Rapport dc la Conunission & PAssemblee gen era łc 91
des agissements illicitcs. Par contrę, dans unc notę dis-tincte adressće au Gouvernement des Etats-Unis, ce gouvernemcnt etait tenu pour rcsponsable du fait de ses propres organes militaires, auteurs des lancements. Dans sa rćponse du 6 mars 1956, lc Gouvcrncment fćdćral allemand se rćfćra k une notę reęue le 8 fevrier du Gou-vernement amćricain, dans laąuelle ce dernier donnait 1’assurance qu’il essaicrait, pour le moment, d’ćviter le lancement d’autres ballons, encore que ceux-ci n’aient ćtć destinćs qu'k rccueillir des informations mćtćorolo-giques. Le Gouvernement allemand considerait donc la question comme close. La notę allemande ajoutait qu’on avait procćdć k une enquete et que celle-ci avait prouvć qu’aucun ballon n’avait ćtć lancć du territoire allemand pour diffuser des tracts de propagandę politique. Mais le Gouvcrncmcnt sovićtique rćpliqua par unc nouvcllc notę, du 24 mars 1956, dans laquelle il qualifiait d*inexactes les assertions contenues dans la rćponse & sa premierę notę et reprochait de nouveau au Gouvernement fćdćral allemand dc tolćrer des agissements illicitcs dc la part des forces americaines stationnćes en Allemagneiea. Quel qu’ait ćtć le fond de 1’affaire, il ressort sans aucun doutc possible de cet ćchange de notes que les protestations adressees a 1’Etat territorial se distinguaient nettement de cellcs qui ćtaient ćlevees k titre principal contrę PEtat d’appartenance des organes auteurs des actions incriminćes. Ce que l’on reprochait a PEtat territorial n’ćtait que le manquement dont il se serait rendu cou-pablc quant a ses propres obligations.
7) Dans ce mćme contextc, on pcut rappclcr un incidcnt qui se produisit lors de la visite en Autriche, du 30 juin au 8 juillet 1960, du Prćsidcnt du Conseil des ministres de PURSS, N. Khrouchtchev. Le Premier Ministre sovie-tique tint de nombreux discours, dans lesquels il accusa lc Gouvcrnemcnt amćricain d’avoir voulu torpillcr, par les voIs de ses « avions pirates» U2, la conference au sommet prćvue. En termes violents il mit aussi en cause le militarisme des pays occidentaux, et notamment le rcvanchismc oucst-allcmand. Lors d’unc confćrcncc dc presse, il alla jusqu’a comparer le chancelicr Adenauer a Hitler. Le Gouvernemcnt dc la Rćpublique fćdćralc s’estima oflensć dans son honneur par de tels propos. Mais, en meme temps, Pambassadeur de la Republique fćdćralc k Vicnnc fit unc demarche aupres du Gouverne-ment autrichien pour souligner le caractere inhabituel de la situation, due au fait que les paroles profćrćes contrę le Gouvernement de la Rćpublique fćdćrale Pavaient ćtć en prescncc du Ministre autrichien des afTaircs ćtrangćrcs. Le meme jour, PAmbassadeur des Etats-Unis protesta parce que P«attaque calomnieusc» contrę son pays avait eu lieu sans que le Gouvernement autrichien eut estime necessaire de s’en dissocier. Le chancelier autrichien Raab saisit alors Poccasion dc son discours d'adieu pour marquer cette dissociation. Une notę parut en meme temps dans la Wiener Zeitung, assurant que lc Gouverne-ment autrichien ćtait tout a fait ćtranger aux propos qui avaicnt ćtć tenus, et soulignant qu’un gouvcrncmcnt ne pouvait rćpondre de ce qui se disait dans une confć-rence de presse que si lui-mćme la tenait. On y rappelait
m Voir les dćtails de cette affaire dans Zeitschrift fiir auslan-disches ójfentliches Recht und Vólkerrecht, Stuttgart, vol. 18 (J 957-1958), p. 723 et 724.
aussi que lc discours du Premier Ministre sovićtique avait ćtć prononce au siege de Passociation austro-sovićtique, institution privće, et que la prćsence du Ministre autrichien des affaires ćtrangeres n’avait ćtć qu’une marque dc courtoisic cnvcrs Phótc 169. Sans qu’ici non plus il n’y ait k entrer dans le fond de Paffaire, il est a noter simplcmcnt qu’on y trouvc unc confirmation de plus du fait que ce que Pon allegue dans de tels cas comme source d’une responsabilitć dc PEtat territorial, ce ne sont certes pas les actes emanant d'organes etrangers, mais Pattitudc passivc ou negligentc quc les organes de cet Etat auraient eue a Poccasion de ces actes.
