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h telle de la paix. Ii se prćsente sans doute trop souvent dans la vie des peuples quelque noeud gordien; mais il ne faul jamais souhaiter que ce soit le glaive de la guerre qui vienne le trancher; car 1’histoire nous en-seigne quedans 1’ordre providentiel la justice seule, un jour ou 1’autre, doit elre appelee a le denouer, el quela seulement se rencontre la bonne et durable solulion.
Entre les deux doctrines qui se personnifient dans Kant el dans Hćgel sur le mai de la guerre, le projet finał n’a pas cru devoir se prononcer. Loin de moi du reste la pensee (Passimilei* la doctrine de llegel a celle de Machiavel. lis partent a peu pres du mgme principe, le droitdu plus fort; mais ils sont loin de suivre la menie voie et d’aboutir aux mćmes consćquences. La conscience des disciples d’Hegel se revolterait avec raison qu’on imputat & leur ćcole de conseiller & Home de s’enricbir des ruines d’Albes. II s'agit uniquement ici de la ques-tion de savoir si, comme le pense Kant, la guerre est un mai en soi dont on doit s’elTorcer de prśsener Hiu-manite, ou si, comme Pa professć Hegel, c’est la loi supremę des nations. II eul donc ete desirable de con-naitre vers Taquelle de ces deux doctrines a inclinó le projet finał de la Conference, et comment doit s’inter-preter par consćquent le sileoce qu'il a gardę sur le recours a 1'arbitragc.
Si le projet partageait, en eflet, la doctrine de Hćgel, son silence sur Parbitrage s’expliquerait par le peu d’importance qu’il a du y attacher, puisque la guerre ne serait pas pour lui un mai a prevenir, mais seulement une lutte dont il convenait de moderer les exces sans chercher £ en empecher 1’usage.
Les genereuses et eloąuentes paroles qu\a souvent prononcćes 1’ćminent president de la Conferenee pour en diriger et ćclairer les deliberations, me donnę la conviction que ce n’est pas vers la doctrine de Hegel qu’il inclinait, et je suis convaincu que telle est aussi 1’opinion qui prćvalail parmi les dćlegućs de la Con-ference; mais il est bien regrettable que la condarnnalion de la guerre comme un mai en soi, comme un fleau dont on devait s’efforcer de delivrer autant que possible rbumanite par le recours ii 1’arbitrage, n’aitoblenu une dćclaration explicite dans aucun des cinquante-six articles du projet finał.
L’opinion publique a ete d’autant plus surprise de 1’abstenlion de la Conferenee a se prononcer sur 1’arbitrage que celte question de la mediation el de 1’arbitrage etait le trait d’union qui devait naturellement ratlacher la Conferenee de Bruxelles dc 1874 au memorable pro-tocole du trailć de Paris de 1856. Elle s’est demandee avec inquietude si cette omission etait une improhation de la voie civilisatrice dans laquelle la diplomatie de 1’Europe etait entree en 1856.
J’avais dit, d^s le debut, et avant móme la reunion de la Confćrence de Bruxelles, qu’une abstention par cette Conferenee dc s’occuperdcl’arbitrage serait regrettable, parce que le protocole k cet śgard du 14 avril 1856 n’avail pas seulement reuni la ratification de tous les gouvernements, mais qu’il obtenait de plus celle des peuples, qui se produisait officiellement et Ićgalement par l’exercice de l’initiative parlementaire. J ajoutais qu’apres la molion de M. Henry Richard, en faveur du principe de 1’arbitrage, volće par la Chambre des Com-