382 SAINTE-ANNR DAURAY
On devine avec quelle ferveur elle prio devant la statuę miraculeuse, oubliant sa lassitude, jelle y demeu -ra longtemps, faisant valoir sa cause et priant sainte Annę de la plaider auprćs de Dieu.
Puis, suivant le rite traditionnel, elle se rendit k la fontaine. LA sainte Annę lui menagea un soulagement: au contact de 1'eau sainte, la douleur de ses membres disparalt, ainsi que sa fatigue. Mais cette faveur per-sonnelle n’ćtait pas ce qu'elle demandait. Elle renou* vela donc longuement sa prtere dans la chapelle; et puis elle reprit, h pied encore, le chemin de Paris, ayant au coeur une invincible tristesse, et le pressentiment qu’elle n'etait pas exaucće.
Et en eflet, dós son arrivće, recommenęa la vie d’en-fer ; elle fut durement accueillie et mćme frappće bru-talement.
Cćtait une femme de foi : « Eh ! bien, se dit-elle, puisque mon pćlerinage n’a pas rćussi, je recommen-cerai. »
Et elle recommenęa.
Quand elle se trouva de nouvcau devant la statuę miraculeuse, elle pria ainsi: « IJonnesainte Annę, dit-elle en pleurant, je reviendrai, ici i pied, tani que vous ne m’au-rei pas accordć la faveur que je voua demande ; vous eiauceres ma priire, ou bien je mourrai de fatigue en chemin. »
Elle eut la conviction intime que sa cause ćtait gagnće.
Et cette fois-ci encore son pressentiment ne la trom-pait pas. Quand efle descendit k la gare Montparnasse, quelle ne fut pas sa surprise de voir venir son mari au-devant d’elle, sans se rendre compte lui-mdme du motif qui !’avait amenć 1A. II l’accueillit avec joie, et lui dit : « Je ne sais d’oCi tu viens; mais, depuis ton dćpart, j’ai ćtć agitć, bouleversć'; il m’a fallu aller k confesse ; j'ai communić. Desormais tu peux compter que jaccomplirai mes devoirs de chrćtien. » „
A son tour, sa femme lui raconte ce qu’elle a fait pour lui, ses pri&res, ses voyages, ses fatigues; et en enten-dant ce rćcit, il jura que c’ćtait bien fini pour iui de boire et de lrćquenter ses inauvais camnrades.
Cet homme ne s’est pas contentć de rcster fidóle k ses engagements ; il a communić depuis lors chaque semaine ; sachant k qui il devait sa convcrsion, on l’a vu pendant longtemps venir lui-mćme k Sainte-Anne, chaque annće, remercicr sa bienfaitrice.
A force de prićres, de souffrances et de persćvćrance, la bretonne avait obtenu pour son mari la santć du corps et la conversion de l’Ame, et pour elle-mćme la paix du foyer.
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Ud libertla — A-^les visiteuses qui lui demandaient quelles faveurs on obtenait actuellement 6 Sainte-Anne, le chapclain fit le rócit suivant. Cćtait en 1866.
II y a quelques mois, vers la fin de 1'automne der-nier, me trouvant dans la chapelle, japeręus un jeune homme qui priait en pleurant aux pieds de la statuę miraculeuse.
— Qu’avez-vous? lui demandai-je. Puis-je vous ótre de quelque utilitś?
— Oh I oui, me rćpondit-il en sanglotant. Je voudrais me confesser.
Jentendissa confession. Et immddiatement aprfcs il me racorfta lui-m6me ce qu’avait etć jusque-l& son existence.
C’ćtait un jeune nćgociant de Saint-Malo, apparte-nant k une familie chrćtienne, et ćlevć dans un collóge religicux. Ses ćtudes une fois terminees, il s’ćtait jetć dans la dissipation et les plaisirs.
Ce jour-ló il ćtait venu & Sainte-Anne, non pour satisfaire sa dćvotion, car il avaitdćjfc abandonnś toute pratique religieuse, mais en simple touriste, pour visi-ter une chapelle cćl&bre dont il avait entendu si sou-vent parler.
Or k peinc en a-t-il franchi le scuil qu*il se sent tout
autre intśrieurement; et dfcs qu'il se trouve devant la
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