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toujours grandissants, toujours impossibles a prevoir. A propos des reformes de Constantin Mavrocordat, A. Treboniu-Laurian consid£re qu'il śtait impos-sible de les appliquer « k cause de l'avidite sans limites des Turcs, qui ne respectent pas des lois, mais obligent m&me le meilleur prince a pressurer le pays comme un tyran » 38.
Tr&s attache aux valeurs nationales et aux mentalites romantiques, le livre scolaire d'histoire denonce le plus grave danger que les Phanariotes pouvaient representer: la dćnationalisation. Ainsi les Phanariotes etaient «des instruments totalement asservis aux Turcs et hostiles aux Roumains /... / qui venaient ici /.../ pour avilir le peuple afin de detruire tout sentiment roumain »37. Xenopol, lui-aussi, constate que, avec les Phanariotes les Roumains etaient menaces, « au-dessus de tous les autres maux », par le danger « d^Stre denationalises » 38. Pourtant les manuels passent en revue les plus importants princes phanariotes, leurs reformes ou leurs preoccupations socia-les sans oublier, bien sur, de preciser que toutes leurs actions ne servaient ■que la Porte ou leur interćt personnel. II s'agit de Nicolas et Constantin Mavrocordat, Alexandre Ipsilanti et Gregoire III Ghica, Jean Calimachi et Jean G. Karadja. Parmi eux le cas le plus interessant est, peut-etre, celui de Gregoire III Ghica, devenu, parce qu'il avait proteste contrę l'occu-pation de la Bucovine par les Autrichiens, un veritable heros roumain. « Dore-navant les Ghica ne font plus partie des Phanariotes; ils ont acquis la natu-ralisation par le sang de leurs ancćtres » 39.
Puisque les Roumains etaient assaillis par tant d'ennemis il reste un seul probleme a resoudre: comment ont-ils pu survivre? Les mots de l'his-torien roumain Georges Bratianu—« une enigme et un miracle historique»: le peuple roumain — semblent 6tre finalement l'expression exacte d'un etat d'esprit bien repandu dans la societe roumaine. Par exemple, B.B. Seca-reanu, et il n'est pas le seul, considere qu’apres tant d'epreuves, l'existence du peuple roumain est un * veritable miracle divin »40. « La Providence veil-lait a fortifier la patience des Roumains * 41 jetes par un destin brutal au carrefour de tous les malheurs. Le Bon Dieu n'abandonne pas le peuple oppri-me, surtout s'il tourne ses yeux vers la sagesse des lettres ou de la sainte religion 42. Et voici la preuve:« Les Polonais ont eu un tel sort a cause de leur desunion /... / et surtout parce que, au lieu de vivre en paix avec les Roumains, ils ont cherche a leur faire du mai, mais Dieu ne les a pas aides, ni eux, ni
les Hongrois et tous les deux peuples ont dechu tandis que notre pays s'ćleve
toujours vers la prosperitę et la grandeur » 4S. On trouve parfois m§me un
message messianique explicite: «Ne doutez pas que le Dieu de nos ancćtres
J.../ enverra un redempteur qui vous delivrera vous m^mes ou, sinon, vos
*• A. Treboniu-Laurian, Iilemettie de... ed. de 1859, p. 131.
37 B. B. SecJireanu, Ptescurłare..., I8ro ed., p. M8.
38 A. D. Xenopol, Isłotia Romdnilor___, Xe 6d., p. 123.
*® N. C. Florentiu, Nofiuni de istoria romdnilor peniru clasele III }i IV primarii, 11° 6d., Bucarest, 1872, p. 103.
40 B. B. Sedlreanu, Prescurtare..., XI* 6d., p. 24.
41 N. C. Florenfiu, Nofiuni..., XXIII* 6d., p. 115.
48 V. A. Urechia, Istoria Romdnilor..., IX® ód., p. 8.
« Idem, ód. de 1859, p. 48.