Clause de la nation la plus favorisee 9
— ou peuvent dissuader — 1’Etat bćnćficiaire d’exercer son droit, c’est la bien entendu une toute autre qucstion.
13) Dans ses conclusions 1 27, Sauvignon cite un article d1Alcxandrc-Charles Kiss28 dans lequcl cclui-ci devc-loppe 1’idće suivante : on admet genćralement que si l’Etat concćdant et un Etat tiers s’unissent pour former un Etat fedćral, ou memc une confederation, le bćnćfi-ciaire d’unc clausc de la nation la plus favorisćc pcrd le droit d’invoqucr les avantages qui etaient accordćs par 1’Etat concćdant a 1'Etat tiers avant leur union. Par con-sćquent, estime Kiss, de meme qu’il est coutumier d’ac-corder une exccption k la clause dans le cas des unions douanieres en voie de formation, dc meme serait-il logiquc d’exclure dc son application les groupements dont l’ob-jectif finał est, comme c’cst le cas pour la Communaute ćconomique europćenne, de fusionner les Etats membres en un Etat uniquc.
14) Kiss cite ćgalement le cas de la Communautć europćenne du charbon et dc 1'acier : divers Etats bćneficiaires d’une clause de la nation la plus favorisee k 1’ćgard d‘Etats membres dc cette communautć n’ont pas reclamć son application. Kiss expliquc leur attitude par la dispo-sition du troisićme alinea du paragraphe 20 de la Con-vcntion relative aux dispositions transitoires annexće au traitć instituant cette communaute29, qui menace d’action commune les Etats qui voudraicnt faire valoir les droits que leur accorde la clause de la nation la plus favorisće. II ćcrit k ce propos :
Visiblement, on quitte ici le terrain du droit parce que le droit dcvient inapplicablc en face de la situation recllc. II y a ici un avcu irrćfutablc quc la clause dc la nation la plus favorisće est incompa-tiblc avcc les traitćs d'union regionale et quc son application abou-tirait k des consćquenccs tellcment inadmissiblcs qu’il vaut micux recourir k des moyens extraordina ires plutót que dc les acccpterJ0.
A ces rćflexions Sauvignon ajoute le commentaire suivant :
Cette opinion doit ćtre fortement nuancće. II n’est pas certain que 1’application dc la clause aux avantages contcnus dans des conventions multilatćrales fermees aboutisse toujours ć des con-sćquences inadmissibles, et qu’unc nouvcllc cxccption a la clausc doivc apparaitre. II est en effet fort difficilc dc poscr un critćre dc distinction entre les regroupements authentiques, qui poursuivent un resserrement permanent des liens entre les pays membres, cn attendant le passage k 1’union ćconomique, puis politique, et les simplcs prćfćrcnces copjoncturelles, qui ne visent k rien d'autre qu’i ćchappcr a la rćglc d’ćgalite posee par la clause. Pour ccllcs-ci, le traitement dc la nation la plus favorisće constitue un obstaclc juridiquc justifić. Pour ccux-I&, il revient aux Etats membres de prouver la cohćsion et la finalitć du groupement, en menant k 1’ćgard des tiers bćnćficiaires dc la clause une politique commune effective, qui dissuade d’attentcr a rintćgritć dc 1’ordre coliectif instituć ,ł.
15) Kiss concłut son article de la manićre suivante (ce passage n’est pas citć par Sauvignon) :
II est une autre qucstion dc savoir si, le cas echeant, un arbitre statuant dans 1’esprit d’ćquitć ne se considćrerait pas amenć a reconnaitre le caractere souhaitable de certaines compensations, k consentir par le gouvernement qui participe k l'oeuvre d’unification £ 1’Etat tiers bćnćficiaire de la clause de la nation la plus favoriseeał.
16) Tous ces textes etaient, pensons-nous, la solution adoptće pour Particie 8 bis. Les auteurs cites voient tres claircmcnt quc, de lege lata, il n’existe pas de normę inter-nationale qui excepte les traitćs multilatćraux, ouverts ou fermćs, de 1‘application de la clausc de la nation la plus favorisee — sauf disposition expresse k cet cfict M. Pour la meme raison, le Rapportcur spćcial ne tient pas non plus k insister sur les particularites des traitćs multi-lateraux dits « restreints », qui visent a rćsoudre les cas ou 1’Etat concćdant se trouve pris dans un reseau d’obli-gations contradictoires nćes des traitćs qu’il a lui-meme signćs; k son avis, en effet, ce probleme ne rentre pas dans lc champ de la presente etude 34.
ITI. — IAt cas des unions douanieres et des associations analogues d’Etats
9. On examinera dans les pages suivantcs les rapports entre la clause de la nation la plus favorisee et les avan-tages accordćs dans le cadre d’une union douanićre ou d’autres associations analogues d’Etats. Cette mćthodc est justifiee, semble-t-il, par le fait quc les unions douanieres et les autres associations comparables d‘Etats ne sont pas toujours multilatćrales, bien qu’elles le soicnt souvent. II s’ensuit quc les conclusions auxquclles on aurait abouti en ce qui concerne les rapports existant entre la clause ct les traitćs multilateraux ne peuvent pas s’appliquer automatiquement dans tous les cas — du moins pas celui des unions douanieres bilatćrales. En outre, le Rappor-teur spćcial a promis de procćder k cet examen 35 k cause du caractćre spćcifiquc dc ces unions et du grand nombrc des problemes en cause.
10. Avant d’entreprendre cette ćtudc, deux remarques prćliminaircs s’imposcnt :
a) Par « associations analogues d‘Etats » on entend, outre les unions douanieres :
i) une zonę de libre-echange;
ii) tout rćgime transitoire conduisant a la formation d’une union douanićre ou d’une zonę dc librc-ćchangc;
iii) toute autre organisation ou tout autre groupement d’Etats qui repose sur une union douanićre, une zonę de librc-ćchange, ou un rćgime transitoire aboutissant ou devant aboutir k la formation d’une union doua-niere ou d’une zonę de libre-echange.
•1 Kiss, loc. cit., p. 489.
** Les traitćs multi!ateraux aussi bien « ouverts » que « fermćs » produLsant les memes effets, le Rapporteur spćcial s’abstiendra d’entreprendre une analyse de ces deux expressions et d’cxamincr la gammę ćtendue de cas inccrtains qui se trouvent entre ces deux extremes.
** D’autres propositions relatives aux articles 6 ąuater, 1 bis, 15 et 16, qui figurent dans le cinquićme rapport, seront faites par la suitę.
” Voir Armuaire... 1973, vol. II, p. 114 ct 115, doc. A/CN.4/266, art. 8, par. 22 du commentaire.
ł Ibid., p. 277.
A.-Ch. Kiss, « La Convention europćenne d’ćtablisscmcnt ct la clause de la nation la plus favorisee », Armuaire franęais de droit international, 1957, Paris, vol. III, p. 478 & 489.
” Voir par. 8 du commentaire dc 1'article 8.
,0 A.-Ch. Kiss, !oc. cit., p. 486.
M Sauvignon, op. cit., p. 277.