le divin Maître a
daigné m'accorder pendant cette retraite (1899), et depuis encore. Que lui rendre pour tant de
bienfaits ?... AprÅs ces petites extases oÅ‚ l'âme oublie tout et ne voit plus que son Dieu, comme
l'oraison ordinaire semble dure et pénible ; avec quelle peine il faut travailler Ä… réunir toutes ses
puissances, comme cela coûte et paraît difficile !
L'esprit d'oraison allume dans son cSur cette vive flamme d'amour qui doit si rapidement la consumer.
Sa douce influence s'exerce déjÄ… au dehors. Elisabeth « donne des marques d'une âme qui garde des trésors
du ciel ; elle commence Ä… profiter aux prochains, parce que les fleurs de ce jardin exhalent une odeur si forte
et si douce qu'elle leur fait désirer d'en approcher1 .
Vraiment attirante, son influence datait de loin.
Elle avait douze ans, écrit une de ses amies, religieuse aujourd'hui, quand nos relations
commencÅrent Ä… s'établir. DÅs leur début, je m'étais sentie gagnée par son ardeur et sa générosité ; je
pressentais qu'elle pourrait me faire beaucoup de bien. Me préparant Ä… ma premiÅre communion, et
devinant quelles avaient été ses dispositions, j'aimais Ä… parler avec elle de ce grand jour et de ses joies
intimes.
Je n'oublierai jamais, relate une autre personne, l'édification que me donna Mlle Catez au cours d'une
retraite commune. La piété vraiment touchante avec laquelle je la vis faire son chemin de la croix
m'impressionna si fort, que j'eus plus de dévotion Ä… la contempler qu'Ä… accomplir moi-mÄ™me ce saint
exercice. Quelque chose d'irrésistible me retint Ä… ma place, simplement unie Ä… cette belle âme, et
faisant miens ses sentiments pour les offrir Ä… Notre-Seigneur.
Je la retrouvai une autre fois auprÅs du confessionnal des PÅres Rédemptoristes, pendant la mission
de 1899. Les longues séances qu'il fallait faire alors, me donnÅrent le loisir de l'observer. Son
recueillement fut si profond, que pendant une heure et demie, je ne la vis pas faire un mouvement ; elle
paraissait enveloppée d'une atmosphÅre spéciale qui l'isolait de tout entourage. En l'approchant, on
pressentait que de grandes grâces lui étaient réservées, et qu'elle se donnerait Ä… Dieu avec une
générosité rare, comme l'avenir l'a prouvé.
Elle édifiait beaucoup aussi dans le chSur de chant des jeunes filles de la paroisse. Toujours prÄ™te Ä…
rendre service, elle gardait pourtant une modestie absolue, malgré son talent, dont elle ne s'autorisa jamais
1
Catéchisme de sainte ThérÅse, chap. XXXVIII.
Les Souvenirs  chapitre 4 : Vertus surnaturelles
pour la moindre critique.
L Ruvre des catéchismes sollicita le dévouement d'Elisabeth ; elle s'y donna avec bonheur, voyant en
cela une occasion de prouver son amour au divin Maître, d'exercer ce zÅle qui la dévorait. Les enfants
indisciplinées des écoles laïques, elles aussi, subissaient le charme secret de sa vertu ; les plus rebelles lui
obéissaient avec joie tant elle était aimée.
Une petite fille de quatorze ans, n'ayant pas encore fait sa premiÅre communion, lui fut confiée : de
quelle sollicitude elle l'entoura ! PriÅres et sacrifices, rien ne fut épargné.
