choisissait les autorites derriere lesąuelles il put se retrancher pour les parer. Ici encore ce fut Bossuet. L/eveque de Meaux n'avait-il pas dit que les juifs ne possedaient que FEcriture Sainte pour etudier „les preceptes de la bonne vie” ? Ils la feuilletaient nuit et jour. Elle devait etre entre les mains de tout le monde, et leur etait un continuel sujet de meditation. Si tel etait le devoir des juifs du temps de rAncien Testament, ce devait etre a plus forte raison le devoir des chretiens.
Heureux d’avoir trouve cet argument, van der Schuur est sur de reduire au silence tous ses adversaires. II aurait voulu le crier sur les toits. Ce n’est pas seulement Teloquence de M. de Meaux qui les rendra muets, mais
„sa grandę autorite, son nom celebre, et surtout......le fait qu'il est eveque”.
Si Arnauld ou un autre „dont on n'a a craindre que la plume”, avait employe cet argument, on aurait bien trouve le moyen de s’en moquer. Mais il parait qu’on ne veut pas avoir affaire a des eveques 246). Encore cet eveque etait-il un des plus renommes. Coup sur coup van der Schuur allegue son temoignage, qu’il considere comme irrecusable: les autres livres qu’il cite a Tappui de sa these ont a ses yeux moins de valeur que Tappro-bation que Bossuet en a donnee. Car ainsi on pouvait „se figurer entendre parler non seulement Tauteur du livre... mais aussi cet eveque illustre” 247). Lorsque celui-ci avait eleve la voix, on n'avait plus besoin de se demander si les autres prelats franęais, ou du moins la plupart d’entre eux, s'etaient prononces dans le meme sens: il suffisait a lui-seul a nous apprendre quelle etait la doctrine de TEglise de France sur ce point 248).
Le temps a apaise bien des passions. A 1’heure actuelle il nous parait invraisemblable que, dans leur premiere reaction contrę les protestants, qui ne juraient que par la Bibie, les catholiques se soient detournes de la lecture de ce livre divin. On comprend neanmoins qu’en ces temps mouvementes les fideles aient trouve la plus grandę surete a se serrer aussi etroitement que possible autour du principe d'autorite. Mais a present il ne se trouvera plus personne qui n'adhere de tout coeur aux paroles de Bossuet avec lesquelles van der Schuur ciot pour sa part la polemique: Pourvu que dans
246) Beweerde Vrijheid...... door A. A. pl. D. G. (van der Schuur; cf. van Beck,
o.c., p. 3), 1687, p. 52-53. (Reedite encore en 1740 sous le titre : Kort begrip van het boek Beweerde Vrijheid). Le passage dc Bossuet auqucl il fait allusion se trouve dans le Discours sur 1’Histoire Uniyerselle, 2e partie, chap. III (CEuvres completes, t. XII, p. 63).
247) Berigt voor d'Eenvoudigen, 1691, p. 16. Le livre cite est unc traduction dc Flcury, De Zeden der Christenen. Van der Schuur aimait pourtant beaucoup les oeuvrcs de Flcury. Cest lui qui est Tautcur des Aenmerkenswcierdige Geschiede-
nissen...... door de heer Fleury,...... toegepast aen de Hollandsche Kerk......, 1724
(ouvrage posthume). Et encore au dix-neuviemc siecle les vicux-catholiqucs editaient des versions hollandaiscs d’ouvrages de Fleury (cf. De Oud-Katholiek, 19e annee (1903), p. 93; 28e annćc (1912), p. 233-234).
248) Nader Berigt voor d’Eenvoudigen, 1700, p. 28.
70