73
Rapport de la Commission a PAsscmblće genćrale
la notion de competence generale82 : Ic comportcment d’un organc ne serait internationalement attribuable k PEtat que si cet organc ćtait demeure, en agissant, dans le « cadre gćnćral de sa compćtcnce » ou dans le « cadre gćnćral de ses fonctions ». De Pavis de la Commission, une telle notion est non seulcment vague, mais cncore inexacte. Ou bien 1’organe est competent d’apres le systeme juridique auquel il appartient, ou bien il ne l’est pas : il n’cxisle pas dc compćtcnce « genćrale » ou « genć-riquc », par opposition k une competence « specifique ». Et il serait encore plus faux d’imagincr une «compć-tence gćnćrale » qui serait attribućc par le droit inter-national la oii le droit internę la nierait. II n’y a donc pas lieu d’accepter une limitation ainsi formulće.
23) D’autres internationalistes et d’autres projets de codification ont eu rccours au critere de Vemploi des moyens de la fonctionM. Ce critere a mćme etć parfois mentionnć dans des prises de position gouvemcmcn-talcs84 et dans des scntences internationales 8S. Si on l’appliquait, le comportement de 1’organe ayant agi ćs qualitćs, mais contraijemcnt aux prescriptions du droit interne concernant son activite, ne serait intcrnationale-ment attribuable a 1’Etat que si 1’organe s’ćtait scrvi des moyens mis k sa disposition par PEtat pour 1’accom-plissement de ses fonctions. II semble, toutefois, quc Papplication de ce critćre risqucrait dc mener a des conclusions inacceptables. Ainsi PEtat qui aurait a endosser la responsabilitć du fait d’un policier qui, violant les instructions reęues, tuerait un etranger confie a sa gardę cn se scrvant dc Parmę dont PEtat Pa dotć ćchapperait a la responsabilitć si le meme fait ćtait commis en utilisant a cette fin Parmę d’un particulier, ou si le meme policier laissait exćcuter le meurtre par ce particulier86.
24) Toujours afin de limiter la portće du principe, plu-sicurs internationalistes et des projets de codification ont eu recours a la notion &'incompetence manifeste87 ou, a l’inverse, a celle de competence apparente 8fl. On a vu que
81 L’articlc 2 du projet ćlaborć en 1927 par K. Strupp indiquait quc la responsabilitć de PKtat n'ćtait ni diminuee ni degagee par le fait quc 1’organc avait « excćdć son autorite », pour autant que ledit organc avait cu « le pouvoir gćnćral d'entreprendre 1’actc ou Paction cn qucstion ». D'apres Particie ler du projet ćtabli par A. Roth en 1932, 1’Etat ćtait considerć comme responsable des actes «commis par toutes Ies personnes physiques ou morales auxquelles il a confie I'excrcicc de fonctions publiques, pour autant que lesdits actes entrent dans le cadre gćnćral dc leur compćtcnce». Suivant le commentairc de Particie VII, al. a, du projet dc 1929 de la Harvard Law School, la formule utilisec dans cetteclause devait ćtre entcnduc dans le sens d’attribucr a PEtat la responsabilitć du prćjudicc causć a un etranger par Pun de ses hauts fonctionnaires pour autant que celui-ci ait agi « dans le cadre gćnćral de son emploi ou de ses fonctions » (v. IIarvard Law School, Research in International Law, Cambridge [Mass.], 1929, p. 162 et 163). Quant aux auteurs d’ou-vragcs scicntifiqucs, on pcut rappelcr que Starkę (loc. cif., p. 110) parle de « competence generale » et Ch. Fcnwick {International Law, 38 ćd. rev. et augm., New York, Appleton-Ccntury-Crofts, 1948, p. 291) dc «cadre gćnćral de la compćtcnce». Dahm (op. cit., p. 182) mentionnć les actes d’organes ćtatiques qui sont contraircs au droit internę, mais qui « rentrent quand mćmc dans la sphćrc genćrale dc la compćtcnce attribućc k Porgane » ou qui sont objec-tivcment cn rapport avec Pactivitć de service dc !’organe.
83 La formule « cn se couvrant dc leur qualitć d’organes dc PEtat et en se servant des moyens mis, a cc titre, a leur disposition » ćtait cellc qui avait etć rctcnuc pour le troisieme alinća de la regle I du projet adoptć en 1927 par PInstitut de droit international. Le para-graphe 4 de Particie lcr du projet ćtabli cn 1930 par PAssociation allemande de droit international utilisait les termes « pour autant que cette autorite agit ćs qualitćs et qu’clle utilisc Papparcil admi-nistratif officiclw. Quclquc peu difTerente est la formule proposćc par dc Visscher (loc. cit., p. 253). Pour Pintemationalistc belge, la responsabilitć de PEtat « est genćralemcnt admisc, tout au inoins [... J lorsque Pacte dommageable a etć commis a la faveur soit de 1'auto-ritć soit dc la force matćriclle quc Pagent coupable tient de ses fonctions». D’autres internationalistes, comme Reuter {loc. cit., p. 88) adhćrcnt a cette formule.
