« Si 1'homme s'enfuyait, il le poursuivrait; mais 1'homme ne s'enfuit pas, anime soudain du courage de la frayeur. Lui aussi grognait, sauvagement, furieusement, donnant voix a la peur, cette soeur de la vie qui repose enroulee autour des racines les plus profondes de l'existence .» Jack London
L'inquetude porte toujours sur quelque chose a venir. Elle est notre apprehension a saisir 1'inconnu du futur.
Mais elle est un courage en elle-meme, car c'est elle qui donnę la force de se conffonter au futur. Comme le dit Jack London dans cet extrait finał de la nouvelle L'Amour de la vie, la peur donnę parfois la possibilite de rester en vie, car elle s'oppose a 1'indifference que l'on voue a son propre sort. Etymologiquement,l'inquietude s'apparente a 1'agitation. Elle empeche Thomme de se tenir tranquille.
La peur elementaire, c'est celle d'un futur qui signifie la fin. Pourquoi l'avenir nous inquiete, si ce n'est parce que le temps nous rapproche de la mort? La nótre, bien sur, mais depuis peu egalement, celle du genre humain.
Philippe Aries, dans son Histoire de la mort en Occident, explique l'evolution des comportements individuels face a la mort depuis le bas Moyen-Age jusqu'a aujourd'hui1. Comportements encadres par des pratiques religieuses et sociales, dont la transformation au fil du temps procede d'une veritable mutation psychologique. Aries emploie un exemple tres simple: la pire mort, au Moyen-Age, c'est la mort subite, le tronc d'arbre qui vous tombe dessus, 1'accident de voiture aujourd’hui. En effet, cette mort ne laisse pas le temps de se preparer au voyage vers 1'au-dela, religieusement comme psychologiquement. La mort annoncee, au contraire, permet un depart en paix. Familie et proches commencent a veiller le mourant, rituels religieux et sociaux se deroulent comme prevu. Puis, quand il sent son heure arriver, 1'agonisant, en generał, renvoie tout le monde de la chambre ou il git, se tourne contrę le mur, et meurt. II sait quand la mort arrive, il veut etre seul. Aujourd'hui, on meurt a 1'hópital, on nous cache qu'on va mourir, et on ne nous laisse pas une minutę tranquille pour
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Philippe Aries, Essais sur 1'histoire de la mort en Occident: du Moyen-Age jusqu'a nos jours, Seuil, 1996