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lorsqu*elle votait une adresse k la reine, pour la prier d'inviter les puissances europeennes k prćfćrer la voie de 1'arbitrage a celles des armes pour le rćglement de leurs conflits internationaux,
Le projet du gouvernement russe est loin sansdoute d’avoir la meme portće et la meme valeur que le vote du Parleraent anglais. II ne va pas jusqu'& prevenir la guerre, raais il veut au moins en bannir les plus cruels exces. Ce n’est pas seuleraent dans 1’ordre physique, raais encore dans 1’ordre politique et social, qu’il faut craindre pour 1’humanite les dangers de 1’iraitation contagieuse. A une epoqueou 1’Europedoit redouter k la fois le flćau de la guerre internationale et celui do la guerre civile, n*est-il pas oppoi*tun d’interdire k la prerai&re 1’emploi des moyens que rhumanitć et la ci-vilisation rćprouvent, afin que la seconde ne se croie pas au moins autorisee par 1’apparente coraplicitó de 1’indiflference k y recourir et les dćpasser en atrocitćs, ainsi que nous n’en avons eu que de trop lugubres exemples ? Le sang heroique des otages qui a could k Paris, sur le pavó des coursdela prison de la Roquette, ne r6vble-t-il pas assez le danger de donner par une guerre internationale 1’idśe d’un raoyen illicite dont s’emparent, au milieu des discordes civiles, do fana-tiąues sectaires pour en pousser 1’imitation jusqu’aux plus liorribles con$ćquences ?
Etait-il inopportun de chercher, comrae 1'apensć le gouvernement russe, k faire prćvaloir dans la guerre le respect de la propriśtś privće, au lendemain d’une guerre ou l’on a vu les cherains de fer servir au transport du butin dc Tindustrie du pillage, afin d’enrichir le pays du vainqueur de la spoliation du pays du vain-cu? Tout se tient et s’enchaine dans 1’ordre morał, et ii y a dans ces faits un peril sśrieux, k une ópoąue ou l*on preche au polćtariat que ia proprićtć c’est le vol.
Au milieu de la perturbation jetee dans 1’ordre morał et social par toutes ces calamitćs recentes, la cons-cience publiąue ćprouvait le besoin d’etre rassurće par les dśclarations de la diplomatie, surce qu’il fallait entendre dśsormais par le droit des gens. Elle deman-dait i la rćprobation du passó une garantie morale contrę les apprehensions et les reprćsailles meme de l’avenir.
II ćtait grand temps que dans la diplomatie euro-pćenne róunie en congrks, la parole fut enfin donnóe k la ciTilisation et k 1’humanitd. Lk donc oii lord I)erby ne voit que Tinopportunitó de la discussion, je ne ver-rais que la culpabilitć du silence. II ne faut pas que 1’Europę par la guerre internationale et par la guerre civile retourne a la barbarie.
Lord Derby n’a pas dit, maisil laisse assez entendre qu'il n’aperęoit gukre qu’une utopie philanthropique dans ce projet du gouvernement russe, qui semble se rćsumer dans cette maxirae de Montesquieu et de Kant, qu’en temps de guerre les belligćrants doivent se faire le moins de mai possible pour faciliter l’ceuvre de rćconciliation de la paix. N’est-ce pas pourtant k preparer dans la guerre cette ceuvre de rćconcilia-tion que doit etre, meme pour 1’ćcole utilitaire, la grandę politiąue, la seule qui rćponde aux intćrets industriels et commerciaux aussi bien qu’intellectuels et moraux? L’histo:re contemporaine ne nous montre-t-elle pas, par la guerre de Criraće, que cette oeuvre de reconciliation n’est pas irróalisable entre les belli-