Les Souvenirs Chapitre 10 : Relations de famille
CHAPITRE X
Relations de famille
Premier anniversaire - La fęte des morts en 1902 - Le culte d'une mŁre - Comment Dieu rpond ą la confiance - Mes deux beaux
lis - Le mystŁre de l'adoption divine.
ct d'accents sraphiques, nous en recueillons de particuliŁrement touchants ą l'adresse de celles que
AsSur Elisabeth disait n'avoir jamais tant aimes que depuis sa conscration religieuse. Sa
correspondance avec sa famille n'offre pas moins de charmes que d'dification, en męme temps qu'elle rfute
loquemment les prjugs du monde ą l'gard de ceux qui sacrifient pour Dieu les douceurs et les joies du
foyer.
Au mois d'aot 1902, la petite novice crivait ą l'occasion du premier anniversaire de son entre au
Carmel :
ChŁre maman,
Il y a un an, je donnais au bon Dieu la meilleure des mŁres, mais le grand sacrifice n'a pu sparer nos
deux mes ; aujourd'hui plus que jamais elles n'en font qu'une, tu le sens, n'est-ce pas ? Oh ! laisse-moi
te dire que je suis heureuse, le bon Dieu a t trop bon pour moi ; c'est tout un flot qui dborde en mon
me, flot de reconnaissance et d'amour envers Lui et envers toi ; merci de m'avoir donne ą Lui. En
repassant ces heures dchirantes, je rends grces ą Celui qui nous a tant soutenues et enveloppes.
Marguerite tait radieuse l'autre jour ; depuis un an je ne l'avais pas vue comme cela : son petit cSur
est pris. Ne crois pas que celui qui est captiv par le Christ soit moins heureux. Il est si beau, mon
Fianc ! maman je l'aime passionnment, et en l'aimant je me transforme en Lui ; puis c'est si bon, Il
est toujours avec moi. Nous nous aimons tant ! Ah ! sans cela je serais encore avec toi. Je sens le
sacrifice, mais je suis divinement heureuse. Dis aux fiancs que je les enveloppe de priŁre .
Trois mois plus tard, la fęte des morts devait reporter sa mŁre vers un pass douloureux. SSur
Elisabeth offre ą son regard les radieuses clarts de sa foi.
1er novembre 1902
Ma chŁre maman,
Notre Rvrende MŁre comprend la solitude de ton cSur et me permet de venir ą toi pour te dire que
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ces jours-ci, mon me sera encore plus unie ą la tienne, et que dans la męme foi, le męme amour, nous
retrouverons les chers disparus qui nous ont prcds lą-haut ; jamais je ne les ai sentis aussi prsents.
Ils sont heureux que je sois au Carmel : le Carmel, c'est si prŁs du ciel, c'est le ciel dans la foi !
Quand tu entendras sonner l'office des morts, joins ta priŁre ą la mienne ; tout ce que je fais, tu le fais
avec moi, c'est convenu avec le bon Dieu.
C'est aujourd'hui que le divin Matre a dit : Bienheureux ceux qui pleurent parce qu'ils seront
consols1... Au ciel Il essuiera toute larme de leurs yeux2 . ChŁre maman, je t'ai vue pleurer bien
souvent ; ta vie a t seme de douleurs et de sacrifices ; mais tu le sais, plus Dieu demande, plus Il
donne.
Cet Agneau que les Bienheureux adorent dans la vision, c'est Celui-lą auquel ton Elisabeth est
fiance, et dont il lui tarde tant de devenir l'pouse. Oh ! que ma part est belle : tout ce monde divin est
ą moi ; c'est le centre oł je dois vivre, et dŁs ici-bas, suivre partout mon Agneau.
Si tu savais mon bonheur, tu dirais merci ą Celui qui m'a choisie ; coute ce qu'Il te dit: Celui qui
fait la volont de mon PŁre, est ma mŁre, mon frŁre, ma sSur3 . Pense que tu n'es pas seule, l'Ami
divin est avec toi, et ton Elisabeth avec Lui !
