5 L'image de 1'tautre* dans les manuels scolairc 19
miśrement de la comparaison par rapport au niveau culturel — une comparai-son ■ qui va de pair avec l'image que l'Occident s'ćtait dćja formę de 1’Orient — et deuxiemement des rapports entre domines et dominants ćtablis apr£s la chute de Constantinople et jusqu’a la collision finale en 1821. Cette image, sous-tendue par 1’enseignement de 1'histoire, est complćtće par la gśographie qui, au toumant du XIX® siecle, insiste sur le retard culturel de la Turquie.
L'image des Bulgares, du second peuple balkanique qui fut considćrć comme un ennemi national, est formee a travers un processus plus complexe et remarquablement tardif, c’est-a-dire apr£s 1880, au moins dans le domaine de l'ćducation sur laquelle se focalise notre interet analytiąue u. Les Bulgares, absents ou indiffćrents pour la conscience nationale neohellćnique jusqu’i la moitć du siecle, sont evoquśs comme un ennemi « sćculaire » d'une part dans le cadre du panslavisme qui apparait croissant dans les annćes qui suivent la guerre de Crimće et d’autre part a cause de leur apparition dyna-mique sur la scśne politique des Balkans surtout k partir des annćes 1870. En ce qui conceme les Bulgares d’ailleurs, pendant cette meme pćriode, l’« anti-hellćnisme » devient un element indispensable de leur propre identitć nationale 12. Le developpement prćcoce de l’« anti-slavisme» en Grece fut favorise par la lutte contrę la thćorie de Fallmerayer. Fallmerayer avait soutenu que les Grecs avaient śte « slavises » au moyen age et avait donc contestć la puretć raciale des Grecs modemes et leur descendance des Grecs anciens 13. II s’en suit que Fallmerayer se rangea dans la lignee des «mis-hellenes > (ennemis de 1’hellćnisme) tandis que 1’identitć nationale grecque dćveloppa des mecanismes d’autodefense contrę le danger slave.
• Ces manifestations precoces ne se refletent pas dans les manuels sco-laires. L’attitude hostile envers les Bulgares ne s’y rencontre qu’apres 1870 et surtout apres les traitśs de San Stefano et de Berlin (1878) et l’annexion de la Romćlie Orientale a la Bułgarie (1885). A 1’encontre de ce qu’on a deja constatć par rapport a l’image des Turcs, la dścouverte des Bulgares s’accom-pagne d’un fanatisme aigu. L’6miettement ćventuel de la Turquie en faveur des Slaves renverse la hierarchie des ennemis nationaux.
. Le fanatisme contrę les Bulgares est formule nettement dans les manuels de geographie publićs apres 1888, qui regorgent d’adjectifs qualificatifs sur le caract£re national bulgare mais aussi sur les prćtentions actuelles de la Bułgarie au detriment de la Grece. Cependant le plus grand intćr&t rćside dans les manuels d’histoire ou l’on tend £ reconstruire les rapports histori-
11 En dehors de 1'ćcole, les premieres manifestations de changement d'attitude envers les Bulgares peuvent 6tre signalćes vers la fiu des annćes 1850. Cf. Gunnar Hering, « Die Bul-garen in den Schriften griechischer Intellectueller in der ersten Halfte des 19. Jahrhunderts t>, Milncher Zeitschrift'filr Balkankundc 3 (19S0), pp. 47—66, et Alexis Politis, ,,H 8tacpopo7rolr)OT) ryję tWrpiY.yfc crziarfc a7r£vocvTi orouę BouAytfcpouc; otcc y.Łocc *tou 19ou ai&va. IIpo^^aToc e0vtxla^x(^v,, (La transformation de Tattitude grecąue envers les Bulgares vers la moitić du
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XIXP- siacie. Autour des questions de national ismes), H Apiazipa orjpepa 8 (sept.-oct. 1984), pp. -58.-62.
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12 V. Elli Skopetea, To „llpozzmo Baaiteio” xai rj Mtyahj ISea. Oy/eiS zoo e0vi%oo
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7tpofi?.fjpazoę oztjv EMaóa 1830—1880 (Le « Royaume Idćal) *et la Grandę Idće. Aspects de la question nationale en Grfcce, 1830—1880), Athfcnes 1988, p. 187.
-1* II s'agit de son oeuvre Geschichte der Halbinsel Morea (1830). Sur les motifs politiqueś de la^hćorie de Fallmerayer et sur les rćactións des Grecs et des historiens ćtrangers, v*. G.
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Veloudis, O J. Ph. Fallmerayer xat t} ytyeot) zoo eUjjviy.oo UJzopiopoo (J. Ph. Fallmerayer et la naissance de ThistoriSme grec), Athćnes 1982.