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marque: « Comme vous, j’ai d’abord altribuć ces particularitls si nouvelles A la crćdulitć d'uo peuple trćs simple... Mais, depuis, il m’est renu A moimćme des choses si singulitrcs et de si dif-ferentc cspćce, et si fort au dessus de 1'imagination humaine, que j’ai dd reconnaltre que le doigt de Dieu ćtait 1A. > (D'apr£s H. Hue-mond : Hisl. Uli. ilu tentimenl religieui en France, V-1I|.
Cest A cette ćpoque et dans ce inilieu de foi vive que se sont accomplis les miracles de Sainte-Anne d'Auray.
II y a plus d’une mani&re de se mśprendre sur le caract^re des miracles dans les Pfclerinages.
Les uns en travestissent la naturę : k leurs yeux, Lourdes et Sainte-Anne d’Auray ne sont que des offi-cines de guerisons naturelles, en concurrence avec les sta-tions thermales. — Nous n’essaierons pas de leur rć-pondre, « on nc discute pas avec desgens qui rejettent la possibilitć des miracles (1). »
Dautres, des catholiques ceux-ci, en rapetissent le róle, en s’imaginant que Dieu accorde des miracles uniquement pour venir en aide k des souffrances et k des infortunes qu'il prend en pitić. Cette manierę de concevoir les intcrventions divines, si on la poussait k ses dernidres consdquences, nboutirait ełle-mćme A ne voir dans nos Pólerinages que des officines surnatu-rellea de guórison. — C'est 1’opinion que nous avons k redresser.
Sans doute on a raison de considercr le miracle comme un bienfait personnel pour celui qui en est 1’objet. Mais, croire que le miracle s’arrćte toujours k celui qui en bćndficie immćdiatement, c’est ćvidem-ment se tromper. Dans le plan divin, le miracle va
(1) L’Ecolc dc Hcnan ct de Berthclot prćtendait qu'on nc discute pas avec ccux qui admettcnl ia possibilitć du miracle. Nous rc-tournons cette attitudc contrę cux, et nutre position est plus scien-tifique quc la leur.
Claude Bernard, un des maftres de la science contemporaine, cnscigne que ce n’est pas ou fait A se soumettre A la thćorie, mais A la thAorie A se soumettre au fait.
Nous renvoyons les lecteurs de bonne foi aux ćtudes spAciales qui ont Ató publićes au sujet de Lourdes. Cf. Bkrtrik, Dr Boissa-rie, Df Le Bec...
ordinairement plus loin. S’il prćscnte toujours 1’aspect d'une faveur particulifcre, il a en m6me temps un carac-tóre d'utilitć gćnórale : il est le signe sensible d’une intervention divine qui vient attester la saintetó d’un lieu, d'une doctrine, d’un homme.
A Keranna, ce qu’il y avait k prouver, ce n’ćtait ni la vóritć d'une doctrine comme dans rEvangile, ni la vertu d’un homme comme dans un procfcs de canoni-sation, — mais le choix providentiel de ce village.
Sainte Annę avait dit k Nicolazic: « Dieu veut que je sois honorne en cet endroit. » Et elle le chargea de transmettre ce message aux rcprćsentants de rĆglise. En prćsence des difficultćs que rencontrait sa mission, le Voyant sentit bien vite qu’il ćtait nćcessaire que le ciel lui-móme intervlnt pour confirmer son propre tćmoignage. Et c’est pourquoi, dfcs 1025, il róclamait instamment que Ton vlnt k son aide : « Faites donc quelque miracle, ma bonne maltresse w, disait-il. Et nous savons que sa « bonne maltresse » lui rćpondit « qu’il pouvait compter sur Dieu et sur elle, car il en veYrait bientót en abondance ». Ce dialogue nous sug-gfcre bien, dans sa simplicitć, la vćritable fonction du miracle dans 1’histoire du Pćlerinage ; ni la demande de Nicolazic ni la reponse de sdinte Annę ne font la moindre allusion k des mis&res individuelles k soula-ger;il s’agit uniquement pour eux de faire authenti--quer par des miracles lorigine surnaturelle de la Dćvotion (1).
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II y eut donc des miracles k Keranna; et, suivant la promesse de sainte Annę, il y en eut en trfcs grand nombre.
1. —On avait recours k elle dans toutes les classes de la socićtć indistinctement: quiconque ćtait dans la
(1) Voir dans le Rayonnement du Ptlerinage de Sainte-Anne d'Aurayl un chapitre special sur la valeur documentaire des proc*s-ver-bauz de miracles, tome i, p. 300.