8) Le principe selon lequel, dans les hypotheses envi-sagćes, la responsabilitć internationale de PEtat territorial ne peut ćtre engagće quc par un comportcmcnt ćventuel de ses propres organes, adoptć en rapport avec les agissements dc Porganc ćtranger et rcprćscntant comme tel la violation d’une obligation internationale, est egale-ment partagć par la doctrine. II a ćtć incorporć dans certains projets de codification, comme celui qui a ćtć ćlaborć en 1929 par la Harvard Law School 17°, ainsi quc dans Pavant-projet soumis & la CDI en 1961 par F. V. Garda Amador 171. Certes, on a parfois prćtcndu voir dans toute une sćrie d’affaires, remontant pour la plupart au siecle dernier, des cas de responsabilitć indi-recte de PEtat territorialm, mais, comme certains auteurs 173 Pont mis en ćvidcnce depuis lors, la responsabilitć de PEtat territorial n’avait pas ćtć misę en cause dans les cas en question, si ce n’etait pour un manque-ment par ses propres organes k leurs dcvoirs dc protection des Etats ou des ressortissants etrangers. En effet, dans tous les cas, cc quc Pon considćrait comme fait gćnćratcur de la responsabilitć de PEtat territorial n'etait pas Paction commise sur le territoire dc cet Etat par Porgane ćtranger, mais la negligence ou le manque de reaction vis-a-vis d’unc telle action par les organes propres dudit Etat. Au surplus, cette responsabilitć avait ćtć parfois invoquće dans des situations ou Pauteur de Paction prejudiciable commise sur le territoire d’un Etat, tout en ćtant un organe d’un Etat ćtranger, n’avait agi qu’a titre prive ,74.
“• Ibid., vol. 23 (1963), p. 348 et 349.
1,0 D’apres Particie XIV du projet :
« Quand lc fait commis sur son territoire ct qui cause un dom-mage a un ćtranger est imputablc a un autre Etat, PEtat n’est rcsponsable que s’il n’a pas fait preuve de la diligence rcquisc en vue de prćvenir le dommage. »
(Annuaire... 1956, vol. II, p. 230, doc. A/CN.4/96, anncxc 9.) m L’article 15 de Pavant-projet est conęu comme suit :
« Les actes et omissions d'un Etat tiers ou d'une organisation internationale ne sont imputablcs a PEtat sur le territoire duquel ils se sont produits que dans le cas ou cet Etat a eu la possibilitć d’ćviter Pacte dommageable et n’a pas exercć la diligence dont les circonstances lui permettaient de faire preuve. »
(Annuaire... 1961, vol. II, p. 50, doc. A/CN.4/134 et Add.l, additif.)
173 F. Klein, Die mittelbare Haftunr im Vólkerrecht, Francfort-sur-!c-Main, Klostcrmann, 1941, p. 265 et suiv., ct 299 et suiv.
173 A. Verdross, « Theorie der mittelbaren Staatenhaftung », Oes-terreichische Zeitschrift fiir ójfentliches Recht, Vienne, vol. I, n° 4 fnouv. ser. 1 (mai 1948), p. 405 et suiv. Voir aussi, k propos dc ces cas, R. Quadri, Diritto internazionale pubblico, 5e ćd., Naples, Liguori, 1968, p. 602 ct 603. Les deux auteurs contestent la thćse dc Klein.
174 Ce fut le cas lors de la rćclamation adressće en 1852 par la Grande-Bretagne au Gouvemement toscan a cause des mauvais traitements infligćs a un ressortissant britannique, Mather, par un officier autrichien stationnć en Toscane et ayant agi i titre privć.