Le bon Dieu, écrit l'enfant, m'avait ménagé cette âme d'élite pour me préparer Ä… ma premiÅre
communion et compléter mon instruction religieuse bien élémentaire. Son visage angélique me captiva
tout de suite ; ma respectueuse sympathie s'accroissait chaque fois que je me rendais auprÅs d'elle. Sa
patience et sa douceur Ä… mon égard étaient incomparables. Avec quel amour elle me parlait du grand
sacrement que j'allais recevoir ! Comme elle m'invitait Ä… prier la Sainte Vierge ! C'est bien elle qui a
déposé dans mon cSur les germes de cette dévotion filiale. Son dévouement redoubla quand arriva la
retraite préparatoire au grand jour. Je me rappelle surtout sa piété en priant avec moi et pour moi ;
j'étais frappée par son maintien si recueilli dans la rue, lorsque nous allions ensemble Ä… l'église. Je
comprends aujourd'hui combien elle se sentait le tabernacle de Jésus ; elle me disait que j'allais moi-
mÄ™me le devenir, qu'il me fallait Ä™tre bien pure, et préparer avec soin ma confession générale, dont elle
m'aida Ä… faire l'examen. Je n'avais qu'une assez courte liste de fautes Ä… m'accuser : « Ma bonne petite,
me dit Mlle Catez, vous avez le bonheur d'avoir peu de péchés ; je n'étais pas comme vous, je me
rappelle combien j'en avais trouvé . Délicate et humble façon de me dire de scruter davantage les
replis de ma conscience.
Elisabeth ne perdait pas de vue que le zÅle n'est actif et fécond que par la souffrance.
Mon Dieu, en union avec Jésus crucifié, je m'offre comme victime. Je veux la croix pour force et
pour soutien ; je veux vivre avec elle ; je la veux pour trésor, puisque Jésus l'a choisie aussi pour moi ;
je le remercie de cette marque de prédestination. O crux, ave, spes unica ! Oh ! oui, toujours tu seras
mon soutien, ma force, mon espérance. Croix sainte, trésor suprÄ™me que Jésus réserve aux privilégiés
de son CSur, je veux vivre avec toi, mourir avec toi, Ä… l'exemple de mon Epoux bien-aimé ; oui, je
veux vivre et mourir en crucifiée.
Mon Sauveur, je vous rendrai amour pour amour, sang pour sang ; vous ętes mort pour moi, eh bien !
chaque jour, j'endurerai de nouvelles souffrances chaque jour, je supporterai un nouveau martyre, et
cela pour vous que j'aime tant !...
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La passion de la souffrance croissant en elle comme terme équivalent de l'amour, la généreuse enfant
ne craignait pas de s'imposer de nombreuses mortifications. Dans la soif de ressembler au divin Maître, elle
alla jusqu'Ä… lui demander l'impression de sa couronne d'épines, et fut exaucée. Des maux de tÄ™te
inaccoutumés l'éprouvÅrent continuellement, sans qu'il parût autre chose au dehors que l'expression du
bonheur. Ce secret, longtemps et délicatement gardé, fut enfin découvert ; on lui enjoignit alors de solliciter
la fin de son épreuve, qui cessa sous la grâce de l'obéissance : elle avait duré deux ans.
Ravie d'avoir un cilice et ne pouvant le porter le jour, elle s'en revÄ™tit la nuit. Bientôt sa santé s'altéra,
sans qu'on en soupçonnât la cause. Elle confia le fait Ä… la MÅre Prieure du Carmel. qui découvrit le principe
du mal en cette pénitence intempestive, et les forces lui revinrent avec le sommeil nécessaire Ä… ses vingt ans.
De cette confidence, il ressort que l'interdiction des visites au béni monastÅre avait été levée. Se sentir
comprise, pouvoir librement s'épancher et recevoir une direction thérésienne, fut une grande consolation
pour les deux derniÅres années de son exil.
Elisabeth se joignit Ä… un petit groupe de jeunes personnes, le Carmel devint leur centre. La veille des
grandes fÄ™tes, elles se faisaient un bonheur d'aider les sSurs touriÅres Ä… parer la chapelle, comme elles
l'avaient lu de leurs devanciÅres, dans les Chroniques de l'ancien Carmel de Dijon. On se rappelle encore
l'entrain d'Elisabeth, époussetant la grille du chSur pour une cérémonie de prise d'habit, comme aussi son air
heureux dans les courts instants passés Ä… l'ombre du cher monastÅre, dont elle regardait en soupirant la porte
encore close.
