106 Annuairc de la Comraission du droit International, 1975, roi. II
prejudices causćs k cux ou a leurs ressortissants par des organes dudit mouvement260. On peut citer des cas meme anciens de rćclamations de ce genre. Ainsi, la notę du 26 novcmbre 1861 du Secrćtaire d’Etat britanniąue aux aflaires ćtrangeres, le comte Russel, k M. Adams, ambas-sadeur des Etats-Unis d’Amćriquc, justifia la nćccssite des relations que la Grande-Bretagne entretenait avec les Confćdćrćs dans les termes suivants :
1 x Gouvemcment de Sa Majcste considćrc comme un principc certain du droit international, lorsąue la personne ou les biens de sujets ou dc citoycns d'un Etat subissent un prćjudicc dc la part d’un gouvernement de facto, le droit de 1’Etat ainsi lese de rćdamer au gouYcmcmcnt de facto le redressement du tort et la rćparation ”ł.
Le 9 avril 1914, des membres de Pćąuipage du bateau americain Dolphin, a 1’ancre k Tampico (Mexique), furent arretćs par une bandę armee du gćnćral de la Huerta, chef du gouvemcment qui alors s’ćtait temporai-rement empare du pouvoir. Lc 11 avril, le commandant dc Pcscadrc amćricaine demanda aux autoritćs de ce gouvernement diverses formes de rćparation. Lc Dćpar-tement d’Etat appuya ces demandes dans des instructions cnvoyees le 14 avril au Charge d’afFaires des Etats-Unis k Mexico. Le gćnćral de la Huerta n’ayant pas donnć satisfaction, les forces americaines procederent le 21 avril k Poccupation de Yeracruz 262. Plus rćccmment, le Gou-vernement britannique presenta a trois reprises, pendant la guerre civile cspagnole, des rćclamations au gouvernc-ment nationalistc, alors installe a Burgos ou a Sala-manque. Ce fut apres la perte du destroyer Hunter, qui sauta le 13 mai 1937 sur une minę posće par les natio-nalistes a 4 milles au large d'Almeria, apres la destruction du vapeur Alcyra, coulć a 20 milles de Barcelonę le 4 fevrier 1938 par deux hydravions de la basc nationaliste de Majorque, et apres Pattaque du cargo britannique Stanwell par un avion nationalistc, le 15 mars 1938, dans le port dc Tarragone. Dans les trois cas, une demande formellc dc rćparation fut adressee aux autoritćs nationalistes 363.
29) En ce qui concerne la formulation de la regle dcvant figurer dans le present article, la Commission, compte tenu des considćrations qui precedent, a decidć de con-sacrer au paragraphe 1 le principc dc base de la non-attribution a PEtat du comportcment d’un organe d’un mouvcment insurrectionnel ćtabli sur le territoire dc cet Etat ou sur tout autre territoire sous son administration.
899 II y a 1&, manifestement, une preuve de plus de la conviction des Etats demandeurs de rimpossibilitć d’attribuer au gouvernement «legitime » les comportements prćjudiciables en ąuestion.
m Moore, A Digest... (op. cit.), vol. I, p. 209 [tr. de Poriginal anglais].
891 Hackworth, op. cit., 1941, vol. II, p. 420 et 421.
193 Ces cas sont relatćs dans Particie de Ch. Rousseau : « La non-intervention en Espagne » (loc. cit., p. 277 et 278). L’autcur rappelle aussi que la Juntę dc defense nationale de Burgos accepta une rćclamation portugaise pour des ćvćnemcnts anterieurs a 1’occupation par les forces nationalistes de la zonę qui en avait etć le thć&tre (ibid., p. 278 et suiv.), mais clle agissait alors plutót comme « successeur » du Gouvernement de la Rćpubliąue cspagnole. Voir aussi la position adoptóe par le Gouvernement des Etats-Unis d’Amerique a 1’occasion de l’attaque du navire americain Kane (Hackworth, op. cit., 1940, vol. I, p. 362 et 363; ibid., 1943, vol. VII, p. 172 et 173).
L’expression «ou sur tout autre territoire sous son administration » a etć insćree aftn dc tenir compte du statut juridique des territoires dćpendants, que Pon nc saurait aujourd’hui considerer, sans un abus de langage, comme «territoires de 1’Etat». L’expression «mouvement insurrectionnel ćtabli sur le territoire» a etć choisie comme ćtant cclle qui soulignait le mieux que le com-portement de 1’organe du mouvement insurrectionnel ne saurait etre attribuć k 1’Etat territorial, et cela indćpcn-damment de la question dc savoir si cct Etat est ou non 1’Etat contrę lequel ou contrę le gouvernement duquel le mouvement est dirige. On tient ainsi compte du cas ou le mouvement insurrectionnel opere dans un Etat tiers ou a partir de celui-ci. L’hypothese a laquelle Particie 14 se refere est ćvidcmment celle ou Porgane du mouvement insurrectionnel en question agit en qualite d'organe. ta Commission n’a cependant pas estimć nćcessaire d’intro-duire une telle prćcision dans le texte de Particie, ce dernier ćtant redige sous une formę negative. La conclu-sion dc la non-attribution k PEtat vaudrait evidemment aussi — en vertu de Particie 11 — pour les faits qu’un organe d’un mouvement insurrectionnel commettrait a titre privć.
30) C*est pour ćviter toute equivoque concernant un manquement eventuel par PEtat a ses propres obligations internationales que le paragraphe 2 de Particie ćnonce, sous la formę d*une clause de sauvegarde, que le principe dc la non-attribution a PEtat du comportemcnt d’un organe d’un mouvement insurrectionnel est sans prćju-dice de Pattribution k un Etat de tout autre comportcment qui est en rapport avcc celui de Porgane du mouve-ment insurrectionnel et qui doit etre considerć comme un fait de cet Etat en vertu des articles 5 a 10 du projet. II est a noter qu’en renvoyant a ces articles du projet la formule adoptec embrasse tous les cas ou un fait peut etre considćrć comme un « fait de PEtat» selon le droit international et engager eventuellement sa responsabilitć internationale, et pas seulement les cas oii Pauteur du comportement est un organe de PEtat du point de vue de son droit interne.
31) Lc paragraphe 3 de Particie contient une scconde clause de sauvegardc, rclative celle-li au mouvement insurrectionnel lui-meme. En vertu de cette clause, la non-attribution a PEtat du comportement d’un organe d’un mouvement insurrectionnel est sans prćjudice de Pattribution du comportement de Porgane du mouve-ment insurrectionnel a ce mouvcmcnt. Lc but de cette clause n’est pas de rćgler par ellc-mćme les problemes d’attribution qui sc posent a ce sujet, mais de prćvoir, compte tenu dc la pratique internationale, la possibilite d’une telle attribution en renvoyant, pour la solution de ces problemes, aux principcs du droit international en la matiere. C’est precisement pour ne pas prćjuger ces Solutions quc la Commission a preferć la formule « dans tous les cas ou une telle attribution peut se faire d’apres le droit international» k d’autrcs expressions suggerćes au cours du debat, telles que « dote d’une personnalite distincte (ou propre)», «dotć d’une personnalitć re-connue »,« s’il contróle une partie de PEtat en question », ou encore « dont le statut international est applicable aux relations en cause ». L*emploi d’une quelconque de ces dernieres expressions aurait pu faire croire que la