556 SCIENCE CRIMINELLE ET DROIT PENAL COMPARE
Inversement, la juridiction penale salsie de la troisieme poursuite peut refuser d’ordonner la confusion des peines A et C, tout en decidant d’absorber la peine B dans la peine C qu’elle vient de prononcer. Encore faut-il que sa liberie a ce sujet ne soit pas exclue par le fait qu’en prononęant la peine C, la juridiction aurait atteint le maximum prevu par la loi pour la troisieme infraction, la plus grave : de ce fait, la confusion de la peine A et de la peine C deviendrait obligatoire en meme temps que la confusion des peines B et C.
Ces explications theoriques viennent de trouver leur illustration dans une espece re-cemment deferee a la Chambre criminelle (Crim. 19 juill. 1989, Buli. crim. n° 294). Un sieur Blondey avait ete condamne, pour des delits commis en concours reel et sur des procedures distinctes, a deux ans et six mois, puis a deux ans d’emprisonnement, et le tribunal correctionnel saisi de la seconde affaire avait ordonne la confusion des deux peines. Peu apres, pour des vols aggraves par le port d’une arme et commis en concours reel avec les divers delits dont il vient d’etre parle, Blondey comparaissait devant la cour d’assises du Jura ; cette juridiction, apres avoir accorde a Paccuse le beneflce des circonstances attenuantes, Pavait condamne a cinq annees d’emprisonnement sans sursis et declare que cette peine serait confondue avec celle de deux ans et six mois precedemment prononcee ; mais la cour d’assises n’avait pas souffle mot d’une possible confusion avec la peine de deux ans d’emprisonnement, qui se trouvait brusquement liberee par la disparition de la peine de deux ans et six mois en laquelle elle avait ete absorbee jusqu’a present.
Allait-on pouvoir faire executer par Pinteresse deux peines cumulees (5 ans et 2 ans d’emprisonnement), soit sept ans au total ? Statuant sur la requete presentee par Blondey, la chambre d'accusation de la cour d’appel de Besanęon (competente, en application de Part. 710, al. 2 c. pr. pen., pour statuer sur ce point a la place de la cour d’assises, demiere juridiction de jugement intervenante) rejette la demande qui lui etait faite, sans se douter qu’elle venait de meconnaitre une regle de fond liee aux effets des circonstances attenuantes en matiere criminelle.
Cette regle, la voici : la duree maximale de Pemprisonnement correctionnel, telle qu’elle est fixee par Particie 40 du codę penal et exception faite des cas ou la loi en decide autrement, est de cinq ans. En consequence, lorsqu'une cour d’assises decide d’accorder a Pindividu poursuivi des circonstances attenuantes et que son indulgence la pousse a descendre jusqu’au prononce d’une peine correctionnelle, cette peine, qu’elle soit ou mitigee par un sursis total ou partiel, simple ou avec misę a Pepreuve, a pour limite superieure le plafond de cinq ans etabli par Particie 40 (Crim. 2 nov. 1960, Buli. crim. n° 497 ; 20 mars 1961, ibid. n° 179 ; 12 janv. 1983, ibid. n° 17 ; 1CT aout 1987, ibid. n° 303 ; cette Revue, 1988.302, obs. G. Levasseur, et 511, obs. A. Vitu).
En prononęant une peine de cinq annees d’emprisonnement, la cour d’assises du Jura avait donc epuise la penalite correctionnelle dont elle disposait. Du coup, la chambre d’accusation ne pouvait pas ordonner le cumul (ou refuser la confusion), dans la mesure ou Paddition des peines en concours depassait le maximum afferent a Pinfraction la plus grave, ici les cinq ans resultant de Papplication de Particie 40 du codę penal. La demande du sieur Blondey aurait du etre satisfaite et la confusion etre obligatoirement prononcee entre les peines de 5 ans et de 2 ans d’emprisonnement. En s’y refusant, la chambre d’accusation ne pouvait que s’exposer a la cassation, et la Chambre criminelle n’a pas manque de censurer, par son arret du 19 juillet 1989, la decision qui lui etait deferee.
Quand la loi du 23 decembre 1980 vint briser la solidarite que le codę d’instruction criminelle (art. 637, 638 et 640) et le codę de procedurę penale (art. 10) avaient eta-blie entre la prescription de Paction publique et celle de Paction civile, la Cour de
Rev. science crim. (3), juill,-scpt. 1990