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•siócle, par le baron de Tott, quand il dśnonęait les voyageurs qui « ont accrśditś une foule d’absurditśs, sans avoir d’autre tort que de ne s’etre pas assez mśfiśs d,eux-meme». Dans un ouyrage rścent, R. Clśment attribue la faiblesse des relations de yoyage au fait que les «voyageurs visitent tous les memes monuments, s’intśressent aux memes curiosites et leurs rścits se ressemblent, meme quand ils ne se copient pas ... Sen-sibles au pittoresque de la vie musulmane, ils nous dścrivent l’animation des rues...,les grandes, fetes..., plusieurs, aussi, moins superficiels, s’intśressent & la vie meme des Musulmans, nous expliquent les cśrćmo-nies... Mais ce n’est 1& qu’une exception»24. Meme des yoyageurs comme Tavernier 25 ou Thevenot26 śtaient frappśs surtout par la reli-giositś superstitieuse des Turcs et par leur manque de culture europśenne.
Pour rencontrer un observateur librę des prejugśs de ses prśdś-cesseurs et de ses contemporains, possśdant une curiositś scientifique impartiale et un gout authentique pour les śtudes orientales, capable •d’observer la culture ottomane avec les yeux d’un savant, il faut attendre Antoine Galland. Celui-ci etait venu & Constantinople pour y apprendre les langues orientales, y compris le turc, et acheter des livres, activitśs qui lui donnent l’occasion — ainsi que nous le yerrons — de frśquenter des intellectuels raffinćs et des ceuvres importantes. Ce qui s’impose •dans son Journal (pour les annśes 1672—1673) c’est l’objectivitś de ses jugements et son dćsir sincere de connaitre 1’Islam par tous les moyens que lui offrait de ce temps la capitale ottomane •, d’ou ses remarques .sur l’śrudition des savants turcs, la valeur des ścrits qui nourrissent leurs prśoccupations intellectuelles •, d’ou son assiduitś & analyser un monde qui, dans ses aspects profonds, commenęait ^ peine alors & s’ouvrir aux ■ćrudits europóens 27.
Avec son habituelle clairvoyance pour les affaires du royaume et la mśticulositś qu’il apportait & la rśalisation de ses projets, Colbert avait donnś a la politique franęaise dans la Mśditerranśe Orientale — outre la rśforme des consulats, dans le secteur diplomatique, et l’encoura-gement de la Compagnie du Levant, dans le domaine ćconomique — une orientation scientifique : 12 «jeunes de langue» avaient ćtś envoyśs ^ Constantinople pour y apprendre les langues orientales 28, cependant
Idem, Aufsatze und Abhandlungen zur Geschichte Sudosteuropas und der Leoante, voI. II, Munich, 1966, pp. 51 sqq.
24 Haoul CIćment, Les Franęais d’Egypte auz XVII* et XVIII* siłcles, Le Caire, 1960, p. 31.
25 Les six uoyages de Jean-Baptistc Tauernier (...) en Turquie, en Perse et auz Indesf pendant Vespace de ąuarante ans, voI. I — II, Paris, 1676 — 1679.
26 Voyagcs de M. de Theuenot au Leuant (1655—1666), vol. I—II, Paris, 1664. Yoir 'surtout voI. I, pp. 250 sqq.
27 Cf. Mohammed Abdel-Halim, Antoine Gallandf sa oie et son oeuore, Paris, 1964.
2# II s*agit des c enfants de langues de France », au sujct desquels v. A. Galland, Journal.. .y voI. I, p. 163 et n. 3. Recrutćs & PEcole des langues orientales de Paris, entre-