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rappelle notre impuissance. Meme si cette inquietude peut nous pousser au savoir, en nous informant davantage, par exemple, elle entretient notre situation d’humilite face au monde. Si 1'homme n'a pas 1'orgueil de croire que tout changer est possible, il se deconnecte du faire pour se concentrer sur le savoir, dans lequel il peut effectivement trouver un orgueil de substitution, la fierte du savant face aux novices.

Que Thierry Ehrmann ne se reclame d'aucune engeance superieure pour expliquer d’ou lui viennent les propheties signifie le triomphe de 1’imaginaire. Les propheties sont pour lui oeuvre de fiction. De quel droit s'octroie-t-il le privilege de decrire le monde de 2009, encore inconnu a l'epoque ou il a donnę les propheties a ses lecteurs? Ne lance-t-il pas un defi au monde? N'incite-t-il pas a se servir de la puissance de 1’imaginaire, materialisee non plus par des images comme a la DDC mais bien par le langage, pour apprehender le monde et en constituer un miroir?

Ainsi, convertir le texte des propheties en chiffres puis en images etait retrospectivement indispensable pour en saisir le sens. Tout d'abord, il s'agissait de comprendre le texte d'un plasticien, c'est a dire d'une personne pour qui la realite du monde est avant tout plastique, des images, des matieres. Ensuite, parce que ces propheties, meme avec leur vemis si convaincant de reel, sont le resultat d'un imaginaire a l'oeuvre. L'imaginaire, comme son nom l'indique, est la « fabrique des images, des representations, des visions d'un groupe ou d’un individu. ». Pour Thierry Ehrmann, la DDC s’applique a « inventer des aventures¹²⁶», qui sont des images aux murs, des performances, mais aussi des textes.

Cette quete de sens s'est donc aussi faite avec des images et des experiences, pour decrypter des environnements differents: celui de la DDC, celui de Thomme ffagile au sein du monde, celui de l'exegese nostradamienne, puis celui des propheties et de leur emission, et enfm, celui de Thomme, non plus naturel au monde, mais bien tel qu'il est entoure de violence et de recits. Si Ton considere les propheties de Thierry Ehrmann comme la scene du theatre, les premiere et troisieme parties de ce memoire en sont les coulisses. Meme si elles correspondent a deux mouvements tres distincts, elles sont un peu le miroir d'elles-memes, comme les deux panneaux exterieurs d'un tryptique sont souvent legerement replies vers le panneau central, et se font ainsi presque face. Elles sont ces trois symboles philosophiques de la relation de 1'homme a la naturę, a savoir l’inquietude, l'imprevisible et la violence, qui encadrent le rapport du lecteur aux propheties de Thierry Ehrmann. Elles sont egalement les trois etapes d’un travail quasi alchimique, oeuvres au noir, rouge, blanc. Cremation, putrefaction, ether. Atmosphere prophetique, propheties, sens prophetique.

126 « Propaganda », Op.cit