impossible aujourd’hui de s’attachcr a ces recherches, sans tenir compte de ses travaux et des resultats decisifs qu’ils ont apportes. Comme son maitre Lukacs, Goldmann brisait tous les genres avec une facilite deconcertante. Par ailleurs, le genre meme que pratiquait Goldmann: 1’essai,1 la communication, le resume de recherches, sou-vent brefs et condenses, ne cesse de poser des problemes d’interpreta-tion. Prives de leur contexte precis, il est souvent dłfficile de savoir exacternent a quelle question particuliere ces textes se rattachent.2 En -fin, sa mort nous a prive de 1’indispensable ouvrage theorique qui au-rait donnę un sens veritable a tous ces essais. Des lors, ou decouvrir cette insaisissable unitę? Comment reunir dans une meme problemati-que des essais sur la vision tragique de Pascal, les romans de Malraux, le theatre de Genet, la peinture de Chagall, 1’Ecole de Francfort et le socialisme yougoslave? Certains ont voulu decouvrir 1’unite de cette oeuvre au niveau de sa coherence conceptuelle et de sa methode. Et il est vrai, que nul plus que Goldmann n’a tente de donner a la critique marxiste un statut rigoureux et scientifique. D’autres ont cherche l’uni-te de cette ceuvre dans l’une de ses preoccupations essentielles: 1’esthe-tique, la sociologie de la litterature, la critique litteraire. De telles tentatives sont sans doute justifiees mais elles dedaignent malheureu-sement une grandę partie des derniers textes - politiques - de Goldmann qui echappent a ces recherches esthetiques pour tenter d’embras-ser 1’ensemble des phenomenes sociaux culturels. qu’il s’agisse de 1’integration profonde de la classe ouvriere au systeme capitaliste, du role de 1’autogestion dans la transformation des structures sociales, ou encore du socialisme yougoslave. A ne voir en Goldmann que le sociologue de la litterature on risque de meconnaitre les questions politiques qui, a notre avis,3 lui semblaient ces dernieres annees les plus essentielles.
Aussi, cette unitę de l’oeuvre de Goldmann la rechercherons-nous au niveau de 1’interpretation marxiste elle-meme. Goldmann etait marxiste et c’est a partir du marxisme qu’il s’est compris et qu’il faut comprendre son oeuvre: c’est la une verite banale, qui merite souvent d’etre rappelee. Farouchement anti-dogmatique, formę par le Lukacs d'Histoire et Conscience des classes, Goldmann fut sans doute l’un de ceux qui firent le plus pour ouvrir aux recherches marxistes de nou-veaux horizons. Aussi, ne saurait-on aborder son ceuvre avec serieux
568
Dans son etude sur: »L’esthetique du jeune Lukacs« Goldmann rcmarquc k juste titre au sujet du genre meme de 1'essai: »l'essaiv en revanche, est prźcisćment unc formę d’expression qui pose plutót des questions qu*elle n’apporte des rćponses et qui, surtout, lorsqułil słagit de ses dernieres, les esquisse plutót qu*elle ne les affirme« (M. S. page 230;.
II faut regretter aussi 1’abscncc d’indications chronologiques dans son dernier recueil d essais, paru peu de temps apris sa mort: »Marxisme et Sciences humaines« (Idees 1970). Dans la plupart de ccs textes - Essais et Confórences - Goldmann precise sa pensee en fonction d’une question particuliere (Sujet du colloque ou du congres) aussi est-il particuli&rement difficile de comprendre Timportance de ses prises d oppositions lorsqułon en ignore Tobjet.
Ce jugement słappuie non seulement sur les derniers textes politiąues de Goldmann (M. S.) mais aussi sur une serie de discussions personnelles lors du dernier colloque sur Hegel organisć par TEcole de Koręula.