620 SCIENCE CRIMINELLE ET DROIT PfiNAL COMPARE
La pratiąue franęaise tiree de l’extrapolation de 1’article 81 du codę de procedurę penale etait-elle compatible avec ladite convention, telle etait 1’interrogation, ce qui impliąuait deux reponses.
L’article 81, qui n’enumerait pas les ecoutes, pouvait-il pretendre a la qualification de loi. Si oui, la construction jurisprudentielle qui tirait parti de Particie 81 represen-tait une qualite suffisante : accessible, claire, suffisamment precise.
Cette double interrogation etait Penjeu des debats dans les affaires Huvig et Kruslin. L’audience publique devant la Cour europeenne venait apres toute une serie d’arrets de la Chambre criminelle de la Cour de cassation. La Cour de cassation avait bien precise la notion et la definition d’ecoutes (16 fevr. 1989) et opere des distinctions et traitements necessaires entre les ecoutes anterieures a la saisine du juge d’instruction et celles ordonnees par la commission rogatoire du juge. Le souci de se conformer a la Convention europeenne etait contrebattu par la preoccupation de la police de mieux lutter contrę les trafiquants de drogue en utilisant les ecoutes.
Toutes ces evolutions et tendances se retrouvaient probablement dans le rapport de la Commission presidee par le Premier president Robert Schmelck que les premiers ministres successifs n’ont pas voulu publier. La Commission consultative nationale des droits de Phomme en avait demande communication.
La magistrature et le legislateur apres les arrets Huvig et Kruslin auront a determi-ner les voies et moyens pour que la France mette en application les arrets de la Cour europeenne. La doctrine ne manquera pas d’apporter ses suggestions pour cette adequation. Deja le professeur Cohen-Jonathan (Revue universelle des droits de ihomme) et le professeur Pradel (Recueil Dalloź) ont publie des commentaires qui apportent d’importants eclairages pour 1’interpretation des arrets et de leurs consequences.
Au lendemain des arrets de la Cour europeenne, le 15 mai 1990, la Chambre criminelle rendait un nouvel arret introduisant « le critere de gravite, en vue d’etablir la preuve d’un crime ou de toute autre infraction portant gravement atteinte a 1’ordre publie » (Bacha Bazoude). Des decisions plus recentes (trib. corr. Thonon, cour d’appel d’Aix-en-Provence, trib. corr. Paris) ont adopte des points de vue divergents. La chancellerie a adresse des circulaires. Certes la Cour de cassation ne peut rendre des arrets de reglement et elle reste tributaire des cas d’espece et des pourvois. La solution Iegislative presenterait 1’interet de mettre les juges d’instruction en presence d’un texte prescrivant les conditions d’utilisation et de contróle.
Une meilleure approche des probleme reste en tout cas ouverte a la suitę des arrets Kruslin et Huvig. La Cour europeenne est actuellement salsie de l’afFaire Thynes c/ Grandę Bretagne, qui conceme pour 1’Irlande du Nord, les conditions d’interpellation et de gardę a vue des suspeets.
Rev. scienceerim. (3), juill.-sept. 1990