84 Les rćponses de la Belgique et de la Finlande a la question posee au point V, n° 2, b, dc la demandc d’informations du Comitć prćparatoirc dc la Confćrcnce de 1930 s'inspiraicnt claircment dc ce modćlc. L.a premićrc ćtait libellćc ainsi :
« La responsabilitć de PEtat cxistc si le fonctionnairc s’cst servi
des moyens mis k sa disposition cn sa qualitć d'organc dc PEtat.» (SDN, Rases de discussion... [op. cit.], p. 75 et 76.)
85 Dans la dćcision rclalive a PAffairc Caire, mcntionnćc supra au paragraphc 14, on indiquait que Paction des dcux officicrs incompetcnts d’aprcs le droit intemc avait engagć la responsabilitć dc PEtat parce qu’ils s’etaient « couvcrts de leur qualitć d’officiers et scrvis des moyens mis, a ce titre, k leur disposition ». On ajoutait que « pour pouvoir admettre cette responsabilitć [...] de PEtat pour les actes commis par ses fonctionnaires ou organes cn dehors des limites dc leur competence, il faut qu’ils aient agi au moins appa-remment comme des fonctionnaires ou organes compćtcnts ou quc, cn agissant, ils aient usć de pouvoirs ou de moyens propres k leur qualite officicllc ».
84 li est k remarqucr qu’il n’est pas clair si, dans ccrtaines des prises dc position mcntionnćes aux notes ci-dcssus, la refćrcnce a la notion d'emploi des moyens de la fonction doit servir a ćtablir une distinction dans !c cadre des comportemcnts que les organes de PEtat ont adoptćs cn qualitć d'organes, ou bien k distinguer les comporte-ments quc les organes ont adoptćs dans Pcxercice de Ieurs fonctions d’organcs par rapport aux comportemcnts qu’ils ont adoptćs a titre purement prive et sans rapport avcc leur appartcnancc i Papparcil de PEtat. Dc Pavis dc la Commission, en tout cas, on ne saurait se scrvir dc la notion d'emploi des moyens de la fonction pas nieme k cette deuxićmc fin. D’une part, Pemploi des moyens de la fonction est ccrtcs un indicc, mais un indicc insuffisant du fait que Porgane a agi en qualite officiellc. Que Pon pense au cas d'un policier qui, cn dehors du servicc, a la suitę d’un litigc pcrsonncl qu’il a cu avcc un etranger, tuc cet ćtranger cn se scrvant de Parnie dont il est dotć; le fait reste quand mćmc une action privee du policier. D’autre part, le fait que Porgane n’ait pas employć les moyens dc la fonction ne constituc pas une prcuve suffisantc pour affirmer quc Porganc a agi en qualitć dc simplc particulier. Dans le cas ou un organc omet d’ac-complir une action a laquelle il ćtait tenu (par exemple, omet de protćger la vic d’un chef d’Etat etranger cn visitc officiclle dans le pays), il n’cmploie ćvidemmcnt pas les moyens dc la fonction mais son comportement passif a quand mćmc trait a son activitć officicllc.
,ł Comme on Pa indiquć, Particie VIII adoptć cn premiero Iccturc par la Troisieme Commission dc la Confćrcnce dc La Hayc consa-crait, au premier alinća dc son paragraphc 2, le principe de la responsabilitć dc PEtat pour les actes accomplis par des fonctionnaires en dehors de leur competence, mais «sous le couvcrt dc leur qualite officielle ». Le sccond alinća ajoutait :
« Toutefois, la responsabilitć intcmationalc dc PEtat ne sera pas cngagćc si Pincompćtcncc du fonctionnairc ćtait si manifeste quc Pćtrangcr devait s’en rendre comptc ct pouvait, de cc fait, ćvitcr le dommage.»
{Annuaire... 1956, vol. II, p. 226, doc. A/CN.4/96, anncxc 3.)
Un tcxtc s’inspirant dc critercs analogucs a etć inserć par Garcia Amador dans Particie 12, par. 4, dc son avant-projct rćvisć de 1961, ct par Grafrath et Steiniger dans Particie 3 dc leur projet. Des for-mules en partie similaires figurent dans les ouvragcs dc plusieurs auteurs. Voir, entre autres, Guggcnheim {op. cif., p. 6), Jiinćnez de Arćchaga {loc. cit., p. 550), Tenekides {loc. cit. p. 787).
M Strisower {loc. cit., p. 461) vcut quc Porganc ait agi «dans un rapport du moins apparent avec ses fonctions ». Frecman affirmc quc PEtat est responsable Iorsque Porgane a agi « sous Pautoritć apparente de sa position » {loc. cit., p. 290). Pour Greig {op. cit., p. 435), PEtat n’cst pas responsable si les comportemcnts des or-
(Suitę de la notę page sulvante.)