Nous retrouvons dans toutes ses lettres les męmes chos de surnaturelle tendresse :
Fvrier 1902
Ma chŁre Marguerite,
... Je t'envoie ma lettre ą Lunville, pensant que vous y ętes en ce moment. Je te charge de mille
choses affectueuses pour Mlle A... Dis-lui que les grilles du Carmel qui l'ont glace et lui ont paru si
sombres, me paraissent toutes dores. Ah ! si l'on pouvait soulever le rideau, de l'autre ct quel bel
horizon, c'est l'infini ! C'est pour cela qu'il grandit chaque jour. Le Carmel, ce seul ą seul avec Celui
qu'on aime, oui c'est un ciel anticip. Ne soyez pas jalouses, Lui seul sait ce que j'ai sacrifi en vous
quittant ; si son amour ne m'avait soutenue, je sens bien que je n'aurais pas pu tant je vous aime, et il
me semble que cet amour grandit chaque jour, car Il le divinise.
Je passe des jours de carnaval dlicieux, divins ; le Saint-Sacrement est expos ; je suis ą peu prŁs
toute ma journe prŁs de Lui, et Marguerite est lą avec moi, il me semble que je la garde en mon me.
Nous sommes dans l'obscurit car la grille est ouverte, et toute la lumiŁre vient de Lui, j'aime voir cette
grande grille entre nous ; Il est prisonnier pour moi, et je suis prisonniŁre pour Lui.
Puisque le bulletin de sant intresse maman, dis-lui que je vais tout ą fait bien ; je ne me douterais
pas que je suis en hiver, si je ne voyais les jolis rideaux que le bon Dieu met ą nos petites fenętres ; si
1
Mat V, 5
2
Ap VII, 14
3
Mat XII, 50
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tu savais comme le clotre est joli avec ses guirlandes de givre... !
Vis dans l'intimit avec Dieu, c'est en Lui que nous ne faisons qu'un.
Te rappelles-tu, crit-elle ą sa mŁre aux environs du 15 aot 1903, avec quel soin ton Elisabeth se
cachait pour te prparer une jolie surprise ? Cette anne, je fais aussi mes prparatifs, mes complots
avec mon divin Epoux. Il m'ouvre tous ses trsors, et c'est lą que je puise pour t'offrir un cleste
bouquet, une couronne qui brillera sur ton front pour l'ternit, et ta petite, un jour dans le ciel, se
rjouira en pensant qu'elle a aid le divin Matre ą la prparer, qu'elle l'a enrichie de beaux rubis, sang
de ton cSur et du sien !...
Je t'cris en notre petite cellule pleine de silence, pleine surtout de la prsence de Dieu. Ce soir
j'prouve encore le besoin de te dire merci, car sans ton fiat tu sais bien que je ne t'aurais pas quitte, et
Lui voulait que je te sacrifie pour son amour. Le Carmel, c'est comme le ciel, il faut se sparer de tout
pour possder Celui qui est Tout ; mais je t'aime comme on aimera dans la patrie, il ne peut plus y
avoir de sparation entre nous puisque Celui que je possŁde en moi demeure en toi, nous sommes ainsi
tout unies.
Et maintenant, ma chŁre maman, il ne me reste que le temps de t'exprimer un souhait : que Dieu, qui
m'a prise ą Lui, soit toujours plus l'Ami en lequel tu te reposes de tout ; vis en son intimit comme on
vit avec Celui qu'on aime, en un doux cSur ą cSur ; c'est le secret du bonheur de ta fille, qui
t'embrasse avec tout l'amour de son cSur de Carmlite, ce cSur qui est tout ą toi, car il est tout ą Lui,
tout ą la Trinit.
Le recueillement intrieur, l'intimit avec Dieu, les joies du divin amour taient le thŁme habituel des
pieux entretiens de sSur Elisabeth avec sa famille aux grilles du parloir. C'tait un bonheur pour l'ardente
enfant de pouvoir emporter toujours plus haut ces mes tant aimes.
Je suis ravie voyant ce que le bon Dieu fait pour maman et Marguerite , crit-elle au vnr
chanoine, Il m'a prise pour se donner davantage .
