520 SCIENCE CRIMINELLE ET DROIT PfcNAL COMPARfi
D’une part, en effet, la copie d’un logiciel, non original au sens de la loi de 1957, peut etre prejudiciable a 1’auteur du programme de ce logiciel. Or, l’article 462-5 du codę penal incrimine « quiconque aura procede a la falsifi-cation d’un document informatise... de naturę a causer un prćjudice a autrui». A raison de sa redaction, cet article pourrait donc permettre de sanctionner des copies de logiciels ne repondant pas a la condition d’originalite.
D’autre part, si la copie d’un logiciel non original peut etre un faux, celle d’un logiciel original peut Petre a fortiori, mais la qualification de faux in-formatique entre alors en concours avec celle de contrefaęon de logiciel. En atteste un recent arret de la cour d’Angers (Angers, 25 janv. 1990, Expertise, 1990, p. 102) qui, a propos de la copie d’un logiciel original, a retenu et la qualification de rarticle 462-5 du codę penal et celle de contrefaęon de logiciel. II apparait donc bien que le seul jeu des incriminations propres au droit penal special de l’informatique sufTit a destabiliser ce droit.
Certes, pour eviter, s’agissant des copies de logiciel, Papplication de Particie 462-5, on pourrait opposer que le document informatise falsifie doit valoir titre au sens du droit du faux, ce que ne vaut pas un logiciel, mais la piste magnetique ou la puce d’une carte de credit vaut-elle titre ? On peut en douter. Cette piste est essentiellement cle d’acces a un systeme et procede d’identification. On est ainsi ramene au premier probleme car, faute de titre, on ne pourra alors voir un faux dans la seule falsification ou contrefaęon d’une piste magnetique.
La destabilisation existant a Pinterieur du droit penal special de Pinforma-tique, ce serait faire un bien mauvais proces a Parret Bourąuin que de lui reprocher de destabiliser ce droit. De plus, si ce proces devait avoir lieu, il devrait aussi etre conduit contrę une jurisprudence civile. En eflfet, la cour d’appel de Paris (4* ch. B, 2 fevr. 1989, Expertise, 1989, p. 69) vient d’admet-tre que la copie d’un logiciel peut etre sanctionnee par la theorie des agisse-ments parasitaires. Comme 1’arret Bourąuin, cet arret permet donc de contoumer Pirritante question de Poriginalite du logiciel.
En somme, si Parret Bourąuin destabilise, sans meconnaitre selon nous le droit du vol, des constructions legislatives recentes, c’est parce que ces constructions sont affectees d’une fragilite que seule permettrait de fortifier une reflexion fondamentale, sur les conditions de reconnaissance et sur les modes adequats de protection de ces biens nouveaux que sont les biens informationnels.
Rev. science crim. (3), juill.-sept. 1990