LES DONNĆES DU PROBllME 107
envisage Ies choses objectivement. L’aumóne en effet se rattache a deux preceptes differents, selon que Ton considere l’une ou 1’autre source d’obligation, le superflu ou 1’indigence 6vidente. Dans ce demier cas, c’est au prćcepte Honor a parentes; dans le premier, c’est au Ne furtum facies K Comme ii avait soutenu que 1’aumóne tombait sous un precepte affirmatif, il se doit de s’ex-pliquer dans l’ad 1“™: comme tout precepte negatif, ce ne furtum facies implique un acte positif et une affirmation comme conse-quence: vouloir ne pas voler, et vouloir posseder et recevoir tout ce qui est sień. C’est en ce dernier point que le precepte de l’au-móne se ramene a ne pas voler: quia superfluum non est nostrum, et debemus telle quod pauper accipiat quod suum est, Voila certes une obligation de justice qui parait beaucoup plus accen-tuee que le potius est dispensator de tantót: le superflu n’est plus au riche, il est le suum du pauvre! Mais dans quel sens? tout est la. Faut-il identifier dans la realite ce que les mots employes semblent identifier ? considerer la possession du superflu comme injuste au meme titre que la possession des biens mai acquis ou usuraires ? Voila ce que pas un auteur jusqu’a datę n’a elucide entierement: ce qui prete a leur theorie de 1’aumóne un aspect austere. Albert le Grand, suivant ici la route yaguement tracee par saint Bonaventure, dissipe toute illusion sur le sens de ce suum equivoque; mais il faut chercher tout a la fin de son traite, ou il se pose 1’objection brulante:
Item. Id quod superest, ex justitia non potest retineri: et tamen inde potest fieri eleemosjoia: ergo eleemosyna erit de illo quod ha-betur, licet juste retineri non possit: et ex hoc sequitur quod de usuris et aliis illicite acquisitis possit fieri eleemosyna: quod multi negant.
1. Ouv. cit., dist. XV, art. 16, sol. (t. XXIX, p. 496).