C'était un vrai supplice pour moi, nous confiait-elle, d'Ä™tre emmenée pendant les vacances loin de
mon Carmel, loin de Dijon et de ses églises qui faisaient mes délices. Dans les réunions d'amies,
cependant bien chÅres Ä… mon cSur, j'éprouvais des vides douloureux ; il me semblait vivre sans vie.
Nul ne le pouvait soupçonner, tant la vaillante enfant savait prendre sur elle pour rendre heureux les
chers objets de sa tendresse. Aussi continuait-elle Ä… se faire apprécier et Ä… Ä™tre le charme de toutes les fÄ™tes.
L'été de 1899 se passa, comme d'habitude, de différents côtés ; en France, puis en Suisse dont les sites
enchanteurs ravirent Elisabeth. Facilement enthousiasmée par les merveilles de la nature, elle se perdait
volontiers dans la contemplation des Suvres du Créateur.
Jouissez bien de ces beaux panoramas, écrira-t-elle de sa petite cellule de Carmélite, la nature porte
au bon Dieu. J'aimais tant ces montagnes, elles me parlaient de Lui.
Puis Ä… sa sSur en villégiature dans les Pyrénées :
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N'est-ce pas qu'on ne se lasse pas de contempler la mer ? Te rappelles-tu la derniÅre fois que nous
l'avons vue ensemble au rocher de la Vierge, Ä… Biarritz ? Quelles bonnes heures j'ai passées lÄ… ! C'était
si beau de voir ces lames de fond envahissant les rochers ; mon âme vibrait devant ce spectacle
grandiose ; jouis-en bien, et pense qu'au Carmel, je retrouve en Dieu tous ces vastes horizons.
Avec l'hiver revinrent les soirées. Pour ne pas contrister sa mÅre, elle accepta d'accompagner sa jeune
sSur.
Voici les réunions mondaines qui commencent ; vous savez si j'aime cela ! enfin je l'offre au bon
Dieu, il me semble que rien ne peut me distraire de Lui. Lorsqu'on n'agit que pour Lui, toujours en sa
sainte présence, sous ce regard divin qui pénÅtre l'intime de l'âme, mÄ™me au milieu du monde, on peut
l'écouter dans le silence d'un cSur qui ne veut Ä™tre qu'Ä… Lui.
Le Journal d'Elisabeth s'achÅve avec sa derniÅre retraite dans le monde :
Mardi 23 janvier - Mon Dieu, depuis la retraite de l'an passé, que de grâces vous avez accordées Ä…
votre pauvre petite créature. O vous qui savez tout, vous savez au moins que je vous aime ! Je veux
pour vous devenir une sainte. Il me reste une longue année Ä… passer dans le monde ; que je la passe en
faisant beaucoup de bien ! Façonnez en moi la Carmélite, car au dedans je puis et je veux l'Ä™tre !
Mon Dieu, aidez-moi pendant cette retraite, car je veux non seulement sauver mon âme, mais je
désire vous en ramener d'autres aussi ; ce désir me consume. Ah ! vous savez, vous qui lisez en mon
cSur, que si je désire tant souffrir et tout quitter pour vous, ce n'est point pour m'éviter quelques
flammes du purgatoire, mais uniquement pour vous consoler ; ô mon Bien-Aimé ! Si vous le vouliez,
je serais prÄ™te Ä… vivre en enfer, pour que de ce gouffre infernal monte sans cesse vers vous la priÅre
d'un cSur qui vous aime ! O mon Dieu, je vous recommande toutes les âmes qui suivent cette retraite ;
si vous le désirez, je renonce pour elles Ä… toutes les consolations que vous pourriez m'y envoyer ;
seulement je suis si faible, soutenez-moi bien ! Que pendant ces jours bénis, je vive dans une union
plus complÅte avec vous ; que je ne vive qu'en ce petit coin de moi-mÄ™me oÅ‚ je vous vois, oÅ‚ je vous
sens si bien. Hélas ! souvent je vous y laisse solitaire comme vous l'étiez au désert ; c'est bien moi, je
suis si peu de chose ! Mais je vous aime, et je suis jalouse de ces grandes âmes qui vous ont tant aimé.
