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Quatriemement, un autre procede provient du comique de moeurs lie au langage. Un fou se distingue d'un non-fou parce que ses habitudes de vie ne sont pas les memes. Cest entre autres k cause de son dćsir que celui-ci se dififerencie. Par exemple, un de mes fous peut trós bien se considerer comme un autre que lui, issu d'une autre classe sociale et parlant un autre langage. Cela n'est pas prósent dans La nuit de Soledad, mais cela se pourrait dans un texte futur. Cest que pour croquer un personnage fou, il faut pouvoir 1’isoler en partant d’un sociolecte et d’un dialecte pour lui faire accoucher d'un idiolecte que lui seul est capable de parler et de comprendre. Or, j'ai pris pour acquis que chacun de mes personnages parlait un dialecte francophone different. Cest ce qui fait 1’originalitć, entre autres, des personnages fous de La nuit de Soledad.
Enfin, tout 1'intćret de cette representation de la folie reside dans 1'effet de bąbelisation qui se porte contrę les principes du langagement. Ces termes seront approfondis plus loin dans 1'essai.
Voyons, k prćsent, les techniques thćatrales qui ont soutenu une telle reprćsentation. J’exposerai d'abord le choix des dialogues et des monologues, puis des tableaux et des actes et enfin ceux des didascalies. Une deuxieme partie sera composće des techniques comiques sous-tendant les effets de la reprćsentation de mes personnages fous.
Mes dialogues30 me permettent de justifier leur place respective dans mon texte thćatral. D‘une part, je recherche toujours des rćparties cinglantes lorsqu’il s'agit d'ćchanges entre les personnages, parce que cela tient en ćveil et suscite la catharsis.
Ensuite, pour introduire des personnages, le dialogue se prSte le mieux car c'est celui qui permet, sans s'attarder, d'exposer la situation, de faire avancer 1'action ou encore de faire rire.
Dłautre part, le choix du dialogue par rapport au monologue est encore plus critique si Ton veut donner le ton a une sc£ne. Cela dćpend du contexte et de l'avancement de 1'action. Si, par exemple, la situation est tendue et qu*un dilemme se pose au personnage, 30 UBERSFELD, Annę, Lirę le thedtre, Paris, Belin, coli. Lettres, 1996, p. 21-35.