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En vue de la construction de 1’Europe, nous ne devons pas hesiter a faire tout ce qui est possible pour que les institutions europeennes evoluent vers un veritable gouvernement euro-peen. Le seul moyen pour cela, c’est que les membres des Commissions, les membres de la I-Iaute Autorite, soient des elus en contact avec le suffrage universel, en contact avec les elec-teurs, des membres de 1’Assemblee vivant dans TAssemblee, comprenant ses preoccupations et les partageant. Ainsi, ils formeront un element de la politique europeenne. Si nous les excluons de notre Assemblee, nous les rejetons dans la categorie des fonctionnaires europeens.
C’est la une des options politiques les plus graves que prevoit le projet de convention. M. Maurice Faure, ce matin, en rapporteur fidele, pas tres convaincu et pas tres convaincant, a expose le point de vue de la commission sur ce point, et il l*a fait de telle faęon que je suis certain d’avoir son appui lorsque 1’amendement viendra en discussion en seance publique, et je m’en rejouis.
Monsieur le President, qu’attendons-nous des elections europeennes ? La premiere chose que nous en attendons, c’est 1’appui de 1’opinion pu-blique. Oh ! je sais qu’il ne sera pas facile de faire une campagne electorale sur les problemes europeens. II est beaucoup plus facile de faire u.ne campagne electorale sur les problemes com-munaux, les electeurs voient alors les problemes qui se posent, tandis que, sur le plan europeen, les choses paraissent extremement lointaines, pour ne pas dire stratospheriques par rapport a l'homme de la rue.
L’election reste la seule methode capable d’in-teresser vraiment les masses aux problemes europeens. L’obligation d’exposer les problemes en termes simples, en termes facilement acces-sibles aux masses, la confrontation des points de vue, les controverses de la lutte ólectorale, feront des electeurs europeens de nouveaux Christophe Colomb. Ils ne decouvriront pas l’Amerique, mais ils decouvriront 1’Europe.
La premiere campagne electorale sera certaine-ment tres difficile a organiser, peut-ćtre meme plus educative que reellement politique.
Le sccond objectif a atteindre par les elections europeennes est le renforcement de 1'auto-rite de 1’Assemblee.
Ceci m’amene a aborder, apres tant d’autres orateurs, le problemu des pouvoirs. Avant de proceder aux elections, dit-on, accroissons les pouvoirs de TAssemblee ! Suggestion facile et qui, parfois, s’entend dans la bouche de ceux qui ne desirent accroitre ni les pouvoirs de TAssemblee, ni les pouvoirs des institutions europeennes. Cela me parait le type de Tinutile prealable. •
M. Rubinacci a fait tout a 1’hcure allusion & 1’oeuf et a la poule. Par quoi faut-il commencer ?
II faut commencer par appliquer les traites avant de songer a les modifier : or, augmenter les pouvoirs de 1’Assemblee, c’est modifier les traites; proceder aux elections europeennes, c’est appliquer les traites.
II est plus simple d'appliquer les traites que de les modifier et le resultat est evident: les elections creeront des pouvoirs. Ils naitront, ils viendront par la coutume et par l’usage, par Tautorite morale de 1’Assemblee. Tout le XIXe siecle et la tradition britannique sont la pour nous le demontrer. M. Dehousse y a d’ailleurs fait allusion hier.
Une assemblee appuyee par le suffrage uni-versel a necessairement et evidemment plus de pouvoirs qu’une assemblee cooptee, une autorite autre qu’une assemblee deleguee. II n’est pas besoin de traite pour donner des pouvoirs a une assemblee elue. Elle prend automatique-ment des pouvoirs, car le suffrage universel donnę 1’autorite pour prendre les pouvoirs et meme, s’il faut modifier les traites, une assemblee elue a une autre autorite morale pour de-mander aux gouvernements et aux parlements nationaux de proceder a ces modifications que notre Assemblee qui ne tient ses pouvoirs que des Parlements nationaux auxquels elle veut demander quelque chose.
Nous sommes actuellement demandeurs a nos mandants, tandis qu’une assemblee elue sera une assemblee independante des parlements natio-naux, pouvant plus aisement se retourner vis-a-vis d’eux.
D’aiHeurs, faisons attention a 1’objection des pouvoirs. Je vous le demande, est-ce que notre Assemblee a aussi peu de pouvoirs que nous le croyons ? Que fait notre Assemblee de son droit de censure ? Que fait meme notre Assemblee de son droit de contróle ? Que fait notre Assemblee du veritable droit d’interpellation qu’elle possede et que reprennent les articles 28, 29 et 44 de notre Reglement ?
Ne croyez-vous pas qu’un ordre du jour — M. van Dijk l’a dit tout a 1’heure — clair, precis,
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