AprÅs l'instruction sur la mort, elle écrit :
O mon Dieu, que je meure avec vous ! Que je meure en vous emportant dans mon cSur ! Quand je
paraîtrai devant vous, mon Jésus, mon Epoux bien-aimé, que vous reconnaissiez votre épouse ; celle
qui pour vous aura tout quitté. Ah ! que vous n'ayez point honte de moi !
Que je ne vous voie pas avec un visage irrité non n'est-ce pas ; j'ai confiance ! Alors, ô mon Bien-
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Aimé, je vous verrai, je vous posséderai sans crainte de vous perdre ; je m'enivrerai de votre amour.
Cette pensée me transporte de bonheur ; mon Jésus, peut-Ä™tre est-ce bientôt que vous m'appellerez Ä…
vous ; que votre volonté soit faite, je ne veux que ce que vous voulez. Vous savez que je vous ai tout
donné, je ne veux mÄ™me plus avoir d'autres désirs que les vôtres. Cependant si je devais vous offenser
mortellement, je vous l'ai déjÄ… dit bien souvent, prenez-moi, je vous en supplie, je vous en conjure,
prenez-moi tandis que je suis toute Ä… vous.
Sur le jugement dernier :
O Maître, je le sais, je vous ai bien offensé, mais je vous aime tant ! je vais Ä… vous en toute
confiance, comme Ä… un tendre ami ; il me semble que vous agréez cette douce familiarité, aussi est-ce
avec abandon que j'attends ce moment qui m'unira pour toujours Ä… vous. Mais au ciel je ne pourrai plus
souffrir pour vous... Ah ! du moins, je l'espÅre, je pourrai travailler encore Ä… votre gloire !
Tant que je suis sur la terre, daignez permettre que je fasse un peu de bien ; je suis votre petite
victime, servez-vous de moi, faites de moi ce qu'il vous plaira ; je vous abandonne tout, corps et âme,
désirs et volonté, je vous livre tout.
Je me suis bien donnée au bon Maître, écrit-elle le dernier jour ; je me suis abandonnée Ä… Lui, ainsi
que mon désir le plus cher. Je ne veux que ce qu'Il veut ; qu'Il me prenne quand Il voudra...
AprÅs ces jours de recueillement, quand je pense qu'il faudra reprendre ma vie ordinaire, je ne puis
dire le sentiment de tristesse qui s'empare de moi. Cette souffrance, je vous l'offre, ô Maître, je suis
prętre ą tout ce que vous voulez, ą vous suivre oł bon vous semblera.
J'ai pris cette année encore les mÄ™mes résolutions : l'humilité et le renoncement ; tout est lÄ…, et je
supplie mon Jésus de m'aider Ä… les tenir fidÅlement. Oui, mon Bien-Aimé, je vous promets de
m'humilier et de me renoncer chaque fois que j'en aurai l'occasion...
J'ai vu la Prieure du Carmel pour la clôture de ma retraite. Que de bien j'ai retiré de ce long
entretien ! En quittant le parloir, j'ai été Ä… la chapelle, et, au pied de l'autel de Marie, je me suis de
nouveau consacrée Ä… ma bonne mÅre. Ah ! qu'elle me garde pure, qu'elle préserve de la moindre
souillure ce cSur qui est tout Ä… Jésus !
Maître, que ma vie soit une oraison continuelle ; que rien, rien, n'est-ce pas, ne puisse me distraire de
vous ; ni mes occupations, ni les plaisirs, ni la souffrance ; que je sois abîmée en vous, que je fasse tout
sous votre regard.
Dans cinq jours, M... va tout quitter pour vous ; je vous la donne, en vous remerciant de nous avoir
choisies toutes deux pour Ä™tre vos épouses. Je voudrais pouvoir aussi répondre Ä… votre appel ; mais
l'heure n'est pas encore venue. Sainte volonté de mon Dieu, sois toujours la mienne !... Oui, Seigneur,
que votre volonté soit faite ! MÄ™me dans le monde je puis vous appartenir ! Prenez tout mon Ä™tre,
qu'Elisabeth disparaisse, qu'il ne reste que Jésus !...


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