On devrait maintenant, vu que l’on a aborde cette ąuestion, voir de plus pres les affmites et les differences dans la maniere et le style de philosopher entre Derrida et ses contemporains comme Deleuze, Guattari, Lyotard, Senes mais aussi ses predecesseurs comme Bataille et Klossowski. II partageait notamment avec eux la meme genealogie intellectuelle. Pourtant ces considerations devaient prendre tant de place et de temps qu’elles auraient deborde les limites de cette elocution en hommage de J. Derrida. II suffit donc de dire que Derrida avait conscience des forces sombres, des courants schizophrenes, des etats de delirer, des idees comme vampire (la metaphore de Nie-tzsche-Deleuze) qui suce son propre sang. Neanmoins, il n’a jamais franchi le seuil du rationnel, il n’a pas quitte le Logos. C’est sa resistance dans la pensee, ses paradoxes et antinomie. Pensee-non-pensante constituait uniquement la mesure de ce qui apparaft si l’on renonce a la deconstruction. Ce n’est pas ainsi, comme Rorty le voudrait, que ce grand penseur franęais ne s’etait libere de la pression des fausses questions qu’au moment ou il a melange les styles, a fait croiser les reponses entre elles, quand il a totalement privatise le discours, a abandonne la reflexion sur les conditions de penser (differance, archi-ecriture, archi-trace etc.). Cest le contraire. Parce que Derrida, meme dans ses ouvrages posterieurs, tels que Glos, et Carte postale..., touche toujours a la pulsation du Logos (ou Mythos) — ou Ton cherche la certitude absolue et celle-ci reste insaisissable, ainsi que l’on essaie d’etablir les principes fondamentaux inalterables bien qu’ils soient innombrables et qu’ils s’aneantissent reciproquement alors aucun ne peut etre 1’amorce de la verite inevocable — d’ou la valeur de sa reflexion qui n’admet pas le decret sous 1’embleme ou bien “toujours” ou bien “jamais”. Peut-etre c’est pourquoi a-t-il mentionne que la deconstruction est parfois voisine a 1’attitude mystique a laquelle la theologie ajoute son intellectuel post-scriptum, tout en restant avec celle-ci en relation aporetique, ainsi qu’elle est tres proche du doute sceptique qui doit se replier sur lui-meme. C’est pourquoi il souligne plusieurs fois — a partir du livre Positions jusqu’aux demieres publications (entre autre la dissertation concemant le sens meritoire et institutionnel de la philosophie des annees 90) — que les opinions sur la fin de la philosophie ne sont aucunement fondees. On peut seulement parler du declin du type particulier de sa pratique dont la deconstruction devoile les faiblesses.
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