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et non k l’autre vicaire gćnćral, comme le lui avait suggćrćson ami le P. Cućnet.
Apr&s une premićre dćfaite, le recteur ne se tint pas pour battu ; et il ne tarda pas du reste k avoir de nou-veaux atouts dans la main.
• L’afTaire faisait du bruit, et 1’ćcho en arrivait dans les presbyt&res voisins. Les recteurs prenaient fait et cause pour un confr&re qui se disait lćse dans ses droits.
Aussi la lutte va-t-elle prendre une nouvellc acuitć. Episode d'une histoire trop humaine pour qu'on sen ćtonne ! Le dćsaccord entre le couvent et la paroisse est un de ces faits qui mettent frćquemment aux prises seculiers et rćguliers, — toujours prćts k s’entendre quand il sagit du bien k faire, et trop souvent portds k se diviser quand on en arrive aux moyens d'exćcu-tion, et que 1'esprit de corps est en jeu. C'est ainsi que Ton vit se reproduire dans la rćgion, k 1’ćgard de la nouvelle communautć, Tattitude dćfiante dont les Carmes du XVII* siacie eurent k souffrir eux-mćmes tous les premiers.
Et ce ne fut pas seulement dans les presbyt&res que cet ćtat d’esprit se propagea. Le conseil municipal de Pluneret rentra en scfcne : k plusieurs reprises il con-sulta des hommes de loi pour savoir & quel point la chapelle, & laquelle on avait fait un sort parliculier pendant la Róvolution, avait pu devenir la proprietć exclusive dc la mense dpiscopale (1). — Quant & la population elle-móme, elle prit spontanćment parti pour son nouveau recteur, dont elle regardait la cause comme la sienne. On sait combien est chatouilleuse une paroisse sur la question de ses privilóges; et 1'ćchauf-fouree de 1791 montre k quelle exaltation pouvaient se
(t) « Les municipaux dc Pluneret cherchaient & s'«ttribucr exclusivement la proprićti de la chapelle, sous prćtexte qu'elle n'aurait pas ćt£ ćomprise dans la ventc du domałne » (Mimolrt* du P, Cułnei),
porter les habitants de Pluneret pour dćfendre leurs droits.
Dans ces conditions la lutte ćtait inćvitable.
Un premier incident*eut lieu & propos du cime-tifcre.
Le supćrieur s’ćtait empressć d'user de lautorisa-tion qu’il avait reęue de l’ćvćque et du prćfct (1). De cette faęon, pensait-il, nous pourrons enterrer nos morts chez nous, et rompre ainsi le dernier lien qui nous rattache h la paroisse.
Mais la chose fut plus laborieuse qu'il ne s’y atten-ćlait. L’opposition communale ne cessait de creer des difficultćs: le maire, M. de Robień, essayait sansdoute de rester neutre entre le Petit Sćminaire dont il com-prenait le droit, et ses administrćs qu’il ne voulait pas se mettre a dos. Mais il y avait dans le conseil un de ces meneurs, comme Pluneret en a vus h diflfórentes ćpoques, irrćductibles et habiles h susciter des diffi-cultes au couvent (2).
Le cimetióre devait ótre bćni le 25 juillet; et il sem-blait bien qu’une telle ceremonie dCit se passerdans le calme. Quelle ne fut donc pas la surprisc du P. Cućnet d'apprendre, par la rumeur publique, qu'on se propo-sait de renverser les murs du cimetifcre et d'abattre la croix...
On n’en vint pas aux voies de fait. Neanmoins la menace avait paru si grave qu’op se crut obligć de faire monter la gardę pendant plus de six semaines.
(1) L’arrćtć prćfcctoral est du 30 mai 18221 « Lc Supćrieur est autorisć A avoir uu cimetićre particulier pour toutes les personnes que renferraent l'ćtablissemcnt (Areh. dfparl., V).
(2) Cćtait 1'ancien maire nornmć Le Barh. Pendant que M de Robień paraissait au mieux avec les Jćsuites, sous son couverl Le Barh, qui ćtait lc vćritable administrateur communal, adressa au sousprćfet une rcqućte tendant A faire dćplaccr le cimetićre aprćs qu'il eut ćtć construit. II y eut enqućte ; elle tourna en faveur du Petit Sćminaire (Cf. /a lettre du maire, /*' aoilt łS22) ; mais elle n’cn ćtait pas moins un dćsagrćmcut ; et surtout elle rćvćlait un ćtat d’esprit nettement hostile.