Et une autre fois :
Il me tarde de vous envoyer ma chŁre maman, vous verrez comme Dieu poursuit son Suvre en elle ;
quelquefois je pleure de bonheur et de reconnaissance ; c'est si doux d'avoir le culte de sa mŁre, de la
sentir ainsi toute ą Lui, de pouvoir lui dire toute son me et d'en ętre comprise ! Qu'il fait bon se
confier ą Dieu, vivre d'abandon pour soi et pour ceux que l'on aime !...
Le ciel rpondit ą ce total abandon en multipliant les bndictions au foyer toujours cher ą son cSur.
Les Souvenirs Chapitre 10 : Relations de famille
C'est ainsi qu'elle vit sa jeune sSur contracter une alliance conforme aux dsirs de sa foi. Elle prend occasion
de cet vnement pour exprimer ą sa mŁre les sentiments les plus dlicats ą l'endroit de son propre bonheur.
Marguerite est venue me voir avec son mari, ils ont l'air si heureux ! J'ai remerci Dieu pour eux... et
pour moi ; du ct de la terre je semble n'avoir que le sacrifice, mais c'est tout de męme moi qui ai la
meilleure part, crois-le bien ; et malgr les larmes et la douleur que cela impose au cSur d'une mŁre,
elle doit se rjouir d'avoir donn une Carmlite ą Dieu, car aprŁs le prętre, je, ne vois rien de plus saint
sur la terre ; une Carmlite, cela suppose un ętre tellement divinis ! Oh ! demande ą notre sainte MŁre
ThrŁse, que toute petite tu m'appris ą aimer, demande-lui que je sois sainte Carmlite, et rjouis-toi
d'ętre aime par ce petit cSur qui est tout au bon Dieu. Si je L'aime, c'est toi qui m'as oriente vers
Lui ; tu m'as si bien prpare ą la premiŁre rencontre, ce grand jour oł nous nous sommes tout donn
l'un ą l'autre !... Merci pour tout ce que tu as fait ; je voudrais le faire aimer, et comme toi, Lui donner
des mes.
Je confie un baiser ą mon Christ pour qu'Il aille te le porter de la part de son pouse, ta petite aime.
Novembre 1903
Le royaume de Dieu est au dedans de vous4
ChŁre Marguerite,
Quelle joie tu as faite ą mon cSur en me fętant ainsi ! Ton gentil mot m'a fait plaisir et ta belle
photographie m'a fait du bien ; sainte Elisabeth t'a tout ą fait inspire car je la dsirais justement ; elle
me recueille ; je pense que c'est nous deux qui sommes ainsi prŁs de Notre-Seigneur. C'est si vrai, qu'Il
est en nos mes et que tout le temps nous sommes avec Lui, comme Marthe et Marie. Tandis que tu
vas ą l'action, je te garde ą ses pieds ; tu le sais, quand on L'aime, les choses extrieures ne peuvent
distraire, et Marguerite est ą la fois Marthe et Marie !
Comme je t'enveloppe de priŁre, toi et le cher petit ętre qui est dją dans la pense de Dieu ! Laisse-
toi toute prendre et envahir par sa vie divine, afin de la donner au cher petit qui arrivera au monde tout
combl de bndictions.
Je vous le souhaite bien gentil, et je me rjouis du bonheur qu'il apportera avec lui ; j'en remercie
Dieu et m'associe ą votre joie du fond de ma solitude aime.
Bientt c'est l'arrive d'une petite Elisabeth qu'elle accueille par ces lignes charmantes :
Je me sens toute pntre de respect en face de ce petit temple de la Sainte Trinit ; son me
m'apparat comme un cristal qui rayonne Dieu, et si j'tais prŁs d'elle, je me mettrais ą genoux pour
4
Lc XVII, 21
Les Souvenirs Chapitre 10 : Relations de famille
adorer Celui qui y fait sa demeure... Comme j'aimerais la bercer ! mais le bon Dieu m'a appele sur la
sainte montagne afin que je sois son ange, que je l'enveloppe de priŁre, et tout le reste, je lui en fais
bien joyeusement le sacrifice pour elle. Combien je suis heureuse en pensant que tu es mŁre ! Je te
confie toi et ton ange ą Celui qui est tout amour ; avec vous je L'adore, et sur son CSur je vous
treins .
