de la próenir, et il se demandait si cettc recette reussirait micux a l’cxterieur. il faisait remarquer que pour peu que toutes les nations imitassent le systóme militaire obligatoire introduit par la Prusse, 1'Europe compterait pr£s de vingt-cinq millions de soldals, c'est-k-dire toute sa population virile de vingt a cinquantc ans; et dans les arsenaux des fusils de tous les systemcs par dizaines de millions et des canons par dizaines de mille.
Deux fois par an, ajoutait-il, chaque pays sera transforme en un vaste camp, et ony fera la petitc guerrc k qui mieux mieui. Scra-ce un moyen assure de prevenir la grandę ?
Puis a 1’idće dc lepomantable carnage qui doit s'ensuivre, il s ecrie que pour le concevoir il faul se rcpresenter la Mort armće non plus d’une faux, mais d’une moissonneuse a va-peur, qui couvrira le sol de 1'Europe dc monceaux de cadavres.
Je me hktc, messieurs,de detouraer vos rcgards de cette epouvantable perspective, mais je dois les arreter un moment sur le spectacle de 1'Europe contrainte par la forcc de cir-constances qu’elle ne peut maitriser, de se jeter a la fois dans le double et aventureux essai du suffrage universel et du senice militaire personnel obligatoire , sans pouvoir s’abuser sur leur perilleuse coexistcnce, et ne sachant commenl elle sortira de cettc effrayante situation, grosse de tant d’inconnu oii d’un cóte on vient donner le fusil au vote et dc 1'autrc le vote au fusil.
Mais plus cet horizon est charge de nuages, plus il importe de faire, au milieu de ce vastc deploieinent de la force materielle, unc part au inoins a 1’intenention de la force morale et k 1'idee de la justice arbitrale. C’est la soupape de surete dont, au milieu d'un pareil chaos, il ne faul pas s’exagćrer la garantie; mais dont il ne faul pas non plus s’interdire 1’esperance.
Vous voyez, messieurs, que deux voies bien diffćrentes sont ouvertes en ce moment au monde civilisć.
L’une est celle de 1'arbilrage International dont 1'Angle-terre et les Etats-Unis font luire a ses yeux 1’heureuse es-perance, et la confiance que cette voie le conduirait au moyen le plus efficace cTecarter les calamitćs de la guerre et d’af-fermir les bienfaits de la paix. C'est dans cette voic que soflre de plus au XIX* sifecle la magnifiąne perspective d ajouter a la gloire d’avoir consacre le respect de la libertó de 1’homme par 1’abolition de l’esclavage, cellc de consacrer de plus l’in-violabilite de la vie bumaine , hors du cas de legitime defense, par la substitulion des equitables decisions de la justice arbitrale aux sanglantes Solutions de la violencc et du basard.
L’autre est celle du service militaire personnel obligatoire dont la Prusse, devenue Pempire allemand, impose 1'imitation a tant dc nations qui ne peuvent sauvegarder autrement l’equilibre europeen. De la une pcrspectire pleine d’inquićtudes dans le present, pleine de perils dans l’avenir, car au lieu de la permanence de 1’etat de paix,c’e$t la permanencc de 1’etat de guerre.
On se demande avec anxiete !aquelle de ces deux voies doit suivre definitivemenl le monde civilisć. J’esp£rc que ce sera celle de 1’arbitrage.
Je l’esp£re, parce que je crois a la Providence, parce que, ainsi que la dit 1’homme illustre qui consacre tant dc genie et de devouementa cicatriser les plaies de notre patrie, il n’y a que les nations barbares ou tout le monde est soldat; parce que le systfcme prussien est ainsi un retour h la barbarie, et qu’il ne saurait suivre a ce titre la inarche provi-dentiellc de Thumanitó.
II me semble que c’esl le doigt de Dieu qui a youIu montrer k 1’humanitć la voie du salut en inspirant a IWngle-terre et aux Ćtats-Unis cette noble ainbition que ces deux grands peuples ćprouvent en ce moment de determiner par leur exemple les nations civilisćes k 1’adoption de 1’arbitrage international. Puissent-elles donc se mettre rćsolument a PceuYre! Puissent-elles saisir 1’occasion que leur est oflerte d’accomplir leur glorieuse mission civitisatrice. Ricn ne peut emp&cher les gourerncments de ces deux peuples, du moment ou ils yeulcnt desormais recourir k 1'arbitrage pour le r£-glement des conflits internationaux, d’en consacrer le principe par un traite entre eux et d’etablir ainsi a la fois le spe-cimen et 1’autorite du prćcedent dans un protocole ou ils