514 SCIENCE CRIMINELLE ET DROIT PĆNAL COMPARE
elle a bien ete soumise a une soustraction dans laquelle l’evolution de la notion de soustraction autorise a voir une soustraction au sens de 1’article 379 du codę penal.
Dans la mesure ou elle est le resultat d’une evolution, la reconnaissance du vol d’information seule est une revolution douce ; la reconnaissance correla-tive d’un droit de propriete sur rinformation Test aussi.
Cette revolution nous parait douce pour deux raisons. D’abord parce que le principe de la legalite criminelle n’interdisait pas de creer un droit nou-veau (1). Ensuite parce que la Chambre criminelle a limite cette seconde revolution en ne reconnaissant qu’un vol d’usage (2).
l.Le principe de la legalite criminelle n’interdisait pas de creer un droit nouveau
Si on laisse de cóte la question, deja amplement debattue mais qui devra l’etre encore, du droit de propriete sur rinformation seule (V. en particulier, Catala,« Ebauche d’une theorie juridique de rinformation », D. 1984. chroń. 17; Le Stang et A. Prum,« Les droits en France des createurs d’information», Rev. internat, dr. econ. 1989. 211) pour se demander, simplement, si la Chambre criminelle pouvait reconnaitre un tel droit, on peut bien sur re-pondre par la negative. II suffit pour cela de faire valoirque le vol relevant du droit penal sanctionnateur, son application doit etre reservee a des droits de propriete prealablement reconnus. Toutefois nous n’etonnerons pas (V. « une information seule est-elle susceptible de vol d’une autre atteinte juridi-que aux biens », D. 1985. chroń. 43 et s.) en preferant une reponse positive qui peut etre donnee pour trois raisons essentielles.
— D’abord, nul ne conteste plus que certaines informations sont des ri-chesses constituant des biens; cela est particulierement vrai s’agissant des fichiers de clientele qui, depuis longtemps, sont, dans le droit de l’abus de confiance, consideres comme des marchandises. Or ce qui donnę aux fn chiers de clientele leur valeur marchande, ce n’est pas leur support, que!> qu’il soit, mais leur contenu. n
— Ensuite, 1’article 379, figurant sous la section « crimes et delits contrę les; proprietes », la lettre de la loi penale n’interdit pas d’etendre le vol a de^ biens qui n’existaient pas en 1810.
— Enfin, des lors que cela n’est pas contraire a la lettre de la loi penale/ nous ne voyons pas pourquoi on reprocherait a la jurisprudence penale dć] proceder a des creations qui, si elles etaient le fait de la jurisprudence civile!; ne seraient probablement pas contestees et seraient, sans doute meme,^ considerees comme des progres. Ainsi, bien avant que la loi du 17 juillet 1970 ne vienne consacrer un droit nouveau, le droit de la personne, sur sa vie pri-r' vee, la jurisprudence civile avait reconnu le principe de l’existence d’un veri-| table droit de la personne sur sa vie privee, puisque tres vite elle s’est bomee,: pour appliquer 1’article 1382 du codę civil, a constater l’existence d’une atteinte au patrimoine morał d’autrui. Or, de 1955 a 1965, cette creation jurisprudentielle n’a pas fait 1’objet de critiques majeures (V. M. Contamine
Rev. sciencecrim. (3), juill.-scpt. 1990