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trois semaines bien rigoureux ; il y a du temps que nous n'avions rien eprouvć de si rigoureux ; il commence b sćloigner, mais le verglas qui sest montrć avec le jour est bien dangereux : j*espćre qu’il ne durera pas, dśji les pauvres en ont beaucoup souflert. J en ai ressenti ma bonne part, les nuits surtout, car le cliraat d.Alsace est & peu prfcs le plus dur de notre France : et Fon nous a tant retranchć depuis 1'annee Trenie, que nos revenus ne suf-flsent plus pour nos pauvres.
« Je deciine b mon tour ; je ne suis pas ce que tu me crois, b 83 ans passćs, il fautbaisser paviłlon et mćme bas. Je vais encore passablement, mais avec prścaution. en prenant mon temps et cboisissant les beures et les chemins.
« J'ai livre mon malin rćfractaire a deux jeunes et habiles professeurs qui le travaillent d'iinportance. Tu as dO le voir dans YAmi de la Religion : ils Font dćj& rćfutć dans deux longs arlicles ; quand ils le laisseront, je le reprendrai probablement sous oeuvre. 11 a mis de la ruse et de la mauvaise toi dans sa defense. Si je Fentreprends, il le senlira, il le móriterait, car on me dćnonce de mau-vais projets de sa part, je ne puis les lui passer : il m a trompć dans les premiers temps, autrement il naurait jamais 4tć pr^tre.
« Adieu, mon excellent, mon incomparable ami. Adieu, ne m oublie pas dans les saintes prieres, puissć-je avoir le bonheur d’£tre prfcs de toi, de partager ton sort dans le monde a venir, et b ne plus cbanger. Adieu, tout b toi, si Uieu daigne me faire misćricorde. Prtuj for me, mg besl friend ».
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LXV. — Prtmord est au ciel. Toujonrs aux prises auec Hautuin.
« Marlcnhciin, prA* Strasbourg, 10 Scptrmbre 1837.
« U y a si longtemps que notre commerce epistolaire est suspendu, que j aurais dix pages a remplir si je pou-vais te dire tout ce que je voudrais; nous avons fait une perle bien cruelle pour ton cceur et le mień, Prćmord est au ciel depuis deja dix & douze jours (1) : il a dćsirć tes prifcres pour ohtenir la grace d une bonne mort, elle a etć admirable pour toute la communautć, au inilieu de laquelle il vivait, et qui le regarde comme un saint. Nous l'avons toujours connu de mdme, il a eu le bonbeur de recevoir tous les secours spirituels, et a diverses reprises apres des intervalles de mieux. Eufin, il a rendu sa belle ame i Dieu le 26 Ąońt, a 8 beures du soir. YoilS ce que l on m a ćcrit le 31 Aodt; il paratt avoir beaucoup souf-fert; sa rćsignation, sa patience l ont ćleve au-dcssus de ses souflrauces. J espćre quil sera notre intercesseur au ciel, tu n'en a pas besoin : je rinvoque pour moi; je suis persuade qu’il ne m oubliera pas nous avons ćle intime-ment liśs depuis son entróe h Saint-Magloire.
« Voilń notre vieux trio rompu par le plus jeune de nous trois, tu resteras le dernier, car mon Age d'environ 83 ans m'avertit de me tenir aussi prót que possible, tu nous enterreras, je 1’espere. Prie pour moi, mon bien cber ami.
(1) Les Kcligicuses bćntdiotines ayanl quitte Huywood. M. Prrmord. dijA ugć et infirmc, y renta. Cesi 1A qu’il »'afTaiblit groducllcmcnt ; il etpira le 26 Aodt 1837, A l*Agc de 77 sih. Ayanl ronieni, jusqu'A la lin, toute* ses focultes, ii ćdifia ccui qui l'entouraient par sa douceur et sa rćsignatiou, comme ii les avait edifiis pendant sa vie, par sa modestie ct sa charitc.