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il faut absolument remodcler les autochtones en fonction des norraes culturelles euro-chretiennes avant de les christianiser C’est dans ce contexte que deux programmes apostoliąues voient le jour : le seminaire et la reduction. Le premier est destine a couper les liens entre les jeunes autochtones et leurs parents que les jesuites croient presque «tout pourris» comme de «vieux arbres», et a arracher les «jeunes plantes))1 de leur environnement d’origine. C’est pour cette rai son que les missionnaires placent les seminaristes a Quebec, au lieu de fonder le seminaire dans le pays des eleves. Le seminaire constitue un Hot europeen et chretien : chaque jour les seminaristes prient Dieu et assistent a la messe. On leur fait le catechisme et on leur inculque les mysteres chretiens. Ds apprennent de plus a vivre a la franęaise: ils słhabillent et se comportent comme les Franęais. Les missionnaires veulent, «par le moyen des enfants», transformer les jeunes autochtones non seulement en chretiens ideaux, mais encore en auxiliaires apostoliques et precheurs laics pour gagner la foi des adultes. Isoles brusquement de leur milieu culturel d’origine, des enfants, autrefois tres libres, expriment desormais leur soumission au Dieu chretien. Certains d'entre eux joueront reellement un role de porte-parole de la religion chretienne a leur retour chez eux.
Cependant, le projet de seminaire rencontre rapidement des difficultes. D’abord, les epidemies frappent les seminaristes dont plusieurs tombent rapidement malades et meurent peu apres. La mort des eleves fait croire aux missionnaires que les jeunes Amerindiens ne peuvent subsister hors de leur region d’origine. Lłautre diflBculte majeure est la desobeissance des enfants. Comme 1’enseignement a la maniere europeenne s’oppose a la liberte des enfants dans la communaute autochtone, les missionnaires se heurtent a une foae resistance des eleves: le climat du seminaire s'en ressent souvent et certains seminaristes vont jusqu’a s’enfuir avec les vivres qu*ils peuvent derober. Devant la desobeissance des enfants, les missionnaires se rendent compte de Timpossibilite de leur transformation sans la conversion de leurs parents. Pour toutes ces raisons, les missionnaires abandonnent rapidement le seminaire.
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Relations des jesuites. 1972, vol. 2, 1637, p. 39 (Relction de Paul LE JEUNE).