Mars 1904
Que Dieu est bon !
ChŁre Grand'mŁre,
Je suis mue en te donnant ce nom si doux, et tout heureuse que la chŁre petite s'appelle Elisabeth. Il
me semble que le bon Dieu me la donne pour que je sois son ange, et je l'adopte tout ą fait. J'ai tant
pri pour elle avant sa naissance ! et dsormais ma priŁre et mes sacrifices seront les deux ailes ą
l'ombre desquelles je l'abriterai.
J'avais offert une neuvaine de messes afin de la mettre sous le prcieux Sang ; la neuvaine se
terminait ce matin, fęte des cinq plaies du Sauveur ; et le petit ange nous vient de la blessure de son
cSur, n'est-ce pas touchant ?
Fais-moi savoir le jour du baptęme pour que j'accompagne ma petite niŁce aime aux fonts
baptismaux, tandis que le Saint-Esprit descendra dans son me. Ta Carmlite et aim te voir, mais le
sacrifice est si bon, surtout celui du cSur ! Tu as donn ton Elisabeth ą Dieu, Il t'en envoie une autre, et
toutes deux, nous rivaliserons ą qui t'aimera le plus...
20 juillet 1904
Le regard de Dieu est sur elle, son amour
l'environne comme d'un rempart.
ChŁre petite sSur, cho de mon me , c'est ainsi que ThrŁse de l'Enfant Jsus nommait une de
ses sSurs, ce soir ą la veille de ta fęte, j'ai plaisir ą te donner ce doux nom.
Ma fleur chrie, Marguerite, je demande ą Dieu qu'Il comble tous les dsirs de ton large cSur
d'or ; qu'il darde sur toi les feux de son amour, afin que sous l'action de ses divins rayons tu croisses,
t'panouisses, et qu'ą l'ombre de tes grands ptales blancs une autre petite fleur, bien chŁre ą mon
cSur, puisse entr'ouvrir sa tendre corolle.
Qu'elle est jolie ta petite Sabeth ! hier, dans les bras de sa radieuse grand'mŁre, elle m'a fait toutes
sortes de grces. Elle tait si gentille avec ses yeux ferms et ses mains croises sur son cSur. J'ai fait
sourire notre Rvrende MŁre en lui disant que ma niŁce tait une adorante ; c'est son office :
Maison de Dieu ...
Les Souvenirs Chapitre 10 : Relations de famille
Aot 1904
Dieu est amour
Ma petite sSur chrie, oui je te trouve aux pieds de Jsus ; plus que cela, je ne te quitte pas, je m'unis
ą la joie de son CSur de trouver une Marguerite en laquelle Il puisse reposer. Sois son paradis en ce
pays oł Il est si peu connu, si peu aim ; ouvre ton cSur tout au large pour l'hospitaliser, et lą, dans ta
petite cellule intrieure, aime, Marguerite. Il a soif d'amour, tenons-Lui compagnie... Je suis contente
de toi, et le Matre aime sa fleur.
Il me semble bien loin le temps oł nous grimpions sur ces montagnes ; je me rappelle la jolie vue de
notre chambre. Ne trouves-tu pas que cette nature parle de Dieu ; l'me a besoin de silence pour adorer.
Jouis de cette belle Suisse et de la douce intimit avec notre chŁre maman. Je comprends ton sacrifice
de sentir Georges loin de vous ; c'est la loi ici-bas, le sacrifice ą ct de la joie ; le bon Dieu veut nous
rappeler que nous ne sommes pas arrivs au terme du bonheur ; mais nous y sommes orients, et Lui-
męme veut nous conduire, nous porter en ses bras. Lą-haut, petite sSur, Il comblera tous les vides ; en
attendant vivons dans le ciel de notre me, il y fait dją si bon !...
