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avec leur stereotype vehicule par toutes sortes de discours laisses a la disposition aussi bien d'un public tres large que d'une elite intellectuelle. L'auteur ne se laisse pas tenter par le cafe maure : «- M'approcherai-je? -Pour quoi voir, qu'une echoppe tres miserable, douze Arabes couches, un musicien tres probablement laid... Demeurons.»³⁵⁹

En dehors de la paresse standard qui fait partie du stereotype de 1'Arabe, Gidc avoue qu'il a ete seduit par Timmobilite des Arabes. Dans un cafe de Blida il aperęoit

sur les nattes trois jeunes Arabes couches. Que leur offrait donc ce reduit? pour qu'ils preferassent ici, a 1'amusement d'autres lieux, aux rires des femmes, aux danses, 1’absence precisement de tout cela... un peu de kief.³⁶⁰

Gide reflechit sur la raison pour laquelle les Arabes s'adonnent a la drogue, cette occupation banałisee par les voyageurs europeens et qui ap-partient au stereotype de l'Arabe; mais ce qui semble fasciner l'ecrivain est plutót cet etat de beatitude que les Arabes atteignent, la serenite et le bon-heur a la recherche desquels Gide part pour l'Afrique. Le stereotype de l'Arabe est parfois chez Gide un stimulant a la reflexion philosophique, le point de depart d'une meditation sur la condition humaine. Gide, se lais-sant captiver par les cliches, expose un autre trait de 1'Arabe, non moins fixe dans l'imaginaire collectif, a savoir son agressivite dont le symbole classique est le fameux couteau arabe :

Cet autre soir, entra brusquement, contrefaisant l'ivrogne, un grand Arabe, fort, le regard habile et le couteau tire. II s’amusait avec, 1'essayait... Ce n'etait pas un de ces petits couteaux de roumis : c'etait un grand, fort coute-las, maigre et pointu comme son maitre. ¹

Si quelque Arabe attire 1'attention particuliere de 1'auteur, c'est un Arabe le plus souvent beau; donc une notę esthetique 1'emporte visible-ment; 1'homme indigene n'est qu'un element du paysage. Decrivant son voyage a Bou-Saada, Gide aligne quatre elements : «[...] des abricotiers geants, un moulin, des troupeaux, des Arabes.»³⁶² L'enumeration pourrait etre interpretee dans son ordre croissant: de la vegetation jusqu'a l'homme, ou bien inversement: de ce qui attire le regard a la presentation de ce qui est beaucoup moins interessant; donc, selon cette perspective, 1'Arabe

A. Gide, Amyntus, op. cit., p. 101. ³⁴⁰ Ibid., p. 143.

³⁶¹ Ibid., p. 135.

³⁶³ Ibid., p. 107.