Ainsi on peut envisager d'expliquer la forte richesse specifique rencontree dans ce milieu par la conjonction de deux facteurs :
1) La variabilite hydrologique extreme (debit variant d'un facteur 100 au cours de 1'annee) a pour consequence une grandę mobilite du front de salinite nulle (situe a 60 km de 1'embouchure en saison seche, et a 15-20 km en saison des pluies). Celle-ci permet, en saison des pluies, la presence d'especes strictement dulęaquicoles dans la zonę definie comme estuarienne, comme en temoignent les 12% d'especes de ce type figurant dans notre inventaire.
A contrario en saison seche la salinite en aval de 1'estuaire est identique a celle de la zonę cótiere, ce qui permet d'y rencontrer des especes marines (au sens d'ALBARET 1994).
La tres forte variabilite de cet estuaire en ferait alors, en schematisant, un milieu non pas intermediaire entre thalassique et lotique mais appartenant successivement -pour sa majeure partie- a chacun des ecosystemes marin ou Continental, suivant la saison. Ainsi, meme si la proportion d'especes residentes est relativement faible, la forte richesse specifique rencontree si l'on integre toutes les donnees annuelles peut s'expliquer par une succession d'especes propres a chacun des milieux adjacents (processus de migrations sequentielles ; 60 % des especes dont 1'affinite peut etre determinee precisement ne sont pas estuariennes).
2) Le long du littoral guineen, le nombre de fleuves cótiers (6 en Guinee, 4 en Guinee-Bissau), 1'importance de leurs debits et la forte pluviometrie de la zonę cótiere conduit a une dessalure marinę cótiere permanente, pouvant atteindre 10 %o (BERRIT 1966); cette zonę est egalement tres turbide (USCHAKOV 1970) et s'etend a plusieurs kilometres au large (DIOP 1990). De ce fait il y a une totale continuite hydrologique entre la partie aval de 1'estuaire et la mer proprement dite.
Du point de vue ichtyofaunistique, ce schema est confirme par les resultats des campagnes d'estimation du stock halieutique cótier de DOMAIN (1989) qui confirme la typologie de LONGHURST (1963) et mentionne la presence d'une "communaute a Sciaenidae d'estuaire que l'on trouve en abondance de la cóte aux fonds de 8 m, soit jusqu'a environ 12 km au large".
De ce fait les conditions propres au milieu estuarien ne se limiteraient pas a la partie aval saumatre du fleuve ni a son panache en mer, mais a toute la zonę littorale longue, en Guinee, de 320 km. La zonę concernee est ainsi tres vaste (plusieurs milliers de km2) particulierement en saison des pluies.
II: Ichlyofaunes estuariennes.
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