Pques 1904
Alleluia
ChŁre Marguerite,
Nous avons chant 1'Alleluia, et je viens te dire combien je partage tes joies maternelles, je suis si
contente d'ętre encore une fois tante, et surtout d'une petite fille, car il me semble que l'union qui
existait entre nous va se perptuer ą ton doux foyer, et je me rjouis que Sabeth ait une Odette, comme
tante Elisabeth avait une Marguerite. Sabeth est ne le jour de la fęte des cinq plaies de Jsus, et voici
qu'Odette arrive le jour oł le Matre a t vendu pour racheter sa petite me, n'est-ce pas touchant ?
Pendant cette grande semaine, j'ai emport ton me partout avec la mienne, surtout pendant la nuit
du Jeudi Saint ; et puisque tu ne pouvais aller ą Lui, je Lui ai dit de venir ą toi. Dans le silence de
Les Souvenirs Chapitre 10 : Relations de famille
l'oraison, je disais tout bas ą ma Guite ces paroles que le PŁre Lacordaire adressait ą Madeleine, alors
qu'elle cherchait son Matre au matin de la Rsurrection : Ne le demandez plus ą personne sur la
terre, ą personne dans le ciel, car Lui, c'est votre me, et votre me, c'est Lui !
O comme Il bnit ton petit nid, comme Il t'aime en te confiant ces deux petites mes qu'Il a lues
en Lui avant la cration, afin qu'elles soient saintes et sans tache en sa prsence dans la charit !5
C'est toi qui dois les orienter vers Lui et les garder toutes siennes.
Je te charge de dire ą Georges le retentissement qui se fait en mon cSur de toutes vos joies, pour
lesquelles je rends grces au PŁre de qui vient tout don parfait6.
A Dieu, je me recueille avec toi prŁs des petites ; chacune, ą son ct, a un bel ange qui voit la Face
de Dieu ; demandons-leur de nous emporter et fixer en l'immuable amour.
J'envoie ą Odette une mdaille qui a touch l'Enfant Jsus miraculeux de Beaune ; elle est en cuivre,
car je suis une pauvre Carmlite ; tu pourras la mettre ą son berceau, afin que Celui qui aime tant les
petits la bnisse et la protŁge.
Plus tard, c'est ą Elisabeth et ą Odette elles-męmes qu'elle s'adresse : ravissante faon de rjouir et de
faire vibrer l'me de leur mŁre, fidŁle cho de la sienne.
Mes chŁres petites niŁces, mes deux beaux lis tout blancs, tout purs dont le calice renferme Jsus ; si
vous saviez comme je prie pour vous, afin que son ombre vous couvre et vous garde de tout mal ! A
qui vous contemple dans les bras de votre maman, vous semblez bien petites ; mais votre tante qui
vous regarde aux clarts de la foi, voit en vous un caractŁre de grandeur infinie ; car Dieu de toute
ternit vous portait en sa pense. Il vous prdestinait ą ętre conformes ą l'image de son Fils Jsus7 et
par le baptęme, Il vous a revętues de Lui, vous faisant ainsi ses enfants, en męme temps que son
temple vivant.
O chers petits sanctuaires de l'amour, en voyant la splendeur qui rayonne en vous et qui n'est
cependant qu'une aurore, je me tais et j'adore Celui qui cr de telles merveilles !
Aot 1905
Celui qui s'unit au Seigneur devient un męme esprit avec Lui8
Ma chŁre petite sSur, c'est aujourd'hui dimanche, jour bni entre tous, puisqu'il s'coule auprŁs du
Saint-Sacrement expos ą l'oratoire, sauf cependant le temps oł je suis au Tour. J'en profite pour venir
causer avec toi, sous le regard de Celui que nous aimons. Je prends une grande feuille, car lorsque je
suis avec ma Guite, il vient tant de choses sous ma plume !
