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sur la faęon dont les impćrialistes allaient exploiter le probleme du tribalisme pour dćtruire les Ćtats africains. Personne ne lui pręta attention; le Nigćria en fit cependant la douloureuse expćrience entre 1967 et 1970. II ne fait aucun doute qu’il ćtait en avance sur son temps, mais il eut la satisfaction de voir se rćaliser certaines de ses prćvisions et, en fin de compte, c’est k lui, non k ceux qui le critiquaient, que l’avenir a donnć raison1. »
La rćhabilitation de Nkrumah par le rćgime militaire du Ghana n’a pas eu pour effet immćdiat de rendre vie aux forces politiques du nkrumahisme, mais celles-ci ont continuć k s’affirmer dans les ćlections des demieres annćes1*.
Rares sont aujourd’hui ceux qui mettent en question le rdle historique des idćes de Nkrumah dans le dćveloppement de l’Afrique moderne. Le « nkrumahisme sans Nkrumah » demeure une force avec laquelle il faut compter k 1’ćchelle du continent — et, cela ćtant, il est d’autant plus ćtonnant qu’aucune etude sćrieuse n’ait encore ćtć consacrće k Phomme et k ses idćes18.
Tout comme son ami et dćfenseur Nkrumah, le grand dirigeant congolais n’a ćtć rćhabilitć dans son pays qu’aprćs sa mort. Une haute tour domine aujour-d’hui Kinshasa, la capitale, d’ou il tenta de s’ćchapper en 1961, pour etre emprisonnć, puis assassinć, non sans avoir ćtć auparavant sauvagement rouć de coups. L’ironie de la rćhabilitation de Lumumba est qu’elle est l’ceuvre du gćnćral Mobutu Sese Seko, qui avait aidć k le renverser et l’avait fait ensuite arreter.
Au cours de la breve pćriode ou il fut premier ministre de la Rćpublique dćmocratique du Congo (aujourd’hui le Zalre), aux temps troublćs de l’acces-sion k 1’indćpendance, en 1960, Lumumba ćtait dćpeint comme une personnalitć instable dont 1’humeur imprćvisible contribuait i maintenir le chaos qui rćgnait aprós que le Congo chancelant se fut affranchi de la domination coloniale belge. Mais il ćtait aussi considćrć comme un dirigeant totalement engage, et
Afriscope, Lagos, juin 1972.
12. Voir « Nkrumah’s policies must hołd w, interview de Kojo Botsio dans West Africay
Londres, 19 mars 1979.
13. Voir une 6tude sympathisante de Kwesi Armah: Nkrumah's legacy (Londres, Rex Collings,
1974). On trouvera une utile rććvaluation du r61e de Nkrumah dans le livre du gćnćral A. K. Ocran, Politics of the sword (Londres, Rex Collings, 1977). Les idćes de Nkrumah en mati^re de gouveraement font Fobjet d’une ćtude importante, mais plus gćnćrale, de Bereket H. Selassie : Black stary a view of the life and times of Kwame Nkrumah (Londres, Allen Lane, 1974). Le recueil d’essais ćcrits par le doyen des panafricanistes antillais, l’ćcrivain marxiste C. L. R. James : Nkrumah and the Ghana revolution (Londres, Allison et Busby, 1977), exprime un point de vue amical, mais critiąue.