5
Ep I, 4
6
Jc I, 17
7
Rm VIII, 29
8
1 Co VI, 17
Les Souvenirs Chapitre 10 : Relations de famille
Je viens de lire dans saint Paul des choses splendides sur le mystŁre de l'adoption divine ;
naturellement j'ai pens ą toi. Tu es mŁre, tu sais quelles profondeurs d'amour Dieu a mises en ton
cSur pour tes enfants ; tu peux saisir la grandeur de ce mystŁre : enfant de Dieu, Marguerite, est-ce que
cela ne te fait pas tressaillir ? Ecoute parler mon cher saint Paul Dieu nous a lus en Lui avant la
cration, Il nous ą prdestins ą l'adoption des enfants pour faire clater la gloire de sa grce9 .
C'est-ą-dire qu'en sa toute-puissance, Il semble ne pouvoir rien faire de plus grand. Ecoute encore :
Si nous sommes enfants, nous sommes aussi hritiers10 . Et quel est cet hritage ? Dieu nous a
rendus dignes d'avoir part ą l'hritage des saints dans la lumiŁre11 . Et puis, comme pour nous dire
que cela n'est pas un avenir lointain, l'Aptre ajoute : Vous n'ętes donc plus des htes ou des
trangers, mais vous ętes de la cit des saints et de la maison de Dieu12 . O Marguerite, ce ciel, il est
au centre de notre me ; comme tu le verras en saint Jean de la Croix lorsque nous sommes au centre le
plus profond, nous sommes en Dieu. N'est-ce pas que c'est simple, que c'est consolant ! A travers tout,
parmi tes sollicitudes maternelles, tu peux te retirer en cette solitude pour te livrer ą l'Esprit-Saint afin
qu'Il te transforme en Dieu, qu'Il imprime en ton me l'image de sa beaut divine, afin que le PŁre en
se penchant sur toi ne voie plus que son Christ, et qu'Il puisse dire : Celle-ci est ma fille bien-aime
en qui j'ai mis mes complaisances . Petite sSur, au ciel je me rjouirai en voyant mon Christ si beau
dans ton me, je ne serai pas jalouse ; mais avec une fiert de mŁre, je Lui dirai : C'est moi, pauvre
misrable, qui l'ai enfante ą votre vie . Saint Paul parlait ainsi aux siens, j'ai bien de la prtention de
vouloir l'imiter, qu'en dis-tu ?
En attendant, croyons ą l'amour avec saint Jean, et puisque nous le possdons en nous,
qu'importent les nuits qui peuvent obscurcir notre ciel ? Si Jsus semble dormir, reposons-nous prŁs de
Lui, soyons bien calmes et silencieuses, ne le rveillons pas, mais attendons dans la foi. Lorsque
Sabeth et Odette sont dans les bras de leur chŁre maman, je crois qu'elles s'inquiŁtent peu s'il fait du
soleil ou s'il pleut ; imitons ces chŁres petites, vivons dans les bras du bon Dieu avec la męme
simplicit.
Ton grand parc m'attire, c'est si bon la solitude, je crois que tu sais l'apprcier. Veux-tu faire avec moi
une retraite d'un mois jusqu'au 14 septembre ? Notre MŁre me donne ce petit cong du Tour, je n'aurai
plus ą parler ni ą penser ; je vais m'ensevelir au fond de mon me, c'est-ą-dire en Dieu. Veux-tu me
suivre en ce mouvement tout simple ?
Quand tu seras distraite par tes nombreux devoirs, je tcherai de compenser, et, si tu veux, pour te
ressaisir, ą chaque heure tu entreras au centre de ton me, lą oł demeure l'Hte divin ; tu pourras
penser ą la belle parole que je t'ai dite : Vos membres sont le temple de l'Esprit-Saint qui habite en
9
Eph I, 4, 5, 6
10
Gal IV, 7
11
Col I, 12
12
Eph II, 19
Les Souvenirs Chapitre 10 : Relations de famille
vous13 . Et ą celle-ci qui est du Matre : Demeurez en moi et moi en vous14 . Il est dit de sainte
Catherine de Sienne qu'elle vivait toujours en cellule, quoique au milieu du monde, car elle vivait en
cette habitation intrieure oł Marguerite sait vivre aussi...
13
1 Cor III, 16
14
Jn XV, 4
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